Plutôt que de petites forteresses dispersées au gouvernement limité nous voyons émerger un gros pouvoir central s’appuyant sur la technologie.
Dans nos quartiers d’été, le calme règne. Nos 13 (petits-) neveux et nièces sont tous partis hier. Nous avons rangé le jeu de croquet… rassemblé les livres pour enfants… et mis en route le lave-vaisselle.
Puis nous nous sommes assis dans la douce campagne française… nous sommes servi un verre de rosé bien frais… et avons invité les dieux. Pour nous tenir compagnie, effondré dans l’herbe à côté de notre chaise longue tel un Gaulois mort à Alésia, se trouvait un exemplaire de Derniers Jours, la fin de l’empire romain d’Occident, de Michel De Jaeghere
Ce qui suit n’est ni prédiction ni analyse. Nous ne relions même pas les points visibles…
… Au lieu de cela, nous subissons des terreurs cauchemardesques en plein jour. Inspiré par l’effrayante histoire du Vème siècle… et nourri par les inquiétantes nouvelles provenant de Chine et de la Silicon Valley… nous ressentons l’attraction d’une sorte de « matière sombre » du XXIème siècle… une force gravitationnelle sans Terre visible… un tour joué par les dieux pendant que le soleil de l’après-midi s’est endormi sur son transat.
La guerre cachée des parasites
Vous vous rappellerez qu’il se déroule toujours une guerre cachée. D’un côté se trouvent les gens honnêtes qui tentent de faire leur chemin dans la vie… en passant des accords gagnant-gagnant les uns avec les autres. Ce sont les gens qui viennent augmenter la richesse mondiale, qui disent « s’il vous plaît » et « merci », et qui rendent le monde meilleur – en essayant d’améliorer leur propre existence.
Adam Smith l’a décrit il y a plus de 300 ans. Ce n’est pas son amour de l’humanité qui pousse le boulanger à se lever à 4h du matin pour allumer son four. Il cuit son pain pour de l’argent… et nourrit ainsi ses voisins. Comme guidé par une « main invisible », il essaie de faire le bien… et ils en bénéficient.
De l’autre côté se trouvent les escrocs, les canailles… et les crétins – des parasites qui essaient de profiter sans faire le bien. Ils récoltent là où un autre a semé… ils engrangent les profits là où un autre a pris les risques… ils profitent du capital qu’un autre a épargné.
Certains d’entre eux passent leurs accords gagnant-perdant hors du domaine de la loi : des bandits et des faussaires. Mais la plus grande partie utilise la loi elle-même – les compères, l’appareil administratif et régulateur du gouvernement – pour obtenir ce qu’ils veulent.
Le pouvoir est centralisé… puis dispersé… puis recentralisé. L’équilibre du pouvoir change.
Généralement, les partisans du gagnant-perdant (les politiciens, compères, voleurs et comploteurs) gagnent du terrain lorsque la situation est stable. Comme les parasites, c’est quand le cheval est immobile qu’ils peuvent le mieux s’accrocher. Puis ils en font trop. Progressivement vidée de son sang, la pauvre bête s’affaiblit. Ensuite, il faut habituellement une calamité – une guerre, une révolution, une épidémie ou une faillite – pour détacher les sangsues. Suite à quoi le pouvoir est à nouveau dispersé.
Certains pensent que l’équilibre du pouvoir entre les deux groupes dépend largement de la technologie. Lorsqu’il est facile d’attaquer et difficile de défendre, les agresseurs ont le dessus. Lorsque l’équilibre du pouvoir est inversé, la coopération et les accords gagnant-gagnant deviennent plus importantes.
Proche de chez nous se trouve un château médiéval. Ses murs sont encore en place… de même que ses douves. Pendant des siècles, il a fourni au seigneur et aux paysans locaux sous sa protection un refuge… une forteresse où ils pouvaient se mettre à l’abri.
