La Fed ne fait pas de vagues… enfin, si, mais seulement à la hausse, et qui se prolongent pendant toujours plus de séances boursières.
S’il fallait noter scolairement la Fed sur sa capacité à ne pas provoquer de remous sur les marchés lors d’une réunion de politique monétaire, celle de ces 25 et 26 juillet mériterait un 19,5 sur 20 !
L’annonce à 20h hier d’une onzième hausse du taux directeur (de 25 points de base pour atteindre les 5,25/5,50%, soit le plus niveau depuis janvier 2001) a produit autant d’effet sur les marchés que les résultats d’un tournoi de golf amateur dans le Vermont.
La conférence de presse qui a suivi à 20h30 n’a pas provoqué la moindre vaguelette à Wall Street, sur les T-Bonds ou sur le Forex.
Un pétale de fleur de cerisier tombant dans l’étang d’un jardin japonais un petit matin calme de mois d’avril n’aurait pas provoqué plus de turbulences à la surface des eaux que les ondes sonores sortant de la bouche de Jerome Powell entre 20h30 et 21h15 ce 26 juillet. Il n’a rien dévoilé durant son intervention qui rassure ou qui inquiète Wall Street. C’est un véritable exploit en réalité, car il n’a commis aucun lapsus ni lâché aucune formule choc susceptible de troubler un instant la sérénité de l’assistance.
Même la phrase « je ne pense pas qu’il y aura une baisse de taux cette année » n’a suscité aucune émotion. Pour Wall Street, il a bien le droit de le « penser », et les investisseurs ont le droit de l’interpréter différemment, ce qu’ils font depuis octobre 2022.
Vers de nouveaux records
Le fait est que, en matière monétaire, nécessité fait loi.
La preuve la plus récente est que la Fed a changé en quelques heures (mi-mars) les règles de garantie des avoirs déposés dans les banques régionales. Elle a également injecté dans l’urgence 360 Mds$ alors qu’elle était en plein cycle de resserrement monétaire, redonnant ainsi un coup de fouet aux indices boursiers durant plusieurs semaines… et même plusieurs mois puisque les actions américaines vont aligner un cinquième mois de hausse consécutif.
Le Dow Jones ainsi pu aligner sa 13ème séance de hausse consécutive (+0,23%) pour la première fois depuis la période du 5 au 20 janvier 1987.
C’est la troisième fois qu’une série de hausses de cette longueur se matérialise depuis 1897 (donc en 126 ans). Autrement dit, cela ne se produit qu’une fois par siècle. Par ailleurs, les deux fois précédentes, c’était sur fond de conditions de taux et de perspective de croissance optimales. C’est exactement l’inverse cette fois-ci.
Le Dow Jones aurait pu être accompagné par le S&P 500, qui était repassé dans le vert dès 20h35 et a tenu au-dessus des 4 566 points jusque vers 21h30. Mais l’indice termine in extremis en repli de 0,02%, plombé par les utilities (des valeurs défensives) mais aussi et surtout par Microsoft, qui perd 3,8%.
Même si l’argument sera jugé spécieux, sans Microsoft, le S&P 500 aurait terminé sur une douzième hausse sur une série de 13 séances.
Le « fait accompli » de la Fed a également joué à plein sur le Forex. Le dollar a fini sur un repli de 0,15% vers 1,1078 €, c’est-à-dire exactement sur les niveaux affichés dans la matinée, et à 0,2% près de ceux des 2 et 3 mai dernier, date de l’avant-dernière réunion de la Fed (celle qui avait remonté les taux de 0,5 point).
Et l’immobilier remonte
Si les cambistes étaient à la buvette durant le discours de Powell, ils avaient manifestement aqua-poney quatre heures plus tôt lors de la publication du seul « chiffre du jour ». Le département du Commerce des Etats-Unis a en effet dévoilé un recul de 2,5% des ventes de logements neufs au mois de juin, soit un volume de transaction légèrement inférieur à 700 000 en rythme annualisé.
Le mois précédent, les ventes avaient bondi de 6,6%… mais soulignons que l’estimation initiale était de 12,2% (le département du Commerce avait dû appuyer un peu fort sur les touches de sa calculette !).
Les ventes restent cependant en hausse de 4% sur deux mois et, d’autre part, le prix moyen des maisons progresse pour le cinquième mois consécutif. Partant de 297 000 $ en janvier, il ressort à 312 000$ en juin, très proche des 316 000 $ affichés il y a un an.
La résilience des ventes dans un contexte d’effondrement des dossiers de crédit hypothécaires (-25% depuis un an, et -30% pour le refinancement) traduit une demande soutenue des investisseurs solvables en recherche de diversification de leurs actifs.
Nous ne pouvons pas nous empêcher de trouver assez singulière cette série de cinq mois de hausse des prix immobiliers, de cinq mois du prix des actions et de bientôt trois semaines du Dow Jones… comme si les investisseurs un peu fortunés s’efforçaient de convertir coûte que coûte leur épargne liquide en autre chose que des inscriptions numériques sur leur compte en banque.