Les grands projets européens de Macron ont été très mollement accueillis. Ils passent à côté de l’essentiel : les problèmes financiers.
La communion béate entre Emmanuel Macron et Angela Merkel affichée à Aix-la-Chapelle le 22 janvier n’aura pas fait long feu. [Lien vers LCA du mardi 19 mars à créer]
Dans une tribune publiée le 5 mars et relayée dans tous les pays de l’Union européenne, le président français a appelé à « une renaissance européenne ». Qu’est-ce qu’Emmanuel Macron entend par là ?
Un technocrate français, ça dirige énormément
Depuis 2004, date à laquelle il est sorti de l’ENA, Emmanuel Macron détient la vérité universelle. Il n’y a donc rien de plus naturel à ce qu’il explique à ses partenaires européens ce qui est bon pour eux.
Cela est d’autant plus facile pour lui qu’à l’instar de la grande majorité du personnel politique français, le président vit dans un monde binaire fait de gentils et de méchants, à savoir de « progressistes européens » et de « nationalistes » visiblement inqualifiables, comme en atteste le clip de campagne de LREM pour les élections européennes du 26 mai prochain.
Bref, si vous n’êtes pas d’accord avec Emmanuel Macron, alors les océans se retrouveront encore plus pollués de déchets plastiques et vous aurez intérêt à mettre votre garde-robe à jour en prévision du grand retour en vogue de la chemise noire.
Sa mentalité manichéenne ainsi posée, que propose Emmanuel Macron dans sa lettre aux Européens ?
Tribune de Macron : une « renaissance européenne » qui manque de souffle
Olivier Maurice, sur Contrepoints, résume le sombre tableau dressé par le président :
« Outre la menace nationaliste, c’est un monde bien anxiogène que décrit notre président : celui du retour au passé, à la guerre et à la ruine, celui des stratégies agressives des grandes puissances, des ingérences des géants du numérique, des crises du capitalisme financier, de la fin de la civilisation européenne… tout l’arsenal des épouvantails de droite et de gauche y passe. »
Autant dire que cette tribune n’a pas été rédigée en mode « culture de la gagne », registre auquel nous avait pourtant habitué Emmanuel Macron lors de sa campagne pour la présidentielle.
Pour défendre l’intégration européenne, le président ne semble rien avoir de rien de mieux à nous proposer que le recyclage poussif d’éléments de langage éculés…
On peut cependant partager certains constats dressés par le président. Mais on ne peut que déplorer l’absence totale de souffle au niveau de l’ensemble du texte, ainsi que le défaut de références concrètes relativement aux grands problèmes financiers qui menacent l’Europe, bien plus que le Brexit ou les « pesticides »…
Je me permets de vous en rappeler quelques-uns : le fait que quelques dizaines de technocrates décident des taux sur le marché obligataire à l’échelle d’un continent entier, les déséquilibres gargantuesques des balances TARGET2, ou encore les monceaux de créances douteuses incrustés dans les bilans du secteur bancaire européen.
[NDLR : Pour suivre le développement de tous ces points noirs et surtout éviter que votre patrimoine n’en fasse les frais, faites confiance à ce 11ème homme – voyez ici ce qu’il vous recommande.]
Quelques références de ce genre auraient sans doute permis à Emmanuel Macron de voir ses propositions prises un peu plus au sérieux par ses confrères européens, comme nous le verrons plus loin.
Les solutions proposées par le président sont-elles cependant à la hauteur des enjeux ?
Pour une extension européenne du domaine de la bidulocratie française
Florilège :
« Agence européenne de protection des démocraties… bannir d’Internet, par des règles européennes, tous les discours de haine et de violence… police des frontières commune et un office européen de l’asile… Conseil européen de sécurité intérieure… sanctionner ou interdire en Europe les entreprises qui portent atteinte à nos intérêts stratégiques… bouclier social… salaire minimum européen… prendre la tête du combat écologique… »
Bref, il s’agit ni plus ni moins que de reproduire au niveau communautaire le schéma français des comités Théodule, ces bidules étatiques dont l’absence de légitimité est à la hauteur de l’inutilité.
Rien d’étonnant, venant de la part d’un indécrottable dirigiste centralisateur qui a une fâcheuse tendance à prendre les problèmes par le petit bout de la lorgnette. Sauf lorsqu’il s’agit bien sûr de défendre ses intérêts bien compris.
On en vient à se demander si Macron, ça ne serait pas du Hollande bis…
… ou peut-être plutôt du Sarkozy bis, vu qu’Emmanuel Macron, c’est aussi parfois des punchlines qui claquent et qui résonnent, sans aucune action d’envergure par la suite. D’ailleurs, l’ancien président n’a-t-il pas lui-même déclaré :
Macron, bébé-Hollande ou bébé-Sarkozy ? A vrai dire peu importe, puisque dans les deux cas on reste sur du blabla qui tient lieu de réalité ou qui a, au mieux, une vocation purement incantatoire.
Une Europe indifférente, voire hostile, à la vision macronienne de l’intégration européenne
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la voix de la France n’a pas soulevé l’enthousiasme – ni dans les rédactions des médias des 27 autres Etats membres de l’Union ni auprès de leurs chefs d’Etat.
Réinventer la roue ? Les propositions de réformes de l’UE de Macron obtiennent un soutien mitigé…
« Le gouvernement allemand soutient les discussions engagées au sujet de la direction de l’Union européenne », a déclaré à chaud un porte-parole du gouvernement allemand, sans donner plus de détails.
Mais au grand désarroi d’Emmanuel Macron, les détails ont fini par arriver quatre jours plus tard, comme nous le verrons très bientôt…