▪ Ces jours-ci, nous critiquons un livre que nous n’avons pas lu. Selon Paul Krugman, Le capital au 21ème siècle, de Thomas Piketty, est un fabuleux succès. Nous avons hâte de mettre la main sur un exemplaire, juste pour voir si Piketty est à la hauteur de ce que nous pensons de lui.
Nous soulignions hier que le vrai capitalisme se corrige de lui-même. Piketty s’inquiète de ce que les capitalistes gagnent trop d’argent. Le retour sur investissement, dit-il, dépasse ce que gagnent les travailleurs. r>c.
Il ne devrait vraiment pas se faire de souci à ce sujet. Lorsque les rendements sont élevés, les investisseurs affluent. Il y a alors trop d’argent pour trop peu de bons investissements… et les revenus, "r", chutent.
Souvent, le rendement chute si violemment que les investisseurs en pleurent de douleur. C’est ainsi que va le monde. On ne peut profiter du plaisir des profits sans subir de temps à autre la douleur des pertes. Thomas Piketty n’est pas un fan du capitalisme. Mais qui l’est ?
"J’imagine que vous vivez votre crise du capitalisme, aux Etats-Unis", a déclaré la femme qui gère une association de bienfaisance non loin du ranch. Elle est venue à moto (deux heures de trajet, quand même) dans le but d’aider les autochtones à améliorer leur existence.
"J’espère que vous vous en sortez, vous les Américains", a-t-elle dit avec tout l’entrain d’une végétarienne dans un abattoir.
▪ Qui aime le capitalisme ?
Pour elle, le capitalisme est une croyance condamnée. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’il soit remplacé par des bonnes âmes bien-pensantes qui s’assureront que les événements suivent le cours qu’elles ont décidé, plutôt que le cours voulu par la nature. Nous avons tout compris au sujet de cette dame lorsque nous avons visité ses bureaux et constaté qu’elle avait un portrait de Che Guevara sur le mur. Elle n’est pas fan du capitalisme, elle non plus.
Le capitalisme compte si peu d’aficionados qu’on pourrait probablement tous les réunir et les fusiller en un après-midi |
Elle n’est pas la seule. Le capitalisme compte si peu d’aficionados qu’on pourrait probablement tous les réunir et les fusiller en un après-midi. Les pauvres ne l’aiment pas parce qu’il les empêche de devenir riches. Les riches ne l’aiment pas parce qu’il menace de les ruiner avec des krachs et des faillites. Les hommes d’affaires ne l’aiment pas parce que son processus de destruction créatrice rend leurs industries obsolètes. Les intellectuels ne l’aiment pas parce qu’il est intrinsèquement imprévisible et incontrôlable. Les médias ne l’aiment pas parce qu’il ne donne pas de conférence de presse et ne fournit pas de petites phrases pour journalistes paresseux. Les investisseurs ne l’aiment pas parce qu’il punit leurs erreurs. Et bien entendu, les professeurs d’économie le détestent encore plus que tous les autres. Pourquoi ? Parce qu’il réfute leurs sottes idées sur le fonctionnement réel d’une économie.
De sorte que tous — les riches, les pauvres, les puissants et les misérables — implorent l’aide du gouvernement. Pourquoi le gouvernement ? Parce que c’est la seule institution qui puisse légalement empêcher les capitalistes de créer de la richesse.
▪ Le gouvernement n’est pas innocent
L’observation de M. Piketty — selon laquelle les riches sont devenus encore plus riches au cours des trois dernières décennies — n’est pas fausse. Mais il est dommage qu’il n’approfondisse pas ses réflexions sur la manière dont cela s’est produit. Selon lui, lorsque la richesse est concentrée dans quelques mains, il s’ensuit un phénomène de "capture" de l’Etat. Les riches peuvent contrôler le gouvernement et l’utiliser comme un mafieux utilise une batte de base-ball : pour assommer leurs opposants et s’emparer des profits.
Ceux qui contrôlent la police et l’armée ne sont pas étrangers à l’usage de la batte de base-ball |
Sauf que l’Etat n’est pas un participant chaste et innocent. Il n’est pas du tout "capturé". Ceux qui contrôlent la police et l’armée ne sont pas étrangers à l’usage de la batte de base-ball ; ils s’en servent régulièrement.
En fait, ils prennent souvent les riches en otages et exigent autant de rançon (des impôts… des pots-de-vin… de contributions électorales… des versements à des groupes d’intérêt…) qu’il est possible. Et plus souvent encore, ils conspirent et s’arrangent avec tout groupe pouvant les aider — riches et pauvres, syndicats, groupes d’entreprises, lobbyistes et ainsi de suite — faussant le capitalisme et sapant le bien public.
3 commentaires
C’est un peu faux Mr Bonner, les seuls à détenir le vrai pouvoir sont les plus riches qui se servent des politiques comme des pantins.
Cher Monsieur,
Le problème, c’est que le « vrai capitalisme », le capitalisme, pur et idéal comme une jeune vierge, et qui profiterait à tous – j’ai pu voir qu’on l’enseignait en classe de bac ES- n’existe pas ! C’est une fiction d’économistes du 19ème siècle, un model désincarné et métaphysique (la main invisible du marché) qui n’a jamais existé nul part et n’existera jamais !
Le capitalisme a commencé par l’expropriation des paysans en Angleterre formant la masse de ceux qui travaillerons 12 heures par jour dans les factories, la piraterie et le rapt d’esclaves partout dans le monde et pas seulement en Afrique, le travail des enfants de 5 ans dans les filatures et ceux de 10 ans dans les mines. D’ où vient croyez-vous la richesse d’une ville comme Bordeaux par exemple ? D’ où viennent les richesses qui ont crée l’industrie d’aujourd’hui ? Du vol, du meurtre et du pillage des colonies, de l’esclavage et de la prostitution des femmes et des enfants en Angleterre et en Amérique mais aussi en France, des guerres pour introduire l’opium en chine, j’en oublie évidemment…
Qu’avons nous appris de la dernière crise ? Oublier donc le capitalisme fantasmé pour voir le capitalisme réel pour ce qu’il est. Oublier le capitalisme qui se régule tout seul, cela n’a jamais été le cas et ne le sera jamais, c’est un oscillateur libre.
Oui et les produits dérivés atteignent 750.000 milliards de dollars. La belle vie, c’est la crise, jusqu’à quand ?