J.C. Trichet juge la situation "sérieuse" et y consacre "toute son attention"… mais il reste confiant dans l’effet bénéfique des engagements pris par Athènes pour réduire ses déficits. Le patron de la BCE aurait rassuré Wall Street (mais pas les Européens) en affirmant qu’aucun défaut de paiement n’est à redouter — sous-entendu dans l’immédiat. Cependant, les économistes s’inquiètent du fardeau que ferait peser à terme une dette de 30 milliards d’euros coûtant 5% — ou plus — après l’appel au marché des deux prochains mois
Philippe Béchade

Philippe Béchade
Rédacteur en chef de « La Chronique Agora » et de « La Lettre des Affranchis », Philippe Béchade rédige depuis 2002 des chroniques macroéconomiques et boursières. Il est également l’auteur d’un essai, Fake News, qui fait office de manuel de réinformation sur les marchés financiers. Arbitragiste de formation, analyste technique, il fut en France dès 1986 l’un des tout premiers traders et formateur sur les marchés à terme. Intervenant régulier sur BFM Business depuis 1995, rédacteur et analyste contrarien, il s'efforce de promouvoir une analyse humaniste, impertinente et prospective de l’actualité économique et géopolitique.
-
-
La dégradation des T-Bonds n’a pas empêché Wall Street de poursuivre l’inscription quotidienne de nouveaux records annuels — aucune anticipation de tension durable sur les taux américains à l’horizon. Le bon accueil réservé à la dernière enchère de 21 milliards de dollars de bons du Trésor US à échéance 2020 a de quoi réjouir les investisseurs. Avec un rendement de 3,90% contre 3,65% lors de la dernière adjudication, les acheteurs se sont bousculés au portillon et l’émission a été sursouscrite 3,7 fois (contre trois fois fin mars). Conclusion, les liquidités demeurent abondantes et les institutionnels continuent de préférer détenir des T-Bonds US plutôt que des emprunts grecs. Athènes pourrait ne plus trouver preneur pour sa dette long terme… à moins d’offrir 7% si jamais elle devait annoncer une levée de fonds dans l’urgence. Depuis que des rumeurs d’amendement au plan de refinancement circulent dans les salles de marché, les investisseurs exigent une prime de 400 points par rapport aux Bunds
-
Wall Street s’efforçait d’aligner hier soir une troisième séance positive consécutive depuis le début du deuxième trimestre 2010 (le Nasdaq grappille +0,1%). Le CAC, qui affichait sa volonté de ne pas se laisser distancer par les indices américains (en hausse de 0,8% la veille), inscrivait sa meilleure clôture annuelle à 4 054 points à l’issue d’une séance irrégulière et très modérément active : 3,4 milliards d’euros échangés après quatre jours d’interruption, c’est tout bonnement dérisoire. Les principales places européennes terminaient sur un gain de 0,35%. Paris fait donc un petit peu mieux (+0,5%) que la moyenne des indices… Amsterdam dominait largement ses rivales de la zone Euronext avec une flambée de 1,2% (grâce à Arcelor-Mittal et ses 4% de hausse qui ont également dopé le CAC 40)
-
Wall Street poursuit sur sa lancée du 1er avril, avec l’avantage des statistiques immobilières. En effet, les statistiques de l’emploi publiées il y a quelques jours avaient été tout juste conformes aux anticipations : 162 000 créations de postes, dont 70 000 agents chargés du recensement quinquennal. Le chiffre des promesses de ventes de logements neufs aux Etats-Unis est donc tombé à pic vendredi, puisqu’il annonçait un rebond de 8,2% au mois de février, à un mois tout juste de l’expiration d’une importante prime fiscale consentie aux primo-accédants
-
Le Trésor irlandais — qui a créé en septembre 2009 une bad bank dénommé NAMA (National Asset Management Agency) — continue de racheter en masse des créances bancaires pourries. A 47% de leur valeur nominale pour le dernier "paquet" absorbé le 31 mars… c’est peut-être une belle remise, mais c’est un fardeau supplémentaire de cinq milliards d’euros pour le budget d’un pays qui pâtit d’une récession de -7,1%. La NAMA a racheté pour 90 milliards d’euros d’actifs toxiques à Anglo Irish Bank (12,7 milliards d’euros de pertes en 2009), Bank of Ireland, Allied Irish Banks
-
Epargne
Et si la Fed revoyait les règles du Monopoly au deuxième trimestre 2010 ?
