▪ Nous avons vu hier que Bâle III avait mis en place quatre nouveaux ratios dont les effets pouvaient être pervers. Après en avoir examiné deux — le LCR et le NSFR –, nous abordons les deux derniers… tout aussi dangereux.
En effet, la généralisation d’un modèle de financement désintermédié peut poser des problèmes d’asymétrie d’information entre prêteurs et emprunteurs. En général, les investisseurs institutionnels disposent de peu d’informations sur les entreprises emprunteuses s’ils investissent sur des produits de dette titrisée ; cet inconvénient semble théoriquement plus limité si les banques qui émettent les crédits en conservent une partie dans leurs bilans.
3/ L’exigence de ratios de solvabilité plus élevés va conduire les banques à se doter de capitaux (fonds propres) de plus en plus importants.
Cette course aux fonds propres va renchérir les capitaux. Les banques seront incitées à prendre des risques importants (et pas forcément bons) pour maintenir la rentabilité des fonds propres chèrement acquis… ou au contraire à privilégier des risques considérés — peut-être à tort — comme très faibles en continuant à acheter de la dette publique surévaluée.
4/ Le ratio de levier s’imposera aux banques à horizon 2018 et sera défini comme le rapport entre les fonds propres et le total de bilan. Il devra être supérieur à 3%, peut-être 4% voire plus, certains régulateurs nationaux n’hésitant pas à faire de la surenchère.
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L’objectif de ce ratio est de visualiser simplement le niveau de levier (mais pas forcément de risque) d’un bilan bancaire en regardant le rapport entre les fonds propres et les encours de crédit ou placement
La mise en oeuvre prévue de ce ratio est en soi une preuve de la méfiance que suscitent désormais les modèles internes de calcul de risques, même par ceux qui en ont été les plus ardents défenseurs, c’est-à-dire le comité de Bâle.
Si ce ratio de levier prend le pas sur le ratio de solvabilité traditionnel, les banques seront incitées à se porter sur les actifs à marge élevée et donc à risque plus élevé puisqu’ils ne seront pas plus pondérés en risque que des actifs à marge plus faible.
▪ La fin des manipulations serait-elle une si mauvaise chose ?
A vrai dire, nous avons connu une croissance factice, adossée à une bulle de crédit, elle-même facilitée par des taux courts maintenus artificiellement bas. Est-ce qu’il serait finalement dramatique que cette situation cesse et que les banques centrales arrêtent de manipuler la courbe des taux ? Ces manipulations conduisent les agents économiques à se surendetter pour réaliser des investissements ni forcément utiles, ni forcément très rentables.
La fin des crises financières à répétition passe par la fin de l’endettement public démesuré et de la création monétaire à tout va qui ne sont pas les piliers d’une croissance saine et durable, contrairement à ce que pensent la plupart de nos dirigeants politiques.
En réalité, nous vivons dans un marché de dupes parfait, avec une rigueur demandée à la collectivité mais sans assainissement du système (banques et Etats).
Malgré les pressions de la réglementation, certaines banques ne font toujours pas les efforts d’assainissement nécessaires. Pourquoi s’inquiéteraient-elles puisque la BCE fournit tout ce dont elles ont besoin à taux quasi-nul ?
Parallèlement, les Etats ne sont pas incités à mettre en place des politiques budgétaires et fiscales efficaces — réduire les dépenses improductives et augmenter les impôts les moins pénalisants pour l’activité économique.
Après tout, leur endettement est financé à des conditions de taux très avantageuses soit directement par les banques centrales, soit indirectement par la liquidité extraordinairement abondante octroyée aux banques, soit encore, comme nous l’avons vu, par des évolutions réglementaires.