La perspective d’une baisse des taux par la Fed réjouit les marchés, mais elle pourrait bien réveiller le spectre de l’inflation. Dans ce contexte, seules les actions à dividendes croissants offrent une protection durable pour préserver son pouvoir d’achat.
La semaine dernière, le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell, a laissé entendre que la Fed pourrait réduire ses taux d’intérêt au cours de l’année. La réaction des marchés ne s’est pas fait attendre : les indices ont aussitôt bondi, portés par l’espoir d’un environnement monétaire plus accommodant.
Mais derrière cet enthousiasme, un danger persiste. Les investisseurs ne doivent pas se laisser aveugler par l’effet d’annonce. Bien sûr, les valorisations actuelles sont déjà historiquement élevées, ce qui justifie à lui seul une certaine prudence. Mais le véritable risque se situe ailleurs : une baisse des taux pourrait relancer avec force la dynamique inflationniste.
Powell l’a d’ailleurs reconnu à demi-mot. La Fed doit arbitrer entre deux priorités contradictoires : d’un côté, soutenir un marché de l’emploi qui peine encore à retrouver un rythme robuste ; de l’autre, contenir une inflation qui repart à la hausse. Or abaisser le coût de l’argent dans ce contexte reviendrait à jeter de l’huile sur le feu.
Dès le mois de janvier, dans le numéro prévisionnel de ma newsletter The Oxford Income Letter, j’avais anticipé une flambée de l’inflation en 2025. Si la Fed met en oeuvre les baisses de taux évoquées, cette prévision pourrait devenir une quasi-certitude.
La question devient alors cruciale : comment protéger son patrimoine dans un contexte où la monnaie perd progressivement de sa valeur ? Les solutions ne sont pas nombreuses, surtout lorsqu’il s’agit d’investissements destinés à générer des revenus.
Prenons l’exemple des placements à revenus fixes.
A première vue, ils semblent offrir une certaine sécurité : un versement garanti, année après année. Mais cette stabilité est trompeuse dès lors que l’inflation s’invite dans l’équation. Imaginez que vous perceviez 1 000 $ par an en intérêts. Si les prix augmentent de 5 %, un bien ou un service qui coûtait 1 000 $ l’année précédente en coûte désormais 1 050 $. Votre revenu fixe de 1 000 $ reste inchangé, mais vous devez désormais débourser 50 $ de plus pour obtenir la même chose. C’est la mécanique implacable de l’érosion monétaire : votre pouvoir d’achat s’amenuise.
Face à ce constat, une stratégie s’impose : investir dans des sociétés qui versent des dividendes réguliers et, surtout, qui les augmentent année après année. Ces actions à dividendes croissants constituent l’un des rares remparts efficaces contre l’inflation.
Pourquoi ? Parce que leurs versements progressent avec le temps. Si le rythme d’augmentation des dividendes dépasse le taux d’inflation, l’investisseur ne se contente pas de préserver son pouvoir d’achat – il l’améliore.
Prenons quelques exemples concrets.
Civista Bancshares (NASDAQ : CIVB), une petite banque régionale basée dans l’Ohio et fondée en 1884, offre actuellement un rendement de 3,2 %. Mais surtout, elle a relevé son dividende chaque année depuis 2012, avec un taux de croissance annuel composé de plus de 13 %. Certes, sa dernière hausse (+6,3 %) a été moins spectaculaire, mais elle reste supérieure au niveau actuel de l’inflation, et donc favorable pour les actionnaires.
Autre cas emblématique : Chevron (NYSE : CVX). Ce géant de l’énergie verse aujourd’hui un rendement de 4,3 % et a augmenté son dividende sans interruption depuis 36 ans. La dernière revalorisation, de 5 %, excède, elle aussi, l’inflation en cours, garantissant aux investisseurs une progression réelle de leurs revenus.
Ces exemples ne sont pas isolés.
Sur une longue période, les entreprises qui augmentent régulièrement leurs dividendes affichent des performances nettement supérieures au marché. Au cours des 50 dernières années, elles ont battu l’indice S&P 500 pondéré de manière égale d’un facteur de 3,5. Comparées aux sociétés qui ne versent aucun dividende, l’écart est encore plus frappant : une surperformance de plus de 1 700 %.

Les entreprises versant des dividendes écrasent toutes les autres actions
A ces avantages s’ajoute une meilleure résilience en période de crise. L’indice S&P 500 Dividend Aristocrats – qui regroupe les entreprises ayant relevé leurs dividendes sans discontinuer depuis au moins 25 ans – se révèle environ 10 % moins volatil que le marché dans son ensemble. Lors des corrections, ces valeurs tendent donc à reculer moins que la moyenne, offrant un coussin de sécurité appréciable.
En résumé, l’équation est claire : les taux devraient baisser, mais l’inflation menace de repartir de plus belle. Les investisseurs qui souhaitent protéger et même accroître leur pouvoir d’achat ne peuvent se contenter de revenus fixes. Ils doivent privilégier les entreprises capables d’augmenter leurs dividendes année après année.
C’est là, aujourd’hui plus que jamais, la meilleure stratégie pour traverser un environnement où l’argent se déprécie.