La fin du grand marché haussier obligataire de 35 ans est-elle enfin arrivée ? Ceux qui le pensent tablent sur un programme de dépenses d’infrastructures et d’armement financées par le déficit. Un tel consensus éveille la méfiance. Ce programme verra-t-il vraiment le jour ?
Après 35 ans d’attente… tant de fausses alertes… si souvent trompés… si souvent déçus… les baissiers de l’obligataire se sont rassemblés sur les toits comme s’ils attendaient la seconde venue du Messie.
A de nombreuses reprises, les investisseurs se sont dit : « nous y sommes ! C’est la fin du Grand Marché Haussier des Obligations ! »
Et à l’heure dite, attendant le paradis… ils ont fait le grand bond… pour s’écraser sur les rochers en dessous.
La « transaction Trump » ?
En 2008, en 2012, en 2014… à chaque fois, le marché les a bernés.
A présent, las… méfiants… et presque ruinés… ils placent leurs paris comme on pose une charge explosive dans un bâtiment fédéral.
« La déroute des obligations s’accélère, les relances souhaitées par Trump aiguillonnant les paris sur l’inflation », rapporte le Financial Times. Plus de 1 000 milliards de dollars sont partis en fumée sur les marchés obligataires mondiaux en une semaine.
Parallèlement, le Dow continue de grimper… frôlant les 19 000… et un nouveau sommet historique. C’est là la « transaction Trump » — le pari que le prochain gouvernement sera bon pour les actions et mauvais pour les obligations.
Même en France, certaines valeurs cotées pourraient profiter de la fin du grand marché haussier des obligations. Comment faire fructifier votre PEA sans prendre de risques inutiles ? Toutes les explications sont ici.
Ce sera bon pour les actions, pense-t-on, parce que « Le Donald » prévoit de baisser les impôts sur les sociétés, d’éliminer la réglementation qui étouffe certains secteurs, et de récompenser d’autres secteurs — les infrastructures et la défense — avec plus d’argent.
Ce sera mauvais pour les obligations parce que toutes ces nouvelles dépenses devront venir de quelque part.
Mais d’où ?
Le déficit budgétaire du gouvernement fédéral US atteint déjà les 3% du PIB. On peut voir où ça mène. L’économie ne se développe qu’à un rythme de 1%. Ce qui signifie qu’on ajoute trois fois plus de dette que de production.
Hmmm…
Le plan de Trump projette une augmentation des dépenses… accompagnée d’une réduction des impôts. Baisse des taxes + hausse des dépenses… Hmmm. Nous avons comme un sentiment de déjà-vu.
Comme le souligne notre collègue Chris Lowe, les estimations des dépenses gouvernementales lors de la présidence Trump montrent une augmentation de la dette nationale, sur la prochaine décennie, de 5 300 milliards de dollars.
D’insondables sottises
Voilà les éléments que nous observons. Et ce que nous en concluons, c’est une hausse de l’inflation.
Nous ne sommes pas aussi certain d’une hausse des actions. Nous avons le sentiment que les marchés boursiers vont faire un plongeon dans un futur pas si lointain.
En ce qui concerne les obligations, cependant, la « transaction Trump » nous semble gagnante.
Mais attendez… ce ne peut pas être aussi simple. Les journaux, les grands conseillers d’investissement et les Prix Nobel d’économie voient la même chose. Tous recommandent la « transaction Trump ».
Et quand tout le monde voit la même chose, à coup sûr, c’est qu’on devient aveugle.
L’une des objections à l’hypothèse de « plus d’inflation » provient de notre ami et collègue David Stockman, qui était conseiller en chef du budget du président Reagan.
Il pense que « la transaction sur la relance » (c’est-à-dire le pari que plus de « relances » bidon continueront à stimuler les marchés) est pour les pigeons.
Pourquoi ?
Parce que le programme de relance budgétaire ne se concrétisera pas. Il foncera dans le trou noir des finances gouvernementales américaines… et disparaîtra.
Il n’a pas tort. Ce n’est pas parce que « Le Donald » exige plus de dépenses que le Congrès lui obéira. Voici ce qu’en pense David :
« Toute cette ‘transaction sur la relance’ est basée sur d’insondables sottises. L’Oncle Sam ne stimulera absolument rien dans les années qui viennent parce qu’il est sur la paille.
Qui plus est, avant même que le président Obama ne sorte de la Maison Blanche, valise à la main, la bande du Tea Party-Ryan-Trump ne tardera pas à former le cercle, en tirant des coups de feu véhéments.
Ils ne viseront pas la relance tant vantée, cependant : ils se tireront mutuellement dessus alors que l’expiration prochaine (le 15 mars 2017) du plafond de la dette nationale viendra s’effondrer sur les ruines fumantes de l’establishment washingtonien.
Même sans une récession supposée, les projections de déficit du bureau du Congrès consacré au budget (CBO), dépasseront de loin les 1 000 milliards de dollars d’ici la fin du (seul et unique) mandat de Trump ».
Oui, les autorités sont à sec. Et certes, les républicains ont bloqué les précédents efforts de relance budgétaire. Mais nous n’abandonnons pas complètement cette idée de « transaction sur la relance » et nous allons creuser la question…