▪ La véritable rentrée pour les marchés n’aura lieu d’un point de vue technique que mardi, les Etats-Unis célébrant la Fête du Travail ce lundi. Toutefois, les stratèges estiment que les gérants attendront jeudi après-midi pour faire évoluer leurs portefeuilles — en fonction tout d’abord de l’enquête d’ADP diffusée à 14h15 puis surtout de la conférence de presse de Mario Draghi à partir de 14h30.
Les plus prudents seront tentés d’attendre vendredi et les chiffres du chômage américain… sans oublier le début des débats au Congrès américain concernant des frappes militaires à l’encontre de Damas.
Le début du mois de septembre apporte avec lui de nombreuses inconnues — et pas seulement d’ordre géopolitique. Voilà déjà trois mois que Wall Street est obnubilée par la question du QE3 ; par ailleurs, le ralentissement global qui affecte les pays émergents pourrait prendre la forme d’une crise ouverte en Inde, qui voit se profiler le spectre d’une redite de la débâcle de 1991.
Les points communs sont nombreux : déficit budgétaire abyssal, inflation galopante, chute de la roupie, évaporation des réserves de change — et au final un défaut sur la dette et l’intervention du FMI, tandis que des gros porteurs remplis de lingots décollaient de l’Inde vers l’Angleterre pour garantir les prêts consentis dans l’urgence.
▪ Recul des indices en août
Face à tous ces nuages qui s’accumulent à l’horizon, les indices boursiers ont logiquement reculé au mois d’août… mais vraiment en toute fin de ligne droite en ce qui concerne Paris.
Le CAC 40 affichait encore un score d’équilibre jeudi soir, avec le test des 3 990 points. Cependant, il n’a pas réussi à résister à l’intensification des pressions baissières vendredi.
Il a passé la journée dans le rouge sans jamais amorcer de rebond, et s’est même enfoncé de 0,25% supplémentaires au moment du fixing pour en terminer au plus bas du jour, sur un repli de 1,33%. Cela à la veille du week-end, de telle sorte que la perte hebdomadaire atteignait 3,3%, soit la plus mauvaise performance depuis mi-juin.
A Wall Street, les opérateurs espéraient un coup de pouce haussier juste avant le pont du Labor Day. Il s’en est bien produit un au cours des cinq dernières minutes (et surtout de la dernière)… mais il a simplement permis à Wall Street de limiter in extremis ses pertes, alors que les indices américains lâchaient entre -0,5% (S&P 500) et -1% (Nasdaq) vers 21h54.
Au final, le Dow et le S&P reculent de 0,3%, le Nasdaq de 0,8%. Des écarts bien plus spectaculaires étaient parallèlement observés sur le Dow Transport (-1,15%) et le Russell 2000 (-1,6%).
Sur le mois écoulé, le S&P 500 a perdu 3,15%, le Nasdaq 1,85% et le Russell 2000 en est à -3%. C’est la pire performance depuis mai 2012 mais cela ne corrige que très partiellement les gains des huit précédents mois de hausse (consécutifs pour certains indices américains).
▪ Les troubles au Moyen-Orient n’expliquent pas tout
Malgré l’éloignement de frappes militaires immédiates à l’encontre de Damas, le Proche-Orient redevient pour de nombreux opérateurs ce qu’il n’a jamais cessé d’être : une poudrière.
Au-delà de la Syrie, le Liban est menacé de déstabilisation (attentats à répétition), la population turque est très divisée entre pro et anti-Assad… et l’Iran continue de s’impliquer comme soutien indéfectible au régime de Damas.
Pour expliquer la lourdeur de vendredi, de nombreux commentateurs citaient la faiblesse de la consommation aux Etats-Unis, toujours considérée comme le principal moteur de la croissance.
Le département du Commerce a calculé que les dépenses des ménages américains ont augmenté de seulement 0,1% en juillet alors que les économistes espéraient 0,3%. Le PMI de Chicago ressortait en revanche en hausse de 0,7% à 53 (contre 52,3) mais cette hausse s’avérait strictement conforme aux attentes et ne suscitait aucune réaction positive.
Wall Street était loin de faire le pari d’un débat au Congrès US concernant l’opportunité de frappes contre la Syrie. La nouvelle n’a été connue qu’en début de soirée, par une déclaration officielle de Barack Obama indiquant qu’il demanderait son avis aux représentants de la nation.
Pirouette de l’histoire, ce sont les leaders les plus va-t’en-guerre du parti républicain — qui avaient précipité l’Amérique dans l’invasion de l’Irak à coup de fausses preuves et de pressions sur leurs alliés — qui se montrent les plus opposés à toute opération militaire contre Damas, un régime allié de l’Iran et ouvertement hostile aux intérêts américains dans toute la région.
Si le baril de pétrole brent ne retombe pas sous les 115 $ à Londres dès ce lundi, cela signifie que les spécialistes du secteur considèrent que les Etats-Unis ne font mine de reculer que pour mieux sauter le pas, juste après la tenue du G20 à Moscou.
1 commentaire
Détrompez-vous, Béchade; les républicains – outre le fait qu’ils soient divisés sur la question des frappes contre le régime syrien sur l’ensemble du spectre qu’ils représentent, depuis les libertariens historiquement non-interventionnistes jusqu’aux néo-conservateurs va-t’en-guerre – ne sont pas opposés « à toute opération militaire contre Damas », tel que vous le prétendez, mais sont opposés à CETTE intervention limitée dont ils remettent en question le sens.
P.ex. McCain (républicain pas néo-conservateur, plutôt dans la tradition de Goldwater) se dit opposé à cette intervention car elle ne servirait à rien selon lui, alors qu’ils souhaite de manière ciblée le renversement du régime syrien.
D’autres républicains, surtout les néo-conservateurs, se montrent également opposés au caractère tellement « limité » de l’opération proposée par Obama, et l’accusent surtout d’affaiblir le pouvoir présidentiel de dissuasion militaire en s’adressant au Congrès préalablement aux frappes.