Un « arbre magique » produisant de l’argent ? Peut-être que le progrès et les nouvelles technologies ont rendu cela possible… ou peut-être pas.
Nous vous avons quitté hier en promettant de faire chauffer la tronçonneuse.
Nous explorons les bois, les collines et les jungles urbaines en quête du très recherché « arbre à argent magique ». Famille : arbor. Genre : pecunia. Espèce : magicae.
Pendant des milliers d’années, les alchimistes, les escrocs et les proto-banquiers centraux ont tenté de le trouver. Il est demeuré aussi insaisissable que le lézard des neiges himalayen ou le dahu des Alpes… mais il doit bien être quelque part. Tout le monde en est convaincu, y compris le président des Etats-Unis.
Ces derniers jours, l’arbre magique – alias TMM… ou Théorie monétaire moderne – est en pleine floraison. Les marchés grimpent un peu partout, suite aux nouvelles de « dernière ligne droite » pour l’accord commercial entre la Chine et les Etats-Unis, et battent record sur record.
Un mythe tenace
L’idée – qui nous est donnée par David Graeber, Elizabeth Warren, Thomas Piketty et toute une tripotée de fans de la MMT et d’hallucinés benêts – est que l’argent pousse réellement sur les arbres. Ce n’est qu’une question de volonté politique, disent-ils… et même de courage… que d’en profiter.
Donald Trump, par exemple, a fait preuve de ce genre de courage lorsqu’il a exigé une réduction d’impôts en décembre 2017. Selon The Fiscal Times, cette réduction pourrait alourdir la dette US de 24 500 Mds$ sur les 20 prochaines années.
D’où viendra l’argent pour payer cela ? De l’arbre magique, bien entendu.
Même des économistes généralement sains d’esprit et sensés, comme notre ami Richard Duncan, pensent que le temps est venu pour les autorités d’exploiter l’argent gratuit (provenant de taux d’intérêt ultra-bas voire négatifs) afin de faire des merveilles.
Elles pourraient reconstruire les infrastructures américaines… offrir le wi-fi gratuit d’un bout du pays à l’autre… fournir l’éducation gratuite… et un revenu garanti.
Certains pensent même que c’est d’une importance vitale… voire qu’il serait immoral de ne pas le faire. Avec cet argent, disent-ils, nous pouvons corriger les injustices de ce monde… guérir ses maux… et laver ses péchés.
Pourquoi pas ? Pourquoi ne pas arrêter le changement climatique… si on peut le faire sans que cela coûte quoi que ce soit ? Pourquoi ne pas aider les pauvres… guérir les malades… et ressusciter les morts ?
Trop beau pour être vrai
Voilà qui semble parfait, non ? Presque trop beau pour être vrai. Peut-être vaut-il donc la peine de faire quelques recherches plus approfondies…
Pour commencer, comment se fait-il que cet arbre magique soit resté caché toutes ces années ? N’est-il pas remarquable que – même durant les périodes de pauvreté abjecte… de famine… de chaos et d’effondrement financier – personne ne l’ait jamais découvert ?
Pour formuler les choses autrement, nous ne connaissons aucun épisode de l’Histoire… même lorsque les gens mouraient de faim par millions et mendiaient désespérément quelques sous… où la découverte de cet arbre magique a résolu le problème.
Au lieu de cela, il a fallu travailler pour se sortir de chaque crise financière… lentement et dans la douleur, regrettant chaque centime dépensé lors du temps de l’abondance. Pourquoi ?
Deuxièmement, on trouve de nombreux épisodes, dans l’Histoire, où les gens pensaient avoir découvert le fabuleux végétal… pour être terriblement déçus quelques années plus tard.
John Law pensait en avoir un dans ses bureaux de la rue Quincampoix. Les gens faisaient la queue dehors pour avoir son nouvel « argent »… appuyé par des actions de la Compagnie du Mississippi.
Hugo Chávez pensait en posséder un au Venezuela – profondément enraciné dans les champs pétroliers du pays.
Des dizaines de nations – dont la Grèce, le Brésil, l’Allemagne et l’Argentine – ont imprimé des omégazillions dans leurs propres devises. En ajoutant simplement un zéro, ont-ils découvert, ils pouvaient multiplier leur argent par dix.
Mais si les gouvernements et les banques centrales pouvaient réellement créer du vrai « argent », les résidents de Harare et Caracas auraient bien plus de ce vrai « argent » aujourd’hui.
Au lieu de cela, dans tous les cas, l’arbre magique a donné d’énormes quantités de papier monnaie – mais la magie s’est éteinte pile au moment où il y en avait le plus besoin.
Les fruits du progrès… ou pas
Attendez un peu. Peut-être n’est-ce là qu’un fruit du progrès technologique moderne – comme l’iPhone.
Lorsque nous étions petit, pour passer un coup de téléphone, il fallait d’abord soulever le lourd combiné… s’assurer qu’il n’y avait personne sur la ligne… puis composer chaque chiffre du numéro en faisant tourner le cadran.
A présent, avec les communications ultra-modernes, nous pouvons consulter la météo… recevoir des courriers… et même regarder des films coquins – tout cela depuis notre smartphone.
La même sorte de progrès s’est-elle propagée au monde de l’argent, où des choses qui étaient impossibles il y a quelques années sont désormais tout à fait ordinaires ?
La triste expérience des autres épisodes d’« arbres magiques » n’est-elle plus d’actualité… parce que nous sommes tous bien plus intelligents… avec plein de nouveaux outils trop cool à utiliser ?
La question la plus difficile
C’est la question la plus difficile. Ce n’est pas parce qu’une chose ne s’est jamais produite qu’elle ne se produira pas aujourd’hui. Peut-être bien que l’ingénierie génétique a produit une chose qui n’avait encore jamais existé… une chose autrefois considérée impossible : un arbre magique produisant de l’argent.
Une petite minute. Comment est-ce que ça fonctionnerait ?
Une planche à billets peut produire autant de devise que l’on veut, avec tous les zéros possibles. La devise n’est pas de l’argent. Ce n’est de l’argent que si les gens acceptent de l’échanger contre leur temps et leur richesse.
C’est le problème avec l’hyperinflation – de moins en moins de gens sont prêts à cet échange. Il finit par n’y avoir plus personne. A ce moment-là, la devise perd toute valeur.
S’il y avait un arbre magique, il devrait faire plus que les faussaires travaillant pour les autorités. Il ne devrait pas créer uniquement des bouts de papier appelés « monnaie », mais des produits et des services – de la vraie richesse, du vrai argent – en quantité proportionnelle à la devise.
Comment s’y prendrait-il ? Cela continue de sembler impossible…