Par Marc Mayor (*)
Charbon, gaz… substituables
Dans une certaine mesure, le charbon et le gaz naturel sont interchangeables : lorsque le prix du gaz naturel est élevé et celui du charbon plus modeste (en British Thermal Units ou BTU, c’est-à-dire par unité d’énergie livrée), les producteurs d’énergie passent du gaz au charbon. A l’inverse, quand le charbon est cher et le gaz naturel bon marché, c’est l’inverse qui se passe.
Sous 5,50 $, le gaz l’emporte
Récemment, la Southern Company (symbole SO sur le New York Stock Exchange), quatrième producteur d’électricité des Etats-Unis et numéro 16 mondial, a indiqué que la demande de gaz naturel avait augmenté de 24% par rapport à l’an passé.
L’entreprise explique que, à ce niveau de prix, le charbon n’a aucune chance contre le gaz naturel ; lorsque le prix du gaz passe en dessous de la barre des 5,50 $, il redevient une excellente alternative à la houille.
Mais voilà, la toile de fond est relativement maussade pour le gaz…
La production de gaz naturel a augmenté, la demande industrielle est en baisse en raison de la crise et les centrales nucléaires ont utilisé davantage de leur capacité récemment…
Tous ces arguments sont donc plutôt baissiers pour le prix du gaz dans l’absolu. [NDLR : Si certains d’entre vous veulent en savoir plus sur le marché du gaz naturel, Sylvain Mathon y consacre un dossier complet ce mois-ci dans Matières à Profits. Pour en savoir plus cliquez ici]
Alors la dame de pique pourrait bien revenir à …
Maintenant que les producteurs abandonnent le charbon pour faire la part belle au gaz naturel, il faut se demander si ce n’est pas désormais la houille qui pourrait se retrouver avec la dame de pique.
L’Agence d’information sur l’énergie (EIA en anglais), qui livre les statistiques officielles américaines, le confirme d’ailleurs : en juillet, les usines qui créent de l’électricité à partir de charbon ont généré 15% de moins que l’an passé, tandis que celles qui utilisent le gaz naturel ont connu une hausse de 2%.
Les stocks de houille atteignent des records à 196 millions de tonnes, soit +36% en 12 mois et 70 jours de réserve. Les statistiques en BTU, plutôt qu’en tonnes, sont encore plus révélatrices, avec une hausse de 62% en un an.
L’idée est assez simple
Puisqu’il est relativement facile de passer du gaz au charbon, et vice-versa, en fonction des fluctuations de prix, pourquoi ne pas tenter de juger de l’efficacité des marchés ?
Pour ce faire, j’ai créé un indice de cherté de la houille par rapport au gaz, en me basant sur l’ETF Market Vectors Coal pour le charbon et sur les prix du marché à terme NYMEX concernant le gaz naturel. La base de 100 a été fixée au 15 janvier 2008, pour la simple raison qu’il s’agit de la date de lancement de l’ETF en question.
Comme vous le constatez, le prix d’équilibre depuis cette date est relativement proche de 100 :
Au plus bas, les prix ont été divisés par trois par rapport au niveau de départ. Au plus hauts, les prix ont plus que doublé. A 20 ou à 25% près, le niveau d’équilibre est donc à peu près correct autour de 100.
Que voyons-nous ?
Que lorsque l’écart atteint un facteur de deux, soit en atteignant 50, voire moins, soit en dépassant 200, il vaut la peine de jouer la hausse, respectivement la baisse, pour des gains oscillants entre 75% et 300%, voire mieux aux extrêmes.
Actuellement, le balancier indique un mouvement vers la hausse des prix du gaz, et la baisse de la cherté du charbon ; ce phénomène pourrait être amplifié par l’effet saisonnier, car il est habituel que le prix du gaz augmente pendant les mois d’hiver.
Captez le mouvement de balancier
Toutefois, attention à une possible anticipation des producteurs d’énergie, qui prévoient peut-être des prix en hausse pour le gaz dès décembre, et pourraient ajuster leur fusil d’épaule à l’avance en faisant repartir le balancier dans l’autre sens bientôt.
Une fois de plus, un money management scientifique et dépassionné sera un allié de taille à une telle stratégie, qui permettra à ceux qui savent ce qu’ils font d’utiliser du levier pour maximiser leurs profits, sans le moindre risque de marché.
Marc Mayor est expert en investissements éliminant le risque de marché et rédacteur de la Lettre Suisse des Initiés. Retrouvez-le sur son site Le Coin des Insiders.