▪ Oh là là… Tim Geithner est de retour. L’ancien secrétaire au Trésor US nous dit que grâce à lui et ses collègues prestidigitateurs, les Etats-Unis ont pu "empêcher une nouvelle Grande dépression"…
"Nous avons éteint l’incendie financier", affirme-t-il, "non parce que nous voulions protéger les banquiers, mais parce que nous voulions empêcher le chômage de masse".
En l’occurrence, il a empêché le chômage d’une personne — lui-même. Une fois terminé sa garde au Trésor, il a levé le menton et annoncé solennellement qu’il n’était pas un bureaucrate corrompu de plus qui se glisserait à Wall Street par la petite porte. Et puis, quelques mois plus tard… vroum… il était parti dans une société de private equity.
Notre travail est de relier les points… et aujourd’hui, nous en relions quelques-uns de plus.
La définition de la démocratie est la suivante : deux loups et un agneau décident du menu du dîner. Les loups, sans aucun doute, sont avec le pape François. Ce dernier pense que les gouvernements devraient redistribuer la richesse. Nombreux sont ceux qui sont d’accord avec lui. Ils veulent voir le lucre circuler. Il est bien dommage, toutefois, que François ne se soit pas donné la peine de se demander d’où provenait la richesse. Il aurait pu regarder M. Geithner de plus près.
Peut-être que Dieu — avec sa main invisible — a laissé les conséquences se produire comme Il le souhaitait à la suite de la crise de 2008 |
Peut-être que Dieu — avec sa main invisible — a laissé les conséquences se produire comme Il le souhaitait à la suite de la crise de 2008. Ou peut-être que M. Geithner et ses potes du secteur financier ont mis en premier leurs mimines grassouillettes sur le butin.
▪ Que veulent les anges ?
Tout le monde — athées comme croyants — pense connaître les opinions de Dieu, ou en tout cas s’en vante. La reforestation, le recyclage, la redistribution… et la reprise économique ! Il ne fait aucun doute que le Tout-Puissant est en faveur de tout ça. Ensuite, on fait savoir qu’on est pour une augmentation de l’impôt sur le revenu (pour les autres, bien entendu) ; ça aussi, ça vous met du côté des anges. Mais pour autant que nous en sachions, les anges préfèrent peut-être l’exploitation minière par lixiviation et les impôts forfaitaires… et font des excès de vitesse sur l’autoroute en jetant des canettes de bière par la fenêtre.
L’esprit de Dieu, comme l’avenir, ne peut être connu. Mais ça ne semble pas décourager grand monde. Le livre de l’ancien secrétaire au Trésor US sort cette semaine. Il est intitulé Stress Test. Comme le suggère le titre, Geithner affirme avoir été mis à l’épreuve par la crise financière de 2008-2009. Il pense avoir passé le test. Et maintenant, Dieu en poche et l’avenir sur le téléprompteur, il revend sa propre version de l’histoire.
▪ A quoi servent les paniques boursières… et les interventions gouvernementales ?
A l’automne 2008, par exemple, M. Geithner savait ce qui allait arriver. Comme le disait sa collègue Meg McConnell, "il y aura des bidonvilles et des soupes populaires dans tout le pays". Comment le savait-elle ? Parce que "les paniques tuent les économies", dit Geithner.
Si l’on en croit les preuves, les paniques permettent en fait de redonner de la vie aux économies |
Si l’on en croit les preuves, les paniques permettent en fait de redonner de la vie aux économies. Comme des feux de forêts, elles éliminent le bois mort. C’est ce qui s’est passé à deux reprises au début du 20ème siècle. Il y a eu une panique en 1907 et une autre en 1920. Le marché boursier américain a été divisé par deux entre juin 1907 et janvier 1908. L’économie a reculé elle aussi. Mais à la mi-1908, les valeurs US étaient revenues à leur sommet et l’économie du pays était en plein boom.
A nouveau, entre juillet 1920 et juin 1921, le marché boursier a perdu la moitié de sa valeur. Et à nouveau, les autorités n’ont rien fait. L’économie américaine est entrée en dépression, avec un chômage à deux chiffres et 30% de fumée en moins sortant des cheminées d’usines. Au lieu d’accumuler les déficits budgétaires pour relancer l’activité, le gouvernement fédéral a enregistré un surplus. Pas de TARP, pas de taux zéro, pas de QE. En dépit de — ou peut-être grâce à — cette négligence gouvernementale, l’incendie a fait rage pendant quelques mois. Mais à l’été 1921, le bois sec était consumé et les flammes se sont éteintes… 18 mois plus tard, les gens étaient au travail.
Ce fut la dernière fois que les pompiers fédéraux laissèrent un brasier faire ce qu’il voulait. Depuis, chaque conflagration a été combattue avec des pare-feux et des lances à eau. La panique de 1929, par exemple, a été affrontée par Hoover… puis par Roosevelt. A eux deux, ils ont tant arrosé l’économie qu’elle s’en est trouvée ramollie pendant une décennie entière.
Plus récemment, Alan "le Fumeur" Greenspan a éteint les feux de camp de 87… et de 2001. Puis ça a été le tour de Geithner.
Oui, c’était "une sale affaire", admet-il. Et oui, il y a eu "des bénéficiaires collatéraux" (il ne se nomme pas précisément lui-même… mais ce n’était pas franchement nécessaire). "Cependant, c’est le seul moyen de protéger, en fin de compte, les victimes innocentes de la crise contre les dommages calamiteux des dépressions économiques".
Saint Timothy à la rescousse. Alléluia.