Les embouteillages et carambolages se multiplient dans l’économie réelle. Dans le même temps, tous les feux sont au vert… pour les marchés actions.
Les humains ou Dieu : qui est responsable ?
Dieu plaidera lui-même sa cause – demain.
Aujourd’hui, nous poursuivons notre procès contre les humains, entamé hier.
C’est classique, n’est-ce pas ? Un groupe d’individus connait la réussite. Il accroît sa richesse et son pouvoir. La richesse le « ramollit »… le pouvoir le corrompt.
Ensuite, son élite commence à diriger tout le système, juste pour que la partie continue, histoire de préserver sa richesse et son pouvoir.
L’élite contrôle « les feux de circulation », dont le rôle n’est pas de dire aux autres où aller, mais simplement de faire en sorte qu’ils y aillent facilement.
Rappelez-vous ce qu’il faut, pour créer une économie juste et prospère : de l’argent honnête (que personne ne peut trafiquer)… des juges honnêtes (qui protègent la liberté et les droits de propriété)… et des prix honnêtes (fixés par les acheteurs et les vendeurs et non par le gouvernement).
C’est-à-dire des signaux qui doivent être neutres et vrais, à l’image des feux de circulation qui ne doivent favoriser ni un groupe particulier… ni une cause particulière… Mais aider tout le monde à rentrer chez soi en toute sécurité.
Un calcul simple
Cependant, l’élite US a détraqué les feux de circulation à son avantage. Comme nous l’avons indiqué hier, les 10% les plus riches détiennent à présent presque toutes les entreprises US, soit 89% du marché actions.
Alors quand les cours grimpent… sur 10 $ de plus, près de 9 $ vont dans leur poche.
Faisons un calcul simple…
Si vous achetez un bon du Trésor offrant un rendement de 10%, c’est un peu comme si vous achetiez une entreprise tout entière qui afficherait un ratio cours/bénéfice (PER) de 10. Dans les deux cas, vous vous attendriez à récupérer votre investissement dans 10 ans.
En revanche, si l’Etat fait baisser le rendement de cette obligation à 1%, il vous faudra dix fois plus de temps pour récupérer votre argent, soit 100 ans.
Qui a envie d’attendre 100 ans ? Et qui sait ce que vaudra le dollar dans un siècle ?
Voilà pourquoi les grands investisseurs empruntent à taux bas et se précipitent sur des actifs plus prometteurs : les actions, cryptomonnaies, et même les NFT.
Voilà pourquoi le PER de l’indice S&P 500 est le double de sa moyenne sur le long terme.
C’est ainsi que l’élite s’est enrichie bien plus que quiconque.
Des signaux détraqués
Alors, comment faire grimper les cours des actions ? En sabotant les feux de circulation.
La manière la plus simple consiste à faire baisser les rendements des bons du Trésor US… ce à quoi s’emploie activement la Réserve fédérale depuis ces 12 dernières années.
Tout le monde sait qu’il est idiot de truquer le marché obligataire. La manipulation des cours a toujours été désastreuse, que ce soit à l’initiative de l’empereur Dioclétien, au IIIe siècle, avec son Edit du Maximum, ou de Richard Nixon, en 1971, avec son gel des salaires et des prix.
En général, il vous faut le prétexte d’une « urgence ». En 2008, c’est l’effondrement de la bulle des prêts hypothécaires qui en a tenu lieu.
Les T-Bonds US à 10 ans affichaient un rendement d’environ 4%. La Fed les a fait dégringoler : le rendement de ces obligations n’a plus dépassé les 4% – pourtant, dans le même temps, l’inflation atteignait 5% cette année.
Par ailleurs, alors même que l’urgence était passée, que le marché actions était reparti en fanfare, et que l’économie « était plus florissante que jamais », selon Donald Trump, la Fed a continué à maintenir un faible rendement (il est actuellement de 1,65%).
Des actifs qui se sont emballés
Mais aujourd’hui, les décideurs sont motivés par l’avidité et l’intérêt personnel, et non par l’intérêt général.
