▪ "Cet endroit était en plein boom il y a trois ans. Les gens faisaient des choses insensées. Tout le monde pensait que les prix allaient continuer à grimper, comme aux Etats-Unis".
Hier, nous avons fait une promenade à cheval près de notre domaine au Nicaragua. Nous voulions jeter un coup d’oeil à un terrain en vente — d’environ 900 acres, non loin de notre maison.
"Les propriétaires pensaient pouvoir développer la propriété et vendre des lots", continua l’agent immobilier. "Mais ils ont eu des problèmes avec le zonage. Et une fois ces problèmes résolus, le boom était terminé".
L’agent en question était un beau jeune homme venu faire du surf au Nicaragua. Comme de nombreux autres, il est tombé amoureux de l’endroit et n’en est plus reparti.
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"Ici, les prix n’ont jamais grimpé aussi haut qu’au Costa Rica. Et les plages sont plus belles ici. Mais c’était incroyable, la vitesse à laquelle les prix ont grimpé. Puis, lorsque le krach est arrivé, j’imagine que plus personne ne voulait tenter sa chance au Nicaragua. Ou peut-être que les acheteurs se sont simplement retrouvés à court d’argent".
Nous nous rappelons l’atmosphère de bulle qui régnait dans les environs en 2006. Les acheteurs arrivaient, débordant d’enthousiasme et d’argent. Sur toute la côte, les propriétés étaient achetées, découpées et vendues à des prix de plus en plus élevés. Des lots qui coûtaient 50 000 $ en 2002 ou 2003 se vendaient 300 000 $ ou plus trois ans plus tard.
En fin connaisseur des idioties financières, nous savions ce que ça signifiait : une bulle était en train de se produire sous nos yeux.
▪ En fait, d’une certaine manière, nous en étions responsables. Nous avons lancé le boom de l’immobilier sur la côte sud-est du Nicaragua dans les années 90. Nous faisions partie des premiers acheteurs. Nous sommes venus. Nous avons vu. Nous avons signé des contrats.
La "Riviera du Pacifique", l’avons-nous appelé.
En 2000, nous avons acheté un morceau de terre — environ 700 acres — au bord de l’océan, pour environ 1,4 millions de dollars. En 2006, lorsqu’un lot d’une acre près de notre maison, sur le même terrain, s’est vendu 500 000 $, nous avons su que la fin était proche. La bulle était sur le point d’éclater.
Et paf ! En 2007, le développement sur cette partie de la côte s’est arrêté net. Le boom était terminé. Ce n’est pas tant que les prix ont chuté — évidemment qu’ils l’ont fait. Mais, plus important encore, les acheteurs ont disparu. Les Nord-Américains restaient chez eux.
Nos propres projets immobiliers ont ralenti. Mais dans la mesure où nous n’avions pas de dettes, nous pouvions continuer. D’autres promoteurs n’ont pas eu cette chance. Certains ont fait faillite. D’autres sont simplement partis.
En haut de la côte, nous avons vu une résidence protégée. Sauf que le portail tombait de ses gonds. L’endroit semblait abandonné. Dans une autre de ces résidences, les propriétaires ont dû prendre le relais lorsque le promoteur a quitté le pays ; apparemment, ils ont réussi à maintenir le site en vie.
"Quasiment toutes les projets de la côte ont des problèmes", a déclaré notre gourou de l’immobilier, Ronan MacMahon. "Le marché de l’immobilier connaît lui aussi des booms et des krachs. Mais lorsqu’on est dans une région comme celle-ci, les krachs secouent vraiment les petits promoteurs. Ils n’ont pas l’argent pour continuer".
Nous avons donc enfourché un des chevaux locaux, une carne aux côtes apparentes, pour aller voir ce terrain. Il s’agissait d’un projet qui n’avait même jamais été entamé. Une bonne chose : pas de routes ou de circuits d’eau à réparer. Il n’y avait rien du tout.
Nous avons grimpé pendant près d’une heure. Les chevaux luttaient… s’arrêtaient, épuisés… puis reprenaient leur ascension. La sueur ruisselait de leurs flancs. Ils écumaient. Chaque fois que nous pensions avoir atteint le sommet, une nouvelle colline apparaissait. Toujours plus haut… toujours plus raide… toujours plus difficile.
Nous avons fini par arriver. Quelle vue ! Nous pouvions voir à 45km à la ronde.
D’un côté se trouvait un gigantesque terrain gouvernemental, confisqué durant la période sandiniste. De l’autre, les sites en développement le long de la côte Pacifique.
D’un côté, les erreurs du gouvernement. De l’autre, celles des investisseurs privés. D’un côté, les plans ratés de redistribution des terres mis en place par les empêcheurs de tourner en rond. De l’autre, les plans ratés de ventes des terres mis en place par les promoteurs immobiliers.
Nous avons regardé à gauche. Nous avons regardé à droite. Nous avons inspiré profondément et tourné notre visage vers les cieux. Nous avons fait signe aux dieux eux-mêmes. Nous les avons suppliés.
"Dites-nous vos secrets", avons-nous imploré.
Puis nous sommes redescendus de la montagne, pour aller boire un verre.
Bonne année 2011 !