▪ Ce pauvre Ben Bernanke est un phobique de la déflation. Il la voit partout — un peu comme le gamin dans le film Sixième Sens voyait des morts. Et Bernanke est tout aussi terrifié par une chute des prix des actions — et de son effet sur la confiance des consommateurs.
La chute des cours boursiers, c’est ainsi que certains appellent la déflation, ou la déflation du prix des actifs. Bernanke, gouverneur de la Réserve fédérale américaine, pense que la Fed a fait de la Dépression de 1929 une Grande Dépression en augmentant les taux d’intérêt trop tôt durant la reprise. Ce n’est pas une erreur qu’il refera ! Il ne permettra simplement pas aux actions de chuter.
Le récent discours du président de la Fed à la National Association for Business Economics a mis le feu aux prix des actions américaines. Tous les indices américains ont grimpé. Même l’or a repris de la vigueur.
Bernanke a déjà déclaré qu’il maintiendrait les taux américains bas jusqu’en 2014. Il a réaffirmé cette semaine cette volonté en disant : « de nouvelles améliorations significatives dans le taux de l’emploi exigeront probablement une expansion plus rapide de la production et de la demande de la part des consommateurs et des entreprises, un processus qui peut être soutenu par des politiques accommodantes continues ».
On vit dans un monde étrange. Le président de la Fed pense que les taux bas sont nécessaires pour générer plus de croissance économique. La croissance produira des emplois. Les emplois mèneront à des dépenses. C’est seulement à ce moment-là que les taux d’intérêts — le prix de l’argent de la Fed — pourront être augmentés.
▪ Politique malsaine et explosion de dettes
Dommage qu’il ne puisse pas comprendre que la politique de taux des Etats-Unis est malsaine. Dans la mesure où le reste de la planète s’adapte aux taux d’intérêt US, une politique monétaire américaine malsaine mène à une politique monétaire mondiale malsaine. Par « malsaine », nous entendons une politique qui maintient les taux à un niveau trop bas, mène à une inflation des prix des actifs et un boom géant de la dette.
Tout cela est bien connu de ceux qui suivent la Chronique Agora depuis longtemps. S’il y a une chose réconfortante avec la stupidité tenace de Bernanke, c’est qu’on a le temps d’affiner ses détentions boursières, dans un marché haussier. Il vaut bien mieux sortir du marché quand les actions flottent sur un océan de liquidités plutôt que quand elles s’effondrent.
Mais c’est bien le problème actuellement, n’est-ce pas ? Aussi effrayé que soit Bernanke par les années 30, lui et ses homologues du monde entier ont encore plus peur d’un nouveau Lehman Brothers. La leçon à tirer de l’affaire Lehman, c’est que les banquiers centraux ne laisseront tout simplement pas une autre institution financière majeure faire faillite. Ils ne peuvent pas se le permettre.
Le système financier est encore si endetté et si interconnecté (en grande partie par le biais du marchés des produits dérivés) que des injections régulières de crédit et la monétisation de la dette gouvernementale sont nécessaires pour le maintenir à un niveau constant. D’une certaine manière, la déflation qu’on attendrait normalement à la fin d’une bulle de crédit est en train de se produire en ce moment même — elle est simplement masquée par une croissance gigantesques des bilans des banques centrales.
▪ Les marchés sont-ils devenus un système de racket ?
En d’autres termes, les marchés boursiers sont devenus une gigantesque farce. Les indices ne communiquent pas d’informations utiles ou exactes. Les prix sont plus influencés par l’offre de crédit dans le système que par les bénéfices sous-jacents des entreprises cotées. L’ensemble ressemble furieusement à un système de racket conçu uniquement pour profiter aux banques, aux courtiers et aux bureaucrates qui les « régulent » en apparence.
Il est assez rafraîchissant de faire ce genre de déclaration, même si nous admettons que nous avons peut-être tort sur le sujet. C’est rafraîchissant parce qu’une fois qu’on a reconnu le fait que le jeu auquel on vous demande de jouer est truqué, on peut choisir de ne pas participer. Ce qui rend les décisions d’allocation d’actifs bien plus simples. Nous avons acheté de l’or physique ce matin, par exemple.
Tout le monde n’est pas d’accord avec le point de vue selon lequel ces rebonds périodiques sont d’excellentes opportunités de liquider des portions de votre portefeuille. Goldman Sachs a par exemple publié la semaine dernière un rapport défendant les actions. Ce rapport compte beaucoup de jargon et d’arguments compliqués. Mais l’idée générale est que les actions feront mieux que les obligations, surtout si la Fed maintient les taux au plus bas.
Les gens semblent oublier que les entreprises existent pour donner un cash flow à leurs propriétaires en fournissant des services à leurs clients. Au lieu d’une stratégie d’investissement dépendant de la politique monétaire de la Fed, pourquoi ne pas investir dans des entreprises qui augmentent leurs revenus sans utiliser l’effet de levier ? Voilà qui semble un bien meilleur pari à long terme.
Quoi qu’il en soit, la volonté de la Fed de continuer à injecter du crédit dans le système financier vous donne du temps — ou au moins l’illusion du temps. Le temps est un actif précieux. Si précieux qu’on ne peut ni l’acheter ni le vendre. On ne peut que le maximiser en l’utilisant à son meilleur avantage. Il faut vendre durant les rebonds.
[NDLR : Si les actions ne sont plus aussi intéressantes, où vous tourner pour faire fructifier votre argent… et surtout le protéger dans cette période difficile ? C’est précisément ce que nous verrons le 22 juin prochain, en compagnie de nombreux spécialistes de la gestion de patrimoine : ne manquez pas ce rendez-vous !]
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