par Philippe Béchade 1 avril 2010Une nouvelle illustration nous était fournie hier par la publication de l’enquête ADP sur les créations d’emplois dans le secteur privé en mars — un indicateur avancé de premier ordre à 48 heures des chiffres officiels du chômage américain. Le marché espérait un solde positif de +40 000… mais l’économie américaine aurait détruit encore 23 000 postes après -25 000 en janvier. L’horizon s’est encore assombri avec la parution de l’indice PMI de Chicago, qui chute de 62,6 vers 58,8 (contre une stabilité attendue). Est-il besoin de rappeler qu’un tel chiffre préfigure un déclin de l’activité au cours des trois prochains mois
-
En France, le PIB a reculé de 2,2% en 2009, soit la plus forte baisse depuis l’après-guerre. Les dépenses de consommation des ménages se sont maintenues : +0,8% après +0,9% en 2008, grâces en soit rendues à la "prime à la casse". Cependant, l’investissement a lourdement chuté : -7% après +0,4% l’année précédente… où tout s’était arrêté net à la fin de l’été, il y a déjà plus de 18 mois. Une reprise sans investissement, voilà bien un phénomène singulier mais qui ne dissuade pas le gouvernement de tabler sur 2,5% de croissance en 2011. François Baroin, nouvellement installé au ministère du Budget dans le fauteuil d’Eric Woerth, rappelle que le projet du gouvernement "vise justement à favoriser la reprise". Mais il enchaîne sur ce terrible aveu : "si la croissance faisait défaut, la France ne serait pas seule dans ce cas de figure"
-
Epargne
Quel genre de poisson d’avril les marchés nous concoctent-ils ?
par Philippe Béchade 30 mars 2010La seule surprise du jour fut en effet le puissant rebond du baril de pétrole (+2,5% à 82,1 $). Ni l’actualité macro-économique, ni le léger tassement du dollar face à l’euro (-0,5%) n’expliquaient un décalage de cours aussi brutal. Si la thématique des matières premières et de l’énergie pouvait être envisagée, cette piste est invalidée par la stagnation de l’or (+0,2%), de l’argent et du platine (-0,1%) ainsi que de l’uranium. Le cuivre en revanche prenait 3% à 3,5 $ l’once : quelqu’un aurait-il décidé lundi de stocker une courte sélection de produits de base industriels… et dans quel but ? Mystère
-
Le véritable état de l’économie réelle, c’est bien le dernier sujet dont les marchés ont envie de se soucier. Le diagnostic de Ben Bernanke devrait pourtant leur donner à réfléchir : le président de la Fed ne cesse de répéter que la reprise est poussive — mais d’où sort donc cette hausse de 5,6% du PIB américain, chiffre révisé de 5,9% estimé précédemment ? Il affirme aussi que l’emploi se stabilise (la durée moyenne du chômage s’allonge, le temps de travail s’amenuise, la masse salariale se contracte)… Pourtant, les marché continuent de faire comme si le rebond économique suivait le modèle des sorties de récession de 1993 et 2003
-
Epargne
La tragédie grecque n’a pas fini de faire rire les Chinois
par Philippe Béchade 26 mars 2010Le marché a des sujets d’inquiétude immédiats, qui doivent beaucoup faire sourire du côté de la Chine, qui a toujours pris l’Europe pour un nain politique. Jean-Claude Trichet a ouvertement critiqué le possible recours à l’intervention du FMI prôné par l’Allemagne dans le cadre d’un accord de refinancement de la dette grecque — un problème qui devrait se résoudre au sein du périmètre de l’Eurozone, laquelle ne devrait pas fuir ses responsabilités
-
Des instituteurs et des infirmières se font licencier à Phoenix ; le prix des maisons s’effondre dans la banlieue de Détroit… Peu importe : notre trader achète à tour de bras des titres de constructeurs de maisons individuelles car il vient de lire une étude qui affirme que les cours sont historiquement bas et que les cash flow redeviennent positifs. Tant pis si le chiffre d’affaires soit encore de 66% inférieur à ce qu’il était au milieu de l’été 2006… Il ne se laissera pas d’avantage troubler par une bête statistique publiée ce mercredi et qui fait état d’une nouvelle chute (-2,2%) des ventes de logements neufs aux Etats-Unis (308 000 transactions annuelles contre 315 000 en janvier. Elles atteignent leur plus bas niveau depuis janvier 1963 (avant cette date, il n’y a plus aucune donnée disponible)
-
Aujourd’hui, Goldman Sachs (GS) fait littéralement figure d’ultra-lucide. Personne n’ose plus se mettre en face : GS pèse en effet 50% des échanges quotidiens sur la plupart des dérivés d’actions, et s’est depuis un an assuré de la totale maîtrise des marchés à terme sur lesquels il intervient. En ce 24 mars, les analystes techniques écarquillent les yeux devant l’un des plus spectaculaires exemples de tendance en ligne (hausse continue, gérée par des logiciels qui régulent le mouvement) jamais observés depuis plus d’un siècle sur un indice américain. Nous attirons particulièrement votre attention sur le parcours du Nasdaq 100 depuis le 23 février dernier
-
Epargne
Règlements de compte dans les vestiaires de l'équipe Euroland : drôle de drachme !