Une « police d’assurance » médiévale
Cette partie de l’Aquitaine devait être une sorte de Mad Max moyenâgeux. La Pax Romana avait été détruite au Vème siècle. Il n’y avait rien pour la remplacer. A la place, les bagaudae – une anarchie chaotique et en constante évolution de féroces tribus germaniques, de bandes d’anciens esclaves, déserteurs, paysans affamés, mercenaires, barbares et coupe-jarrets – erraient dans les campagnes, se battant entre eux, cherchant désespérément à faire main basse sur tout ce qu’ils trouvaient.
Les murs offraient quelque protection. Un ennemi déterminé pouvait les mettre à bas… mais il fallait pour cela être préparé et organisé. Une armée ennemie pouvait en faire le siège, mais là encore, cela demandait une plus grande capacité d’attention que les canailles n’en avaient.
Généralement, les gens à l’abri derrière les murailles pouvaient adresser un bras d’honneur à leurs ennemis et attendre qu’ils s’en aillent. Leurs récoltes étaient peut-être volées, leurs champs détruits et leurs maisons brûlées… mais au moins étaient-ils en vie. Et le pouvoir restait partagé… entre des centaines ou des milliers de petites forteresses indépendantes protégées par leurs murs.
Le cauchemar de la centralisation
Les murailles perdirent leur utilité à mesure que les canons furent perfectionnés. Les rois carolingiens et capétiens purent étendre leur contrôle centralisé.
La technologie a également joué un grand rôle dans la Guerre de Sécession aux Etats-Unis. Le sud a gagné la plupart des batailles. Etait-ce parce que leurs soldats étaient bien mieux entraînés et leurs officiers bien plus intelligents ?
Peut-être. Plus probablement, c’était dû au fait qu’ils étaient engagés dans une guerre fondamentalement défensive et que la technologie était en leur faveur.
Les améliorations de l’artillerie au cours des 50 années précédentes avaient donné aux tireurs confédérés sudistes une portée de 228 mètres en moyenne ; un bon tireur pouvait tuer un homme à 700 mètres – et, armé d’un fusil anglais Whitworth, un tireur d’élite pouvait abattre sa cible à plus de 900 mètres.
Le moyen de gagner une guerre n’était donc pas d’attaquer, mais de se mettre à l’abri dans une tranchée ou derrière un mur de pierre, et de laisser l’ennemi commettre une erreur.
Il fallut du temps pour apprendre la leçon. De nombreuses erreurs furent commises. Durant la bataille devant le tribunal de Spotsylvania, en 1864, le général nordiste John Sedgwick trouva ses hommes abrités dans un fossé pour éviter les tirs ennemis.
« J’ai honte de vous », leur dit-il. « Ils ne pourraient pas atteindre un éléphant, à cette distance ».
Quelques secondes plus tard, Sedgwick tombait de sa selle, atteint par une balle sous l’oeil gauche.
« N’interrompez jamais un ennemi qui est en train de faire une erreur », a dit Napoléon.
Mais alors que de meilleurs fusils avaient donné aux défenseurs l’avantage sur le champ de bataille, ils ne suffirent pas à dépasser d’autres innovations technologiques. Dans le nord, les Yankees imitaient les usines anglaises. Une révolution industrielle était en train de commencer. Elle aiderait les Yankees à écraser les défenses du sud, permettant de consolider leur pouvoir durant les 150 années suivantes.
Le meilleur de la technologie cède la place au pire
Les avancées électroniques de la fin du XXème/début du XXIème siècle signifient-elles plus de liberté et moins de parasites ? Ou bien donneront-elles aux partisans du gagnant-perdant de nouveaux pouvoirs pour contrôler, manipuler et interférer ?
Le pouvoir sera-t-il centralisé… ou dispersé ?
Il y a 10 ans seulement, on aurait dit que les nouveaux médias électroniques oeuvreraient en faveur d’un gouvernement plus limité – avec les cryptomonnaies, AirBnB, Uber, PayPal et autres perturbateurs.
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A présent, avec la reconnaissance faciale, la localisation, le « crédit social » et ses notations, la société sans cash et le Big Data…
… Notre cauchemar en plein jour commence.
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A lire absolument sur ce sujet : » La science, la liberté, la paix » de Aldous Huxley