La présidence de Joe Biden devrait lancer de nouvelles tendances économiques – notamment dans les domaines de la santé, de la politique commerciale et des relations entre les marchés et le pouvoir.
Nous continuons notre analyse des cinq principaux boosters à surveiller sous l’administration Biden – à commencer par l’impression monétaire immodérée et le secteur des énergies vertes, que nous avons abordés hier.
En ce qui concerne les changements suscités par les renouvelables, on accordera plus d’importance à des secteurs comme le ferroviaire, l’aviation, le transport de fret, l’eau ou encore l’internet haut débit. Wall Street et les grandes entreprises l’ont compris. Voilà pourquoi ils investissent des capitaux dans ces secteurs.
A l’époque où il était vice-président, Biden a supervisé la mise en œuvre de la loi « American Recovery and Reinvestment Act », qui a consacré plus de 800 Mds$ aux dépenses d’infrastructure et de relance.
A l’avenir, attendez-vous à ce qu’un schéma semblable se déroule, dans un contexte où les discussions autour de nouvelles mesures face au Covid-19 gagneront du terrain.
1. Le chantier de reconstruction de la politique commerciale
D’abord, la politique commerciale n’est pas quelque chose qui change rapidement, du jour au lendemain. Le commerce international se forge autour d’un historique bilatéral, de relations diplomatiques, d’intérêts économiques et nationaux.
Biden le comprend, dans la mesure où il a travaillé au gouvernement pendant des dizaines d’années. Voilà pourquoi au cours de sa campagne électorale, il a indiqué clairement que, même s’il n’était pas Trump, il n’envisageait pas de remanier totalement les politiques protectionnistes de ce dernier.
A une période où les politiques nationales et les mesures face au Covid-19 sont essentielles, « Buy American » (« achetez américain »), l’initiative de Biden, est un thème sur lequel les deux partis sont d’accord.
Attendez-vous à ce que ce message joue un rôle crucial au cours des mois et années à venir, en matière de gouvernement.
Dans le domaine de la politique commerciale, la Chine représente un élément épineux.
Le gouvernement Trump a déclenché une guerre commerciale avec la Chine et, bien qu’on l’ait un peu oubliée dans un contexte où toute l’attention se concentrait sur la pandémie mondiale, elle a discrètement poursuivi son escalade.
Selon certains rapports, Trump pourrait partir en laissant en cadeau d’adieu des mesures intransigeantes ciblant la Chine et centrées sur des sanctions visant des entreprises liées à l’armée chinoise, aux camps de travail, aux technologies, etc.
Ces mesures pourraient être difficiles à inverser, pour le futur gouvernement Biden, même si le ton de Biden est plus feutré.
En dehors de la politique relative à la Chine, le gouvernement Biden pourrait faire intervenir un changement de discours à l’égard des autres partenaires commerciaux.
Attendez-vous à ce que la machine diplomatique américaine opère un dégel des relations avec l’Europe et l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Cela pourrait impliquer une baisse des tarifs douaniers appliqués sur les importations d’acier et d’aluminium provenant de pays alliés, ce qui pourrait signifier un boom potentiel dans ces secteurs.
2. La santé et les mesures face au Covid-19
Il est vrai que, quel que soit le locataire de la Maison Blanche, ce type de pandémie mondiale est inédit dans notre société contemporaine.
Le coronavirus se soucie peu des partis politiques, d’ailleurs, et des mesures doivent être déployées sur le plan médical, économique et pour circonscrire le virus.
La question devient alors la suivante : en quoi un gouvernement Biden peut-il se différencier d’un gouvernement Trump face aux difficultés économiques et sanitaires ?
Même si plusieurs changements de politique pourraient intervenir, nous nous focalisons ici sur ceux qui ont une dimension stratégique susceptible d’affecter les investisseurs, les entreprises et votre bien-être.
D’abord, attendez-vous à ce qu’un gouvernement Biden renforce les mesures sanitaires en matière de campagnes de test à grande échelle (axées sur les tests fait chez soi), la production et la distribution de vaccins, et que plus d’importance soit accordée aux aides destinées aux fournisseurs de soins médicaux.
Comme l’a indiqué Bloomberg, cela pourrait signifier que Biden va mener une démarche visant à « financer totalement le National Disaster Medical System, et étendre son autorité, afin de rembourser aux fournisseurs de traitements du Covid-19 les coûts qui ne sont pas directement pris en charge par l’assurance santé ».
Ce serait un soulagement bien nécessaire pour les fournisseurs de soins et le secteur de l’assurance santé dont les revenus ont été particulièrement frappés dans un contexte où des interventions chirurgicales, des visites et des consultations ont été suspendues.
Pour les investisseurs, cela veut dire que, non seulement les grands laboratoires pharmaceutiques impliqués dans la recherche et la production de vaccins vont voir leurs activités exploser, mais que les fournisseurs de soins pourraient également rebondir.
3. Wall Street devient « bleu »
A l’approche des élections du 3 novembre, Wall Street a penché vers Joe Biden.
Le secteur des titres et de l’investissement a donné près de 75 M$ à Biden, par rapport aux 18 M$ attribués – selon les estimations – à la campagne de réélection de Trump.
Certains des acteurs les plus influents et fortunés de Wall Street ont afflué sur la campagne de Biden. Les dirigeants d’institutions telles que Blackstone, JPMorgan Chase et The Carlyle Group ont tous contribué dans de vastes proportions.
Alors, selon Wall Street, qu’est-ce que Biden pourrait signifier, pour ce secteur ? Comme l’ont écrit des analystes de Goldman Sachs :
« Cela relèverait nettement la probabilité d’un train de mesures de relance budgétaire d’au moins 2 000 Mds$… [et] cela correspondrait au moins aux probables augmentations d’impôts sur les entreprises et les plus hauts revenus à plus long terme ».
Si le gouvernement Biden ressemble un tant soit peu à la Maison Blanche du temps d’Obama, attendez-vous à ce que Wall Street « fasse copain-copain » avec un locataire du Bureau ovale qui les comprend et sur qui ils peuvent compter.
Selon les attentes actuelles, Biden nommera dans son cabinet et son gouvernement des gens « à l’état d’esprit modéré » et pas trop clivant. Cela veut dire que ceux qui occuperont des poste clés – favorables aux entreprises – au sein du Trésor et de la SEC (Securities and Exchange Commission) seront probablement centristes plutôt que progressistes ou activistes.
Même si la campagne de Biden a affiché toute une liste de propositions visant Wall Street (y compris des augmentations d’impôt sur les grandes entreprises et les très hauts revenus), attendez-vous à ce qu’un gouvernement divisé et un Sénat républicain bloquent toute tentative dans ce sens.
Comment tirer parti de ces cinq principaux boosters économiques
En vérité, nos marchés financiers sont actuellement dans un état que je qualifie de « distorsion perpétuelle »
La Réserve fédérale a créé des conditions dans lesquelles les marchés se nourrissent de ses décisions concernant la politique monétaire. Cet état de distorsion perpétuelle était déjà installé avant la pandémie, et il s’est solidement ancré lorsque le virus a fait dégringoler l’économie mondiale.
Dans un contexte où le Covid-19 est entré dans une « phase hivernale » et qu’un nouveau gouvernement va intégrer la Maison Blanche, les entreprises cherchent à atténuer les risques.
Cela veut dire qu’elles vont se concentrer encore plus sur la protection des sources de revenu régulières, la réalisation d’économies, et faire en sorte que leurs salariés puissent fonctionner dans un contexte de télétravail.
Il est essentiel d’adopter une stratégie permettant de gérer ces cinq facteurs économiques à la fois.