Les Bourses continuent de grimper dans un cycle de reprise éclair, si rapide qu’il est propice à l’emballement. Prudence, cependant : comme tous les feux de paille, il se consume vite…
L’optimisme est de rigueur chez les investisseurs boursiers. Les taux d’intérêt sont nuls, l’argent est surabondant, il se dirige vers les marchés financiers car c’est là que les choses se passent, c’est là que l’enrichissement est le plus facile et le plus rapide.
Les Bourses montent, l’euphorie entretient l’euphorie, les médias montrent les gagnants du gros lot chaque jour.
L’envie fait boule de neige ; le public, alléché vient sur les marchés… et tout cela fait que la mayonnaise prend, comme on dit.
La finance produit son discours et sa propre rationalisation.
Le discours optimiste crée une ambiance qui est propice à l’emballement. N’oubliez jamais, ce n’est pas le sentiment ou les critères ou les données qui produisent la Bourse ; non, c’est la Bourse qui produit le sentiment, les analyses, les commentaires, les avis, les conseils.
Nous sommes dans un monde où nous marchons sur la tête, ce sont les signes qui déclenchent les mouvements.
Des marchés qui surréagissent
C’est pour cela d’ailleurs que les responsables de la conduite des affaires se croient tout-puissants. Ils déclenchent des mouvements – mais hélas, ces mouvements sont de surface : ils sont produits par les effets de nouvelles, d’annonces et les stimulants, ils ne sont pas relayés par les fondamentaux.
Ces mouvements ne sont pas auto-entretenus, ils ne sont pas spontanés. Mais comme les stimulants sont colossaux et que les informations se transmettent vite, les marchés surréagissent, ils jouissent vite.
Donc les cycles sont brutaux, vifs, chauds comme braise mais éphémères – relisez notamment ce texte, écrit en décembre dernier.
La discussion commence d’ailleurs par une question évidente… S’agit-il même d’un « nouveau » cycle ?
Selon une brillante analyse de Morgan Stanley, oui : le Covid-19 a brusquement arrêté l’économie mondiale, tandis qu’une réponse politique agressive a entraîné une reprise rapide. Certains investisseurs affirment que les deux ont été si rapides que les conditions ne se sont jamais « réinitialisées » comme elles le font habituellement pendant les récessions.
Tous les cycles ont leurs spécificités.
Des similitudes avec d’autres grandes récessions
Les trois dernières récessions américaines ont été consécutives à :
1) la plus grande bulle boursière de l’Histoire ;
2) la plus grande crise financière depuis la Grande dépression ; et
3) une pandémie mondiale.
Si vous recherchez une récession « normale », bonne chance !
Etonnamment, aussi différentes que soient ces trois récessions, elles ont toutes été précédées de phénomènes similaires. Toutes les trois ont vu une courbe des taux inversée environ six mois avant leur démarrage. Toutes les trois ont suivi un cycle de hausse de la Fed et un indice CPI de base supérieur à 2,4%.
Enfin, toutes les trois ont été précédées par une confiance élevée des consommateurs, un faible taux de chômage et une diminution de l’extension du marché boursier (appelée breadth, en anglais, c’est-à-dire une sélectivité fortement accrue qui laisse beaucoup de titres délaissés).
Ce sont énormément de similitudes. Et cela conduit à la reprise.
Depuis le creux de l’activité en avril 2020, les stratégies d’investissement « normales » en début de cycle ont très bien fonctionné. Les taux de défaut des entreprises ont été similaires à ceux des autres récessions lorsqu’ils sont mesurés sur une base continue de deux ans. Si cela fonctionne comme un nouveau cycle et s’exprime comme un nouveau cycle, nous pensons que les investisseurs devraient le traiter comme un nouveau cycle.
Il y a cependant quelques précautions à prendre, comme nous le verrons demain.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]