▪ Le fixing londonien de l’or est-il truqué ? En la matière, quiconque se montre un peu attentif sait que ce n’est pas la bonne question. Les régulateurs du marché américains des produits dérivés (CFTC) pensent pourtant que ce pourrait être le cas.
Maintenant, le CFTC est sans aucun doute dans son droit de remettre en question l’utilisation de certains prix comme points de référence (marks, ou cotations) dans les transactions américaines. Lors de la Table ronde internationale sur les benchmarks financiers (International Roundtable on Financial Benchmarks) qui s’est déroulée début mars 2013, son commissaire Bart Chilton a affirmé que selon lui, beaucoup d’autres marchés mériteraient qu’on se penche sur leur cas. Ceci dit, nous avons du mal à imaginer ce qu’une commission à Washington contrôlant les marchées des futures américains pourrait accomplir — ou espérer accomplir — en remettant en cause le processus du fixing de Londres.
▪ A quoi sert-il, ce fameux fixing ?
Le fixing existe car, sur le marché des métaux précieux physiques, il n’y a pas de prix unique à un instant donné. Au lieu de cela, les différentes banques de métaux précieux et les négociants donnent leurs propres prix directement à leurs clients. Les transactions qu’ils passent sont donc uniques, sans chambre de compensation centralisée ou bourse reconnue rapportant ces transactions comme une sorte de cours officiel.
C’est très différent d’un marché boursier formel ou d’une bourse de produits dérivés. Cela rend l’évaluation de l’or (dans les coffres des banques centrales, par exemple, ou les stocks des joailliers) difficile. Cela veut aussi dire que des traders moins actifs, comme les compagnies minières aurifères ou les utilisateurs industriels, ne peuvent être sûrs qu’ils ont eu le prix « réel » du marché.
D’où le fixing… et d’où son nom. Le fixing est essentiellement une capture du cours, que l’on « fixe » ainsi à un instant précis : à 10h30 ou à 15h00 (heure britannique) pour l’or, et à midi pour l’argent-métal — et cela à Londres, où se trouve le coeur mondial du négoce des métaux précieux physiques.
▪ Comment fixer le fixing ?
Pour prendre cet instantané, les plus grosses banques de métaux précieux regardent les ordres des clients en cours, équilibrent les acheteurs et les vendeurs et se réunissent pour convenir d’un prix qui permette de liquider ce qui reste. Ne vous y trompez pas : le fixing n’est pas un prix notionnel.
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La vraie offre et la vraie demande de vrais vendeurs et acheteurs créent le fixing — et c’est à ce prix que se font les échanges. Cela fait du fixing quelque chose de très différent du taux d’emprunt interbancaire qu’est le Libor.
Le Libor, rappelez-vous, est simplement rapporté par les grandes banques. Il ne correspond pas nécessairement aux taux d’intérêt payé à ou par quiconque. Cela ouvre donc la porte aux fraudes et aux manipulations : quatre ou cinq ans après que les régulateurs se sont aperçus du scandale, cela a conduit à de lourdes amendes pour les coupables.
▪ Pourquoi le fixing ?
Le fixing des métaux précieux de Londres permet, à l’inverse du Libor, une formation authentique des cours. Non, il n’est pas formellement réglementé par le gouvernement (horreur !). Oui, il est déterminé derrière des portes closes (mon Dieu !). Mais les clients des banques peuvent placer des ordres d’achat (ou de vente) au cours du fixing si c’est en-dessous (ou au-dessus) d’un certain niveau, et ils peuvent être informés tout au long du processus aussi.
Le fixing suit également — et mène ensuite — le cours spot coté dans le négoce de gros en direct. Mais un cours spot unique n’existe pas. Le fixing existe pour combler ce manque. Utilisé depuis 1919 (et probablement avant), le fixing a pendant près d’un siècle agi comme point de référence mondial quand aucun n’existait avant.
Achetez de l’or en gros pour une livraison à Hong Kong, et l’on vous facturera le cours de Londres plus (ou moins) une prime de livraison. Demandez à une banque centrale la valeur de ses réserves d’or ou à un dépositaire la valeur de ses dépôts : ils feront tous référence au fixing de l’or de l’après-midi dans leur réponse. Vendez à une compagnie minière aurifère un contrat forward de long terme pour qu’elle puisse se couvrir contre l’exposition aux cours d’aujourd’hui ou lever des capitaux afin de financer l’exploitation de demain : le fixing de l’or de l’après-midi à Londres, ou PM London Gold Fix, sera la référence évidente.
Comment ce point de référence parfait peut être obtenu ? A en juger par les commentaires du commissaire de la CFTC, le problème semble être qu’un « gouvernement, un quasi-gouvernement ou une entité appropriée bénévole devrait superviser » la façon dont sont déterminés les cours.
Le communisme est sans aucun doute très loin des intentions de Bart Chilton. Mais la Russie soviétique avait essayé pendant un moment. Et ça n’a pas fonctionné.
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Adrian Ash Les points de vue d’Adrian sur le marché de l’or sont régulièrement repris par le Financial Times et AFX Thomson. Il dirige actuellement le bureau de recherches de BullionVault, un des moyens les plus simples et les plus économiques au monde pour acheter et investir dans l’or physique. Après avoir été responsable éditorial de Fleet Street Publications — l’homologue britannique des Publications Agora — il a été correspondant au DailyReckoning à la City de Londres pendant quatre ans. Il intervient désormais régulièrement dans les publications de 321gold.com, FinancialSense, GoldSeek, Prudent Bear, SafeHaven et Whiskey & Gunpowder ainsi que sur plusieurs sites internet d’investissement. |