▪ Comment dit-on « audace », en grec ? Nous non plus, nous n’en avons pas la moindre idée.
Mais le dirigeant des communistes/socialistes, Alexis Tsipras, n’en manque pas. Il a dû entendre le vieux dicton :
« Quand on doit 100 000 $ à sa banque, on ne dort pas de la nuit. Quand on doit un million de dollars à sa banque, c’est le banquier qui ne ferme pas l’oeil ».
Dans la mesure où les Grecs ont des dettes à peu près partout, M. Tsipras s’est dit qu’il pouvait faire un pied-de-nez à ses créditeurs. Il a dit aux Allemands qu’ils étaient pris au piège. Ils n’avaient pas le choix. Ils devaient continuer à faire couler l’argent vers la Grèce. Sinon, les Grecs feraient défaut… ce qui déchaînerait l’enfer dans le reste de l’Europe.
Comment dit-on « ah ouais ? » en allemand ? Cela non plus, nous ne le savons pas. Mais les Allemands ont sans doute un mot pour l’occasion. Une expression qui signifie : « nous allons vous montrer quel crétin vous êtes »…
Dans le cas présent, c’est la Bundesbank qui s’est exprimée. Concernant la possibilité d’un départ grec :
« Les défis que cela créerait pour la Zone euro et l’Allemagne seraient considérables mais faisables avec une gestion de crise prudente ».
Ou, selon les mots de Gerald Ford face à la demande de prêt de la ville de New York : « allez vous faire voir ».
▪ Concrètement, que signifierait un départ de la Grèce ?
Il semblerait toutefois que les choses sont en train de se régler. Les Grecs pourraient partir… ou être éjectés de l’euro.
Bloomberg continue :
« La Grèce n’aura peut-être qu’une fenêtre d’opportunité de 46 heures si elle devait planifier son départ de l’euro ».
« C’est le temps qu’auraient probablement les dirigeants du pays pour mettre en place une sortie de la monnaie unique pendant que les marchés sont en grande majorité fermés, de la fin des cotations à New York le vendredi jusqu’à l’ouverture, le lundi, du marché à Wellington en Nouvelle-Zélande, selon la synthèse de scénarios d’euro-sortie élaborés par 21 économistes, analystes et universitaires ».
Mais changer de devises n’est pas chose facile. Bloomberg continue :
« Il serait sans doute nécessaire de fermer les frontières afin d’empêcher les Grecs de passer des euros en contrebande pour les entasser dans des banques à l’étranger. Mais avec des centaines de kilomètres à parcourir, situés en grande partie dans des montagnes inaccessibles, des bois et du maquis, les forces de l’ordre auraient fort à faire ».
« Parallèlement, la police devrait probablement gérer une augmentation notable des troubles sociaux, et peut-être plus de violence politique et criminelle. Il y a déjà eu des exemples isolés d’Allemands — ou de personnes que l’on soupçonnait d’être allemandes — ayant été agressés apparemment en représailles de l’austérité imposée par l’Union européenne ».
« Les dirigeants grecs pourraient décider de déployer l’armée dans les rues dans une tentative de rassurer la population et ramener le calme. Mais cela pourrait semer une profonde discorde »…
▪ On n’agit pas toujours dans son propre intérêt
Les commentateurs insistent sur le fait qu’il serait contre l’intérêt allemand de bouter les Grecs hors de l’euro. L’un d’entre eux affirme que l’Allemagne « se tirerait un balle dans le pied », voire dans la tête. Un autre déclare qu’il en coûterait la bagatelle de 1 000 milliards de dollars, selon un article du Telegraph :
« Le gouvernement britannique s’est lancé dans des préparations urgentes pour gérer les conséquences d’une sortie possible de la Grèce, après que le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Sir Mervyn King, a prévenu que l’Europe ‘était en train de se déchirer’. »
« Des bruits provenant d’Athènes, selon lesquels des sommes massives sont en train de quitter le pays, ont intensifié les inquiétudes, à Londres, concernant l’impact d’un éclatement de la Zone euro sur une économie britannique prise dans une récession en double creux. Selon une estimation, une sortie ‘désordonnée’ de la Grèce reviendrait à 1 000 milliards de dollars pour l’Eurozone, soit 5% de la production ».
La séparation serait fort coûteuse. Mais l’argent n’est pas tout. Les gens commettent de mauvaises actions pour de l’argent, c’est vrai. Mais ils font pire en dépit de l’argent.
En quoi la Première Guerre mondiale était-elle profitable ? Et la « solution finale » d’Hitler ? Et l’extermination des Arméniens ?
On pourrait y trouver un motif financier… mais peu de meurtriers de masse ont le bilan comptable en tête.
Il y a des choses plus importantes que l’argent. La fierté nationale en fait partie. Voilà ce que nous en pensons : vient un moment où les gens arrêtent de compter les coûts. Ils « perdent la tête »… et commencent à faire des choses qui ne profitent pas vraiment à qui que ce soit, financièrement parlant. Peu importe dans ce cas-là qu’il semble « sensé » de virer la Grèce du système monétaire européen ou pas.
Les Grecs y étaient encore à l’heure où nous écrivons ces lignes. Mais tout peut arriver. A ce stade, les Allemands pourraient préférer perdre un orteil ou deux pour se débarrasser d’eux.
2 commentaires
Bonjour,
il y a une chose sur laquelle je ne suis pas d’accord, les choses dites plus importantes que l’argent:
Elle le sont pour les naif, les crédules et autres qualificatifs du même acabit
Le grand capital est apatride, seul l’argent compte et ne s’attache aux vertus de certains pays que dans un but de faire croire au change. sans plus.
Les grands capitalistes de ce monde se moquent des peuples et de leur condition tout autan que leur dernière chemise; car s’il en était autrement il ferait bon de vivre sur terre en tout lieu.
[…] parution dans la Chronique Agora le 25/05/2012. AKPC_IDS += […]