par Philippe Béchade 23 mars 2010Qui n’a pas voulu voir que la Grèce ne respectait pas dès l’origine les critères de Maastricht ? Qui s’est satisfait de comptes nationaux grossièrement maquillés dans l’urgence par Athènes pour rendre le pays éligible à l’Eurozone dès 2001? La Commission de Bruxelles, la BCE, le Parlement européen… tous n’y ont vu que du feu. A moins qu’ils n’aient trouvé agréable la chaleur et la lumière provenant du flambeau grec — même si celui-ci devait se consumer en moins de temps qu’il n’en faut pour abaisser le drapeau olympique lors de la cérémonie de clôture des Jeux
-
Epargne
Quelques questions que le marché n’a pas envie de se poser
par Philippe Béchade 22 mars 2010L’Europe qui se déchire sur la question grecque, ce n’est qu’une preuve de plus de notre impuissance politique chronique… La Chine qui menace les Etats-Unis de représailles commerciales si l’accusation de manipulation de la parité yuan/dollar était maintenue, ce n’est qu’un nouvel épisode du jeu d’intimidation récurrent auquel les deux partenaires se livrent depuis le début du XXIe siècle. Les opérateurs ne voient donc rien se profiler à l’horizon qui mériterait de ressentir un stress et l’indice VIX continue de flirter avec ses planchers de novembre 2007
-
Epargne
L'Allemagne a-t-elle tout compris à un concept grec nommé… la démocratie ?
par Philippe Béchade 19 mars 2010Angela Merkel oublie-t-elle que l’Europe toute entière a dû se serrer la ceinture pendant les cinq premières années de la réunification allemande, au nom du grand dessein qu’était la création d’une monnaie unique ? Nous voulons bien admettre que la Grèce était hors circuit à l’époque et que la politique monétaire de Francfort ne lui causa pas grand tort. Athènes avait au contraire toutes les raisons de se réjouir d’un deutschemark fort puisque l’une de ses principales recettes de l’époque provenait justement de l’afflux massif de touristes allemands friands de lieux de vacances paradisiaques et pas chers implantés sur les plus belles îles de la Grande Bleue
-
Epargne
Pendant que les Européens s'étripent en coulisses, les cours grimpent
par Philippe Béchade 18 mars 2010L’Allemagne s’est copieusement enrichie en vendant aux manufacturiers chinois les machines avec lesquelles ils ruinent l’industrie européenne et nord-américaine. Des pans entiers du tissu artisanal des pays du sud de l’Europe sont partis en lambeaux. Des centaines de milliers d’emplois ont émigré vers la Chine et ne reviendront pas. Tout ce savoir-faire qui n’a plus de débouchés n’est remplacé par rien, si ce n’est par des reproches de mauvaise gestion de la part de l’Allemagne
-
Epargne
La Fed confirme qu'elle va continuer de raser gratis très longtemps
par Philippe Béchade 17 mars 2010Le marché n’envisage pas que l’embellie boursière des 12 derniers mois ne constitue que l’oeil du cyclone. Il fait grand soleil, tout le monde est heureux — enfin… tous ceux qui ont comme seule préoccupation de regarder leurs actions grimper — et les médias annoncent que le ciel devrait rester bleu au-dessus de Wall Street, même si Manhattan enchaîne tempêtes de neige et pluies diluviennes. Ils se basent sur le bulletin météo de la Fed, qui confirme ce mardi le maintien de "taux très bas, très longtemps". Le contenu du communiqué final était déjà connu de longue date et pratiquement à la virgule près par les initiés. La seule minuscule inflexion sémantique concerne l’emploi qui se stabilise au lieu de demeurer anémique : une toute petite retouche en milieu de page et le texte de début février est de nouveau bon pour le service
-
Epargne
Ah, si seulement les gouvernements vendaient eux aussi de la valeur temps !
par Philippe Béchade 16 mars 2010J’ai assisté mercredi dernier à un déjeuner dont l’invité d’honneur était Eric Woerth. Je n’ai pas pu laisser passer l’occasion de l’interroger sur les mesures gouvernementales visant à rassurer les agences de notation. Vous connaissez pourtant tout le bien que je pense de ces dernières et mon malaise à la seule évocation de l’obligation de jouer les bons élèves à leurs yeux… un comble lorsque l’on dresse la liste de leurs erreurs de l’époque Enron, Worldcom ou Vivendi puis vis-à-vis des subprime et autres MBS de 2005 à 2007