** Il est peut-être encore un peu tôt pour enterrer les espoirs de voir le CAC 40 retracer les 6 000 points — et le Dow Jones les 14 000 points — mais l’année 2008 ne démarre pas sous les meilleurs auspices. Le CAC 40 (-3,2% en quatre séances) réalise sa plus mauvaise entame d’année boursière depuis 2001 — après les -7% de la première semaine de l’an 2000. Seuls cinq titres ont pu terminer en territoire positif et il s’agit de cinq valeurs défensives : Gaz de France prend 3,4%, Suez 2,4%, Air Liquide 1,55%, Total 0,65% et EDF 0,4%.
Le trou d’air survenu vendredi 4 janvier à partir de 14h30 — avec un écart de -2,8% en moins de deux heures — est consécutif à la divulgation des mauvais chiffres américains de l’emploi au mois de décembre. Le taux de chômage a bondi de 0,3% à 5% tandis que les créations d’emplois ressortent à 18 000 au lieu des 70 000 anticipées.
Le détail des chiffres révèle le poids de l’impact de la crise de l’immobilier sur le marché du travail en décembre. La construction accuse 49 000 destructions d’emplois, l’industrie en a détruit 31 000 et le commerce de détail 24 000, malgré le rush des fêtes de fin d’année.
Pour couronner le tout, les salaires enregistrent une progression de 0,4% ce qui est jugé trop élevé ! Le scénario qui se dessine aux Etats-Unis s’apparente clairement à de la « stagflation » puisque la dérive des prix à la production (3,2%) puis à la consommation (4,3%) se double de la menace d’un brusque ralentissement économique au premier trimestre 2008, sous les 2%.
Une anticipation renforcée par le recul de l’ISM des services au mois de décembre. L’indice d’activité de l’Institute of Supply Management pour le secteur tertiaire est ressorti à 53,9 contre 54,1 en novembre.
Ce n’est pas spécialement alarmant, mais cela s’ajoute à la chute de trois points de l’ISM manufacturier (à 47,1 sous le seuil technique de croissance des 50). Ces deux chiffres combinés brossent un tableau bien sombre de la situation outre-Atlantique fin décembre.
En Europe, la chute du baromètre mensuel du secteur des services fut plus sévère encore puisque le PMI décrochait de 54,1 vers 53,1 en décembre, tandis que l’inflation continuait de culminer à 3,1% le score le plus élevé depuis cinq ans.
Alors que la Fed devrait réduire de 25 points à 50 points son taux directeur d’ici trois semaines, la BCE n’a guère d’autre alternative que d’hésiter entre le statu quo et un tour de vis monétaire mi-janvier. L’euro progresse logiquement vers 1,4785 $ et le dollar dévisse de 1% sous les 108,4 face au yen — soit -5% en cinq séances, ce que Tokyo a sanctionné par une chute de 4% pour sa première séance de l’année 2008.
** Paris aligne une cinquième séance de baisse consécutive dans des volumes voisins de huit milliards de dollars (6,8 milliards d’euros pour les 40 vedettes de la cote) ; les valeurs du SBF 80 affichaient -2,8% en clôture.
Le CAC 40 était fragilisé dès l’ouverture par la faiblesse du compartiment automobile qui enregistre aujourd’hui sa plus forte chute depuis l’automne 2002 (7% en moyenne sur Renault, Peugeot, Michelin) — alors que se dessine le spectre d’une année très difficile outre-Atlantique (les ventes de Nissan ont chuté de 2% fin 2007 aux Etats-Unis).
Les craintes de ralentissement de la croissance aux Etats-Unis n’épargnent pas le secteur automobile, mais les technologiques sont de loin les plus touchées : après trois heures et demi de cotations, le Nasdaq Composite s’effondrait de 3,3% dans le sillage d’Intel (-8,5%), Nvidia (-7%), Marvell (-6,5%) puis RIM, Amazon, Broadcom ou Sandisk (replis allant de 5% à 6%).
Le Dow Jones décrochait également de 1,75% (sous 12 850 points) et le S&P 500 de 2% à 1 420 points (soit -4% sur la semaine écoulée), pulvérisant tous les supports court terme.
Les autres places européennes n’ont pas été épargnées, le Dax accusant une baisse de 1,15% et le FTSE de 2,1%. L’Eurotop 100 (-1,67%) est passé sous la barre des 3 100 points (à 3 076 points).
Les grandes gagnantes de la semaine furent les mines d’or (dont nous sommes si friands) avec 9% sur Harmony en quatre séances (à 7,84 euros) puis Anglogold (8% à 31,5 euro), alors que l’once reste au contact de son zénith historique exprimé en dollar) à 364 $ l’once.
Petit rappel historique : pas une année boursière entamée par un repli de plus de 2% ne s’est soldée par une hausse des indices d’actions en Europe ou à Wall Street dans les 12 mois qui ont suivi depuis 1991… à méditer !
Philippe Béchade,
Paris