▪ Les banques centrales du monde entier continuent d’agiter la carotte des taux faibles sous le nez des marchés. Mais ces derniers ont la sagesse de ne pas tomber dans le panneau.
Un autre jour de fin d’été qui passe. Peu d’actions et trop de soleil.
Le public, les investisseurs, les banquiers centraux, les économistes, tous continuent à se tromper. Ils semblent n’avoir rien appris…
Malgré cinq années d’échec, les banquiers centraux nous disent encore qu’ils peuvent « stimuler » les économies et relancer la croissance. Et il semble que les gens les croient ! Les investisseurs pensent que leurs actions monteront. Les économistes pensent que le PIB augmentera plus rapidement. Le public attend avec impatience de dépenser plus qu’il ne gagne.
Et à présent — avec la réunion de la Fed prévue vendredi à Jackson Hole, dans le Wyoming — tout le monde retient son souffle… espérant… supputant… hallucinant…
Hier, la Banque populaire de Chine a également ajouté une dose de stimulation de la croissance. Selon le quotidien britannique The Telegraph :
« La Chine a annoncé un total de 8 000 milliards de yuans de ‘projets de stimulation’ pour essayer de raffermir la confiance dans une économie qui semble ralentir plus vite que prévue. »
« Ces deux dernières semaines, l’une après l’autre, les provinces chinoises ont annoncé leur plan, dans ce qui semble être un effort de propagande pour rassurer le public que l’économie est encore sur les rails. »
« Entre-temps, le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, a promis que son gouvernement intensifiera ses efforts pour dynamiser l’économie au deuxième semestre de cette année. »
« Lors d’une visite à Guangdong, coeur industriel de la Chine d’où partent une grande partie des exportations, Wen Jiabao a averti que ‘le secteur des exportations sera confronté à encore beaucoup de problèmes et d’incertitudes. Le troisième trimestre en particulier est crucial.' »
« Selon les analystes, le gouvernement pourrait à présent abaisser la valeur du yuan, après une augmentation de 4,7% l’année dernière par rapport au dollar. Une réduction supplémentaire des taxes à l’exportation pourrait également être utilisée pour renflouer les industriels. »
« Le secteur des exportations chinoises souffre d’une demande anémique de l’Europe et des Etats-Unis. Au cours des sept premiers mois, les exportations ont augmenté de 7,8%, alors que les importations ont augmenté de 6,4% La Chine pourrait ainsi ne pas atteindre son objectif de 10% de croissance du commerce extérieur cette année. »
« Les exportations de juillet ont enregistré leur rythme de croissance le plus bas depuis2009 et on rapporte que, pour la première fois depuis la crise financière, des ouvriers quittent leur usine pour rentrer dans leur province. »
Aux Etats-Unis, Charles Evans, président de la Réserve fédérale de Chicago, pense que le secret pour réduire le chômage est de faire tourner encore plus rapidement la planche à billets. Sans rire. Selon Reuters :
« La Réserve fédérale devrait lancer immédiatement un nouveau cycle d’assouplissement monétaire, en rachetant des obligations le temps qu’il le faudra pour assurer une baisse régulière du taux de chômage, a déclaré lundi un haut responsable de la Fed. »
« Sans un changement de politique, le taux de chômage, actuellement à 8,3%, n’a guère de chance de chuter en dessous des 7% avant 2015 au plus tôt, a déclaré à Hong Kong Charles Evans, président de la Réserve fédérale de Chicago. »
« ‘Je ne crois pas que nous devrions attendre de savoir ce que nous diront les prochaines statistiques’ a estimé Charles Evans lors d’un séminaire au Hong Kong Bankers Club. ‘Nous avons largement dépassé le seuil justifiant une action supplémentaire ; nous devons maintenant passer à l’action.' »
« Comme les responsables des banques régionales de la Fed à Boston et San Francisco, Evans voit là une occasion de faire maintenant ce que la Fed n’a fait que deux fois auparavant — racheter des obligations à long terme dans un effort de baisser les coûts d’emprunt long terme. »
« Evans a expliqué souhaiter un nouveau programme d’achats d’obligations à long terme par la Fed, sans limite de montant ou de temps ; une approche qui semble compter de plus en plus de soutiens. »
« La Fed pourrait interrompre ses achats d’obligations après deux ou trois trimestres de baisse régulière du taux de chômage, a-t-il précisé, ajoutant qu’elle pourrait ensuite maintenir ses taux d’intérêt à leur niveau actuel — leur plus bas historique — jusqu’à ce que le taux de chômage soit revenu à 7%. »
Voyons. Comment tout cela fonctionne-t-il ?
La Fed crée des emplois en rachetant des obligations ?
Comment ?
En fait, elle maintient les taux d’intérêt à un niveau bas… voilà peut-être l’explication. Mais attendez un peu : les taux d’intérêt sont déjà à des records de minima. La Fed a déjà établi le taux directeur à un niveau aussi proche de 0% qu’il ne peut oser le faire. Et il en va ainsi depuis près de quatre ans. Quant aux taux long terme, ils sont si bas que — en tenant compte de l’inflation — les emprunteurs ne paient quasiment plus d’intérêt du tout.
Les gens sont déjà assez endettés comme ça. Leur offrir plus de dettes… à des conditions encore plus faciles… ne les conduit pas nécessairement à vouloir s’endetter encore plus.
Et même si la dette pas chère enfonce encore plus les emprunteurs dans le trou, il est difficile de voir comment cela pourrait rendre quiconque plus riche.
Mais si les consommateurs pouvaient être incités à consommer plus, les producteurs seraient incités à produire plus… et à embaucher plus de monde. Alors nous pourrions connaître une petite bulle avant de tous faire faillite.
Jusqu’ici, ni les consommateurs ni les banquiers ni les entreprises ne semblent tomber dans le panneau. La Fed a établi des taux d’intérêt outrageusement bas. Mais les banquiers ne font pas circuler l’argent… et les ménages et les entreprises ne semblent pas en vouloir. Au contraire, l’économie reste verrouillée dans cette période de réduction de l’endettement — une Grande Correction — qui pourrait durer encore cinq… dix ans.
Et cela pourrait faire encore plus mal. Les prix des actions sont encore élevés ; elles pourraient facilement s’échanger à la moitié des prix actuels. L’immobilier, qui apparemment atteint son plus bas niveau, pourrait baisser encore de 20%, voire plus…
Et les consommateurs — dont les revenus sont inférieurs à ce qu’ils étaient il y a 10 ans — pourraient cesser de consommer autant.
En termes de taux d’intérêt, nous pourrions voir encore le rendement du bon du Trésor à 10 ans à 1%… voire moins.
Certes, nous ne pouvons affirmer que tout cela aura lieu. Mais nous ne voudrions pas détenir un portefeuille uniquement composé d’actions américaines en attendant que l’avenir nous le dise.