Les Etats-Unis ont échappé à un astéroïde. Ils ont frôlé une Dépression. Ils ont évité de justesse l’Apocalypse maya. Mais vendredi, le « séquestre » a heurté Planet America de plein fouet.
Jeudi dernier, le Dow Jones s’était lancé vers des sommets historiques, en se basant sur deux raisons :
D’abord, l’immobilier américain semble connaître une vraie reprise.
Ensuite, un boom des actions avait été annoncé par Ben Bernanke. Il continuera à imprimer, a-t-il dit au Sénat US, contre vents et marées.
Avec la Fed derrière eux, les haussiers étaient certains que le Dow toucherait un nouveau record la semaine dernière. Ca n’a pas été le cas. En fait, il a même reculé. L’or aussi… ajoutant à la confusion.
Pourquoi ?
Lorsque le Congrès US a passé le Budget Control Act de 2011, il n’a fait que balayer le problème du déficit budgétaire sous le tapis… jusqu’au 1er mars 2013. C’est à ce moment-là que le terrible « séquestre » était censé se produire. Des coupes automatiques dans le budget gouvernemental étaient censées se déclencher… court-circuitant la « demande » pour certains services publics et privés.
▪ C’est la fin du monde !
A en croire certains membres de la presse et du gouvernement, ce séquestre sera la fin du monde tel que nous le connaissons. Les autorités n’auront plus l’argent pour les bases élémentaires de la vie civilisée. Les frontières seront ouvertes à tous vents… des terroristes lanceront un assaut sur Washington… les seniors mourront par centaines dans les hôpitaux… on abandonnera les recherches contre les maladies graves… les soldats ne seront plus nourris…
… et pire encore, l’Apocalypse Zombie commencera… avec des millions de zombies marchant sur Washington en quête de l’argent qu’ils n’ont jamais gagné.
Bien sûr, vous savez que ce sont des sottises. Mais vous ne réalisez peut-être pas à quel point c’est absurde. Même avec le séquestre, les dépenses gouvernementales continuent de grimper. La différence entre le budget séquestré et le budget non-séquestré est minime.
Pour Krugman, Bernanke, Stiglitz et les autres, le pire qui puisse arriver à une économie est une baisse de la « demande ». Et c’est exactement ce qu’ils voient arriver en ce moment !
Le séquestre réduit la « demande » provenant du gouvernement fédéral. Mais c’est une bonne chose. Quand la Dépression de 1920-1921 a frappé, les présidents Warren Harding et Calvin Coolidge n’avaient pas de Prix Nobel d’économie néo-keynésien pour les aider. Ils ont donc dû faire appel au bon sens. Ils ont simplement réduit le fardeau du gouvernement — réduisant les taxes et coupant (le fameux séquestre) les dépenses gouvernementales. Résultat ? La Dépression s’est terminée en deux ans. Le plein emploi est revenu. Le PIB est reparti à la hausse.
Aujourd’hui, les économistes sont convaincus d’en savoir plus. Ils pensent que le « séquestre » signifie moins de demande. Et moins de demande, c’est mal.
▪ Le Japon, une illustration
Parallèlement, sur la une du Wall Street Journal de vendredi, on trouvait encore un raisonnement erroné. Description du problème économique du Japon :
« … l’économie du pays stagne parce que les prix sont coincés aux niveaux des années 80 ».
Pardon ?
Les prix sont « coincés ». Est-ce différent de dire que les prix sont stables ? Non. Au Japon, les prix à la consommation sont à peu près les mêmes aujourd’hui que ce qu’ils étaient il y a 30 ans. Selon les sages du Wall Street Journal, ça aussi, c’est mauvais ; ça provoque une stagnation économique. Pourquoi ? Parce que ça réduit la demande !
Oh, cher lecteur… seule une personne qui a étudié l’économie pourrait croire une chose aussi sotte. Aux Etats-Unis, en particulier, les professionnels de l’économie se sont mis dans la panade. Ils pensent que ce qui compte vraiment, c’est la « demande » — et que la hausse des prix l’encourage. Ils croient aussi que le rôle des politiques consiste essentiellement à gérer la demande.
Lorsque les prix grimpent, les gens ne veulent pas épargner… et ne veulent pas attendre. Ils savent que la meilleure affaire, c’est tout de suite. Donc ils dépensent. La demande augmente.
La hausse des prix trompe aussi les investisseurs et les ménages de l’autre côté de l’équation. Ils voient leurs investissements grimper. Ils voient leurs revenus grimper. Ils pensent pouvoir dépenser plus. La demande augmente.
Quiconque y réfléchit sérieusement sait qu’il y a plus, dans une bonne économie, que simplement de la demande. Ce ne sont pas les dépenses qui font une économie saine. C’est l’épargne. La construction de capitaux. Et l’utilisation de ces capitaux pour faire des profits et payer des salaires. La demande, c’est ce qu’on obtient en résultat de l’épargne et de l’investissement… pas le contraire. Il n’y a pas de vraie demande, en d’autres termes, tant qu’on n’a pas de richesse. La richesse permet de dépenser. La vraie demande grimpe.
Quand on essaie de faire grimper la demande sans ajouter de vraie richesse, on ne fait que perdre son temps. Pire, on trompe tous ceux qui sont dans l’économie, et on leur fait faire des erreurs.
Ce qui nous ramène aux prix « coincés ». Des prix stables, c’est une bonne chose. Cela permet de voir facilement où l’on est et où l’on va. Si par exemple votre revenu est « coincé » et votre richesse est « coincée »… alors vous devriez être coincé vous aussi. Dépenser encore plus d’argent que vous n’avez pas n’est pas une manière de vous décoincer.
Le séquestre ? Allez-y !