Par Isabelle Mouilleseaux (*)
Peut-être vous intéressez vous à la géopolitique du Proche/Moyen-Orient. Dans ce cas, vous avez certainement écouté comme moi le discours fondateur d’Obama. Remarquable.
Hier soir, Al Jazeera rapportait les propos d’Ahmad Yousuf, l’un des leaders du Hamas (aile modérée). "Le discours d’Obama me rappelle celui de Martin Luther King, ‘I have a dream‘", disait-il.
Même dans la bande de Gaza, les réactions étaient positives, mais nuancées : il faut passer des mots, porteurs d’espoir, aux actes.
La question israélo-palestinienne est le coeur du problème — mais pas l’unique problème ! Trouver la clé qui mènera à la solution apaisera toute la région.
Une région d’une complexité inouïe
Cette région est d’une complexité inouïe, où s’entremêlent et s’entrechoquent des problématiques interdépendantes et disparates. Une région difficile à appréhender aussi, car les informations que nous font remonter les médias sont parfois à prendre avec prudence. Car souvent partiales, ou incomplètes.
Sur le terrain, instrumentalisation, propagande, manipulation et hypocrisie sont de mise. Ces dernières années, les lignes n’ont pas vraiment bougé ; en revanche, les "forces en présence" sur le terrain évoluent de façon surprenante. Mais pas forcément dans le bon sens. Mieux vaut donc tenter de reprendre la main sur la région pour trouver des solutions.
D’où me vient mon intérêt pour cette région ?
Difficile à dire…
De Sciences Po sans doute, qui m’a initiée aux questions géopolitiques. De mon frère peut-être aussi, qui a vécu là-bas plusieurs années et qui m’a fait découvrir l’âme de cette région.
De mes années passées à l’Ecole du Louvre enfin, car la Mésopotamie n’est-elle pas le berceau de la civilisation ? Allez donc au Louvre vous promener dans les salles consacrées aux Sumériens et aux Assyriens. Comment ne pas être sensible à l’histoire d’Alexandre le Grand et de la Perse de Darius ? Comment ne pas tomber sous le charme de la Porte d’Ishtar et de la Voie des processions (musée Pergame / Berlin) construite par Nabuchodonosor, roi de Babylone ?
Mais nous nous éloignons des matières premières…
Puisque nous voilà transporté dans cette région, faisons un petit détour par l’Iran. Pour information, dans quelques jours s’y tiennent des "élections démocratiques". L’ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad devrait être reconduit dans ses fonctions, le modéré Mossavi ne se battant – malheureusement — pas à armes égales…
Sans transition… aucune
L’Iran est le quatrième producteur de brut au monde, le deuxième plus gros exportateur de brut de l’OPEP. Dans ses sous-sols : 125 milliards de barils, soit 9% des réserves mondiales connues. L’Iran, c’est aussi la deuxième plus grande réserve en gaz naturel qui soit. De quoi attiser les convoitises…
Forcément, la Chine est sur le coup !
La position de Total en Iran menacée par la Chine
Vous le savez peut-être, Total tente de mettre en place un projet avec les autorités iraniennes pour développer la phase 11 du gisement gazier géant de South Pars (au large des côtes iraniennes, non loin du Qatar), ainsi qu’un terminal de gaz naturel liquéfié.
Total, qui avait déjà signé un protocole d’accord avec la NIOC (National Iranian Oil Company), était pressenti pour décrocher le contrat. En 1997, la major avait déjà décroché le droit de développer les phases deux et trois de ce méga gisement pour lequel 14 phases de développement sont prévues.
Coup de théâtre…
Mais voilà que l’agence de presse officielle iranienne vient d’annoncer que le contrat a finalement été signé avec la China National Petroleum Corporation (CNPC est le premier producteur de pétrole chinois) pour un montant de 4,7 milliards de dollars… Des désaccords seraient apparus dans les négociations avec Total…
Christophe de Margerie aurait également jugé en avril dernier les conditions iraniennes "pas suffisamment attractives" pour développer le gisement. Le groupe national chinois ne s’est pas posé toutes ces questions. Sécurisation des matières avant toutes choses ! Telle est la devise chinoise.
Et surtout, la CNPC n’est pas soumise comme nos majors aux pressions occidentales pour cause d’embargo avec l’Iran.
Exit Total ?
Pas tout à fait. Il semblerait que Total ne soit pas totalement exclu du projet. Selon le directeur de la NIOC, Total pourrait poursuivre des discussions sur l’aval du projet… Maigre consolation. Car Total n’a pas "pour habitude d’entrer dans un projet majeur sans être un opérateur clé (…), ce qui implique une participation clé dans le projet", nous dit Jean-Jacques Mosconi, directeur "stratégie et intelligence économique" de Total.
Une carte de plus entre les mains chinoises. Inexorablement, la Chine avance ses pions un à un sur l’échiquier international des matières premières.
Cela dit, elle vient de se prendre une claque (la première !!) en Australie : Rio Tinto vient de rompre l’accord de recapitalisation qui avait été décidé avec le Chinois Chinalco qui devait monter à hauteur de 18% dans le capital de Rio. Politiquement, cela ne passait pas…
[NDLR : Qu’il s’agisse de pétrole, de gaz naturel ou de métaux, les choses bougent pour les matières premières ! Des opportunités spectaculaires apparaissent… à conditions de savoir les saisir — ne vous en privez pas : il suffit de continuer votre lecture…]
Meilleures salutations,
Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora
(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières & Devises (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.
L’Edito Matières Premières & Devises est bien plus qu’une chronique quotidienne. C’est un pôle d’activités centré sur les matières premières qui vous donne les moyens de suivre et de maîtriser ces marchés ! Vous pouvez recevoir gratuitement l’Edito Matières Premières & Devises en cliquant ici.