Surperformer le marché est un objectif légitime, mais dans un univers où moins de 4 % des actions génèrent à long terme des rendements supérieurs, la discipline est essentielle.
Il est vrai qu’aucune classe d’actifs n’a surpassé, à long terme, un portefeuille diversifié d’actions. Mais ce n’est pas toute l’histoire.
Permettez-moi d’illustrer mon propos par un exemple…
Dans l’édition d’octobre 2022 de The Oxford Communiqué, j’ai recommandé Novo Nordisk (NYSE : NVO). J’ai alors commencé par poser la question suivante :
« Ne serait-il pas formidable qu’il existe un médicament sûr et efficace pour résoudre la crise de l’obésité ? »
J’ai ensuite expliqué ce qu’est un médicament GLP-1 – inutile d’y revenir ici – et conclu :
« Il s’agit d’une entreprise bien gérée, très rentable, résistante aux récessions, avec un excellent profil de croissance, un nouveau produit à succès et un potentiel de hausse considérable. »
Moins de 22 mois plus tard, nous avons vendu nos actions avec un gain de 123 %. (A titre de comparaison, le S&P 500 – dividendes réinvestis – a progressé de 54 % sur la même période.)
Pour protéger nos profits comme notre capital, nous utilisons des ordres stop suiveurs (trailing stop). Ils garantissent que nous ne laissons jamais filer un gain substantiel et qu’une petite perte ne devienne pas catastrophique.
Comme nul ne peut prévoir combien de temps un marché – ou une action particulière – continuera de progresser, le trailing stop permet de rester investi tant que la tendance reste haussière… ou au moins, stable. Mais si le titre recule d’un certain pourcentage – 25 % dans notre portefeuille Oxford Trading – nous vendons, sans discussion.
Pourquoi ? Parce qu’une baisse des cours reflète généralement les perspectives actuelles et futures de l’entreprise. (Chaque krach commence par un repli modeste.)
Certains investisseurs n’aiment pas les stops. Ils soutiennent qu’ils peuvent vous faire sortir d’une position avant un nouveau rebond, ce qui engendre des regrets. C’est vrai. Mais aucune stratégie d’investissement ne met totalement à l’abri des regrets.
De fait, Novo Nordisk a perdu près de 100 points au cours des 14 derniers mois, sous la pression d’une concurrence féroce d’Eli Lilly et d’autres laboratoires. Aucun membre de The Oxford Communiqué ne regrette donc d’avoir sécurisé un gain de 123 %.
Pourtant, la correction de Novo Nordisk a surpris beaucoup d’investisseurs. Après tout, les médicaments GLP-1 fonctionnent réellement : ils permettent aux patients de perdre environ 20 % de leur poids corporel en relativement peu de temps. Mais le succès attire la concurrence, et celle-ci finit toujours par rogner ventes, bénéfices et marges.
Quand la croissance ralentit, le cours de l’action baisse presque inévitablement.
Et ce phénomène est bien plus fréquent qu’on ne le croit. Selon une étude d’Hendrik Bessembinder, professeur de finance à l’université d’Etat de l’Arizona, parmi plus de 28 000 actions américaines suivies entre 1926 et 2022, près de 59 % ont rapporté moins que les bons du Trésor sur l’ensemble de leur existence.
Alors comment expliquer la performance des indices ? La réponse est surprenante : à très long terme, tous les rendements excédentaires du marché par rapport aux liquidités proviennent de moins de 4 % des entreprises. Autrement dit, 96 % des sociétés cotées offrent à long terme des rendements médiocres, voire mauvais.
Dès lors, les investisseurs avisés n’ont que deux choix :
- l’indexation, qui garantit la détention de ce petit nombre d’actions aux performances exceptionnelles (mais diluées par la diversification) ;
- ou une sélection extrêmement rigoureuse des titres.
Beaucoup d’investisseurs refusent de se contenter du rendement de marché. Ils veulent surperformer. Ce n’est pas illégitime. Mais dans un univers où seule une action sur 25 surperforme vraiment, il faut une discipline infaillible pour protéger ses gains et limiter ses pertes.
Dans le cadre de notre lettre financière, cet outil, ce sont les stops suiveurs.
Ils offrent aussi une protection contre les marchés baissiers violents. En 2008, par exemple, le S&P 500 a chuté de 37 %. Nous avons clôturé toutes les positions de notre portefeuille de trading cette année-là, avec un gain moyen de 28 %. En temps normal, un tel résultat n’a rien d’exceptionnel. Mais lors d’une année où l’indice perdait 37 % ? Personne ne s’en est plaint !
Et l’histoire montre que 2008 n’était pas un cas extrême : les marchés peuvent rester déprimés bien plus longtemps.
Les actions italiennes ont perdu 78,2 % entre 1959 et 1979. Les actions japonaises ont reculé de 64,3 % entre 1989 et 2009. Les actions norvégiennes ont cédé 74,1 % entre 1958 et 1978. Les actions allemandes ont chuté de 21,5 % entre 1960 et 1980. Et les actions suisses ont perdu 20,9 % entre 1961 et 1991.
Vous vous dites peut-être : « Cela ne peut pas arriver aux Etats-Unis. » Détrompez-vous !
Pendant la Grande Dépression, le marché américain a plongé de 67 % en 13 ans. Il lui a fallu plus de 16 ans pour retrouver son niveau initial.
Certes, les pertes décennales sont rares aux Etats-Unis. Mais elles existent. Au cours des 120 mois achevés en février 2009, le marché a perdu 37,4 %. D’autres périodes de dix ans se sont soldées par des rendements négatifs : jusqu’en septembre 1974, août 1939, juin 1921, octobre 1857 et avril 1842. Les pertes allaient alors de 23 % à 37,3 %, en termes réels, corrigés de l’inflation.
En bref, des baisses prolongées surviennent régulièrement, et certaines actions finissent même par perdre toute leur valeur.
Oui, il vous arrivera de regretter d’avoir été stoppé trop tôt. Mais, à long terme, il est beaucoup plus probable que vous regrettiez de ne pas avoir sécurisé vos gains… ou limité vos pertes.
C’est précisément ce que permettent les stops suiveurs.
1 commentaire
J’ai pratiqué cette méthode il y a vingt ans …..pour finalement l’abandonner. Pourquoi ? Parce qu’en tant que tout petit joueur dans ce grand casino, vous ne disposez ni d’un vrai « temps réel » ni de la profondeur du carnet d’ordres. Par contre votre broker, lui, a tout ça et il ne se prive pas d’en abuser. Vos stops seront déclenchés très souvent, trop souvent, presque systématiquement et rapidement.
Donc le placement du stop est capital, il sera tellement bas pour ne pas être atteint régulièrement, que vous ne gagnerez rien ou pas grand chose, en tout cas pas suffisamment pour le risque encouru.
Le stop suiveur est une fausse bonne idée, s’assurer des fondamentaux de l’action au quotidien avec observation du graphique, c’est une contrainte journalière mais la seule qui permette une stratégie cohérente avec objectif.
Ce n’est intéressant que dans un cas, vous avez déjà atteint votre objectif de profit. Vous placez alors un suiveur qui sauvegarde ce profit et voulez laissez filer.