Cette faiblesse absurde des rendements obligataires – à l’image de feux de circulation détraqués – a propulsé les cours des actifs en territoire démentiel. L’indice Dow Jones Industrial Average a progressé de 450% depuis ses plus bas de 2009.
Et, comme nous l’avons montré hier, Nancy Pelosi – la présidente de la Chambre des représentants – a gagné 74 M$ depuis 2004. Quant au leader de l’opposition au Sénat, Mitch McConnell, il a gagné 31 M$ dans le même temps.
Globalement, le marché actions s’est apprécié de 40 000 Mds$ depuis son plus bas de 2009 (si l’on se base sur l’indice Wiltshire 5000, qui suit la performance de l’ensemble des actions activement négociées aux Etats-Unis)… alors que l’économie a à peine progressé.
Comme, sur ces 10 $ de plus, 9 sont allés dans les poches des 10% les plus riches, au sein de l’élite, celle-ci s’est enrichie d’environ 36 000 Mds$ rien qu’avec cette manipulation de marché.
Pendant ce temps, les crypto-monnaies sont devenues folles… de même que les NFT… et les meme stocks… et les spéculateurs sérieux se sont retrouvés sur la paille en attendant une correction.
L’embouteillage dans l’économie réelle
Les feux de circulation détraqués n’ont pas fait qu’enrichir encore plus les riches. Ils ont également semé le chaos dans toutes les directions, provoquant des embouteillages dans des secteurs clés, et d’énormes carambolages dans d’autres.
Le gouvernement des Etats-Unis devait 10 000 Mds$ en septembre 2008. A présent – à peine 13 ans plus tard – la dette s’élève à 28 000 Mds$.
La dette des entreprises US a bondi, elle aussi, bien au-delà de ses niveaux traditionnels, et s’élève à 11 000 Mds$, soit près du double de ce qu’elle affichait en 2008.
Les entreprises n’ont pas emprunté pour réaliser de nouveaux investissements qui produiraient plus de biens et services, mais pour racheter leurs propres actions, et verser d’énormes bonus à leurs dirigeants. Voire pour spéculer – comme MicroStrategy – sur le bitcoin.
Dans un contexte où les entreprises ne gagnaient plus d’argent en travaillant dur en vue de produire de précieux biens et services, mais en jouant au casino avec une dette bon marché, la production réelle a chuté.
Après 2008, les activités manufacturières ont chuté et ne se sont jamais remises. Même en termes nominaux, la production manufacturière est plus faible aujourd’hui qu’il y a 13 ans.
Un point de non-retour
Désormais, c’est « l’inflation ou la mort ».
La Fed soutient l’inflation en achetant des obligations. Ces rachats d’obligations maintiennent des taux bas. Avec une dette totalisant 85 000 Mds$, chaque augmentation de 1% des taux d’intérêt réels coûte au pays 850 Mds$, pour honorer le service de sa dette. Une augmentation de 5% (un retour à des taux d’intérêt normaux) coûterait 4 200 Mds$.
Si l’Etat cesse d’imprimer de l’argent frais et laisse les rendements des bons du Trésor et les taux d’intérêt revenir à la normal, toute cette arnaque explosera en quelques secondes.
Pourtant, « l’inflation » finit par être fatale également.
En effet, à mesure que la dette s’accroît, il faut de plus en plus de dettes pour avoir le moindre effet.
Lorsque la dette totalisait 25 000 Mds$, environ – comme c’était le cas en 2000 – on pouvait stimuler l’économie en imprimant 1 000 Mds$ d’argent frais. A présent, avec une dette totalisant 85 000 Mds$, on remarquerait à peine ces 1 000 Mds$.
Voilà pourquoi le gouvernement Biden a proposé 3 500 Mds$ de dépenses supplémentaires. Il faut de gros chiffres – et de grands déficits – pour que la fête continue.
Le Congrès a rechigné. Mais attendez un peu qu’une nouvelle « urgence » se manifeste, pour voir.