** La dernière séance de la semaine avait bien mal débuté sur les places européennes au lendemain d’une chute de 2,3% de Wall Street et avec un baril de pétrole remonté de 123,5 $ vers 126,2 $. Vendredi matin, la bourse de Paris achevait d’effacer le reliquat de gains engrangés depuis lundi dernier.
Le test des 4 300 points semble avoir été salutaire, puisque la suite des évènements s’est avérée beaucoup plus favorable grâce aux chiffres américains et à un nouveau reflux du pétrole sous les 123 $. L’indice CAC 40 a pratiquement repris 80 points sur ses plus bas et affichait au final un gain hebdomadaire de 1,8%.
L’indice CAC compte désormais un score de +9,4% par rapport à son plancher du 16 juillet dernier ; il avait même flirté avec les +11% jeudi à l’ouverture. Nul doute que le seuil des 4 440 points devrait constituer un seuil technique décisif au cours des prochaines séances.
La bourse de Paris, avec une progression de 0,67%, termine largement en tête des places européennes, devant Milan (+0,35%) et Francfort (-0,06%). L’indice Eurofirst 80 puis l’Eurotop 100 ont terminé la journée à l’équilibre, préservant une avance hebdomadaire de 1%. Les valeurs du secteur du luxe et des spiritueux — PPR gagnait la semaine dernière 8,4%, Pernod-Ricard 6,8% et LVMH 4,75% — et le titre EDF (+7% en cinq séances) ont largement contribué à la surperformance des valeurs françaises.
Par deux fois consécutives (jeudi et vendredi), la volatilité intra-day a atteint les 100 points d’indice sur le CAC 40. Il faut s’habituer à ce genre d’écarts compte tenu de la nervosité des opérateurs, lesquels passent du jour au lendemain — et parfois même au cours de la même séance — d’un état d’euphorie à la déprime la plus profonde au gré des anticipations d’embellie conjoncturelle ou de retour en force des risques de stagflation.
Les indices américains tentent de se remettre du coup de massue reçu la veille : les valeurs financières restaient sous pression, notamment Freddie Mac et Fannie Mae qui reculait encore de 5% vendredi après -20% jeudi. Ce sont les valeurs de croissance du Nasdaq qui affichaient les meilleures dispositions avec la bonne surprise des résultats de Juniper Networks qui a dévoilé des profits en hausse de 40%.
** Plus globalement, les investisseurs ont repris confiance suite à la publication d’une série de trois statistiques, toutes encourageantes, quel que soit le secteur considéré. En soutenant le dollar, elles ont provoqué la rechute de l’or noir vers un plus bas de 122,5 $, très proche de notre objectif des 122 $ : de quoi apaiser un peu les anticipations inflationnistes.
D’après l’université du Michigan, les consommateurs tablent sur une hausse des prix de 5% en rythme annuel d’ici fin 2008.
La conjoncture semble malgré tout s’améliorer dans l’industrie : le département du Commerce annonçait vendredi que les commandes de biens durables avaient augmenté de 0,8% en juin alors que la prévision médiane des économistes tablait sur une baisse de 0,4%.
Le rebond des marchés américains s’était encore affirmé vers 16h avec le chiffre des ventes de logements neufs. Elles n’auraient reculé que de 0,6% en juin pour un total de 530 000 unités — mais elles progressent en fait de 4% par rapport aux chiffres du mois de mai : un score de 512 000 avait été initialement annoncé.
Sur un an, la tendance demeure très négative, avec des ventes de maisons neuves en recul de 33,2% et des prix qui chutent de 15% mais qui semblent enfin se stabiliser depuis mai dernier.
Enfin, l’indice de confiance des consommateurs de l’université du Michigan pour juillet a été fortement révisé en hausse en juillet, à 61,2 contre 56,6 en première estimation. Le dollar en profitait pour rebondir en direction des 1,5675 euro, contre 1,5750 euro vendredi midi.
** Le seul véritable point noir observé vendredi concernait le compartiment des assureurs. AXA replongeait de 4,75% (et jusqu’à 8,5% en séance), pénalisée par la chute de Munich Re (-7,3%) et de son rival Hannover Re après la publication de perspectives décevantes à l’occasion d’une estimation préliminaire de leurs résultats trimestriels. Il s’agit en fait d’un véritable warning sur le second semestre 2008.
La raison demeure encore et toujours les déboires accumulés sur les marchés obligataires américains. Les réassureurs ont vu dans la couverture du risque des produits de taux une alternative à leur activité guère lucrative de couverture des risques industriels ou climatiques.
Le scénario catastrophe auquel sont confrontés les établissements financiers — qui se sont brûlé les ailes (et les pattes, et le bec, alouette…) dans la spéculation sur les dérivés de crédit — aurait un goût d’inachevé s’il ne venait se greffer là-dessus un volet judiciaire qui risque d’alourdir singulièrement les pertes, déjà abyssales, constatées depuis l’été 2007.
Le feuilleton de l’été 2008 promet d’être captivant, avec des enjeux se chiffrant en dizaines de milliards de dollars sous forme d’indemnités réclamées par des clients dont la confiance aurait été abusée. Les avocats se frottent déjà les mains tandis que les journalistes viennent humer avec gourmandise ce qui s’apparente à un parfum de gros scandale financier.
** C’est Andrew Cuomo, le procureur de New York, qui, en digne successeur d’Eliot Spitzer, vient d’inaugurer le premier chapitre dudit feuilleton judiciaire. UBS aurait placé auprès de sa clientèle pour 25 milliards de dollars de produits de taux à haut risque (dénommés ARS, ou Auction Rate Securities) en les présentant comme des équivalents de SICAV monétaires. Ces ARS sont assorties d’un rendement canon qui aurait dû éveiller la méfiance des souscripteurs… mais aucun prétendu "véhicule monétaire dynamique" ne semblait trop beau pour être vrai 18 mois auparavant.
Les ARS sont le plus souvent des obligations émises par des municipalités (nombre d’entre elles sont en faillite suite à la déconfiture des monoliners) ou des organismes de prêts étudiants (le plus célèbre d’entre eux étant Sallie Mae) dont les taux d’intérêts sont réévalués toutes les cinq semaines via un système d’enchères. Avec l’actuelle crise de liquidité, les rendements se sont envolés mais les défauts de paiement suivent la même pente. Pour les détenteurs malchanceux des mauvais papiers, la perte équivaut à 90%, voire 100% de la mise initiale !
UBS n’est certes pas la seule banque à être soupçonnée d’avoir dissimulé à sa clientèle le risque inhérent aux ARS. Mais le procureur général de New York s’était jusqu’à présent contenté de diligenter des demandes d’information auprès d’établissements tels que Citigroup, J.P. Morgan, Merrill Lynch ou Goldman Sachs. La mise en accusation dont fait l’objet le numéro un helvétique suite au dépôt d’une plainte collective — et alors qu’un total de 50 000 clients seraient concernés, dont 7 000 recensés dans le seul état de New York — constitue une grande première.
La procédure de recours — et les attendus du jugement — risquent de faire jurisprudence : des dizaines de milliers d’épargnants, s’estimant spoliés, n’hésiteront pas à s’engouffrer dans la brèche.
La question à 100 milliards de dollars est maintenant sur toutes les lèvres : "à qui le tour ?".
Philippe Béchade,
Paris
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