La complexité législative du marché locatif français, où les règles varient selon le type de location, peut porter à confusion.
En juillet 2024, Annaïg Le Meur, députée (Renaissance) du Finistère a remis à Gabriel Attal les propositions de réforme de la fiscalité locative qu’Elisabeth Borne lui avait commandées en novembre 2023. A sa lecture, le comique des années 1950-1960 Fernand Raynaud en aurait probablement conclu que « la location immobilière, ça eût payé » !
Dans son introduction, la députée rappelle le cadre de sa mission : étudier les évolutions possibles de la fiscalité locative, intégrant la prise en compte de la durée de la location, dans le but de :
- favoriser la location longue durée à titre de résidence principale ;
- simplifier la fiscalité locative en faisant des propositions amenant à la convergence des régimes fiscaux ;
- maintenir une offre locative privée à loyers abordables avec des critères sociaux et une meilleure performance énergétique.
Le parc locatif meublé a augmenté de 50% en dix ans
Dans un premier temps, Annaïg Le Meur se penche sur le marché du logement locatif français. Elle rappelle d’abord combien l’environnement législatif de la location immobilière est complexe. Le type de bail ou de contrat varie selon que le logement est loué à usage de résidence principale ou secondaire, selon que la location est de longue ou courte durée, selon qu’elle est nue ou meublée. Rappelons que la location est dite « meublée » si le logement inclut la mise à disposition de meubles, définis comme tous les éléments mobiliers indispensables à une occupation normale par le locataire. Dans le cas contraire, la location est considérée comme nue.
La dernière enquête nationale sur le logement, qui date de plus de dix ans, nous apprend que les logements meublés se situent davantage en zones urbaines et en zones tendues et sont majoritairement plus petits (33 m²) que les autres logements locatifs (66 m²). En réalité, il s’agit essentiellement de studios (60% contre 14% dans le parc privé nu), souvent occupés par des jeunes âgés de 20 à 30 ans (38% des locataires sont étudiants contre 7% en locatif nu). Logiquement, la durée de la présence dans les logements est relativement courte : 42% des locataires de logements meublés occupent leur logement depuis moins d’un an (contre 24% pour les logements nus) et 78% depuis moins de quatre ans (57% pour les logements nus).
En fait, les logements meublés constituent une solution plus temporaire que pérenne, notamment pour les jeunes ou les personnes faisant face à une situation nouvelle comme une séparation ou une mobilité professionnelle.
La députée Le Meur met en évidence le fait que le parc actuel de logement meublés a augmenté de 50% depuis 2013, date de la dernière enquête nationale sur le logement. Un rapport IGF/IGEDD de 2016 notait déjà que « la part des logements meublés dans l’offre locative privée a plus que doublé en 30 ans ». Selon les données de l’Insee, entre 1982 et 2020, la proportion de logements meublés dans l’offre locative privée a été multipliée par quatre. On estime ainsi qu’aujourd’hui, la proportion de meublés pourrait atteindre, entre 16% et 19% du parc locatif. Elle était de 13,2% en 2020 et de 3,6% en 1982.
Si l’on observe non plus le stock de logements mais le flux d’annonces publiées sur les principaux sites web, on constate que le nombre d’annonces pour des logements meublés a augmenté de 70% entre 2018 et 2021, alors que celui pour des logements nus diminuait de 8%. Sur la même période de trois ans, la proportion d’annonces pour des logements meublés est donc passée de 36% à 50% !
Dans les grandes agglomérations, la part des logements meublés est encore plus importante. A Paris, par exemple, elle était de 26,7% en 2020 (dernières données disponibles) contre 18,2% en 2012 et 5,2% en 1990 – soit une augmentation par cinq en 30 ans. En 2024, elle pourrait avoir atteint 30%.
La location meublée rapporte plus que la location nue
La location meublée classique, destinée à servir de résidence principale pour le locataire, offre de meilleurs rendements que la location nue. « Les loyers des logements meublés sont supérieurs de 10% à 20% à ceux des logements semblables loués nus », écrit Annaïg Le Meur.
Le surcoût est justifié, « pour le propriétaire, par les dépenses d’ameublement ainsi que la durée plus courte du bail, qui lui fait risquer un taux d’occupation plus faible (à cause des vacances plus nombreuses entre locataires) ». Pour le locataire, il est justifié « par la fourniture des biens d’ameublement, et l’économie (au moins d’une partie) d’un déménagement ». Mais tout cela ne suffit pas pour expliquer la majoration de loyer observée sur le marché de la location. L’augmentation de la demande pourrait-elle être en cause ?
Non, affirme la députée Le Meur, « la location en meublée est aujourd’hui davantage tirée par l’offre que par la demande ». Selon elle, les propriétaires se mettent au meublé car il présente plusieurs avantages comme un bail plus court, un revenu majoré, un encadrement des loyers également majoré (pouvant atteindre 12% à Paris). En fait, ce serait pour des raisons opérationnelles, économiques et/ou fiscales que l’offre de location meublée augmente aux dépens de la location nue.
Cela provoque un renchérissement de l’accès au logement, dans des zones souvent les plus chères au mètre carré, surtout pour les petites surfaces. Les étudiants et les jeunes actifs seraient les plus pénalisés par cette situation.
Nous aborderons dans notre prochain article le sujet des meublés de tourisme, qui alimentent encore plus la tension sur le marché locatif, et verrons quel type de location est le plus rentable pour le loueur.
1 commentaire
La députée Le Meur a t’elle étudié l’évolution des contraintes et des charges qui pèsent de plus en plus sur ces nantis de propriétaires bailleurs ?
Dans mon cas par exemple le montant total des taxes foncières plus la CFE représente 13,5% des loyers (hors provisions pour charges)!!
Enlevez les frais de gestion et d’entretien et la part d’impôts générée et vous comprendrez que la rentabilité n’est plus au rendez-vous
Reste le complément de retraite