▪ Les fans du film d’animation de 1995, Toy Story, se souviennent sûrement du moment où Buzz l’Eclair réalise une série d’acrobaties pour tenter de convaincre les autres jouets qu’il sait voler. Mais Woody, le cow-boy, proteste : "je n’appelle pas ça voler ! J’appelle ça… tomber avec panache !"
Les fans du rebond 2009 de Wall Street semblent aussi penser que l’économie américaine peut voler. Mais je n’appelle pas ça voler, chers investisseurs, j’appelle ça tomber avec panache.
"Aéroporté" et "aérodynamique" ne signifient pas la même chose.
Si l’on en croit les économistes les plus importants du pays, l’économie américaine a décollé de la longue piste cabossée de la récession. Mais votre chroniqueur pense que ce vol durera à peine plus longtemps que celui des frères Wright à Kittyhawk, qui n’avait duré que 12 secondes.
Le problème, c’est que le crédit du gouvernement est un mauvais carburant. Seuls les capitaux privés peuvent alimenter les vols long-courriers. Une économie peut être aéroportée par les efforts gouvernementaux pendant un temps. Mais ces vols de plaisance finissent presque toujours très vite… et très mal… à moins que les capitaux privés ne reviennent s’en mêler.
▪ Jusqu’à maintenant, les capitaux privés se sont montrés peu enclins à réinvestir dans quoi que ce soit de plus risqué que les bons du Trésor américain. Les financements restent difficiles à trouver pour la plupart des PME qui représentent le coeur et l’âme de l’économie américaine. Pendant ce temps, nombre des indicateurs les plus visibles de la vitalité de l’économie restent au plus bas.
Etant donné que les capitaux privés sont manifestement absents de l’économie et que les plans de relance du gouvernement sont — de notoriété publique — inefficaces, l’économie américaine va devoir continuer à lutter pour garder la tête hors de l’eau.
Le graphique ci-dessous montre que l’indice ISM du secteur des services est un peu remonté ces derniers temps. Apparemment, cette partie de l’économie a pris un peu d’altitude. Mais n’oubliez pas qu’aéroporté ne signifie pas aérodynamique.
▪ "Si c’est bien une reprise que nous vivons en ce moment, elle n’a rien de solide", a déclaré Kevin Harrington, directeur de gestion du groupe de fonds de couverture, Clarium Capital Management LLC. "Elle ressemble plus à une rampe de saut à ski, avec une relance de court terme créant une bosse qui, au final, mène à un précipice".
Paul Tudor Jones, l’un des gestionnaires de fonds de couverture les plus prospères des Etats-Unis, tient le même discours. Il ne fait pas confiance au gros rebond de Wall Street de cette année, qui a fait monter les principaux indices de 50% ou plus. C’était seulement un "rebond de marché baissier", a déclaré Tudor dans sa lettre du 4 août, adressée aux clients de son fonds. Ce qui est intéressant, c’est que tous les principaux indices de la bourse américaine n’ont pas bougé depuis le 4 août.
Cette récente performance déplorable ne prouve pas que Tudor a raison, mais elle prouve qu’il n’a pas tort… du moins pas encore. En d’autres termes, son point de vue baissier n’est peut-être pas juste, mais il est probablement justifié.
Ces marchés qui montent depuis les six derniers mois — et dont Abby Joseph Cohen, le robot stratégiste haussier de chez Goldman Sachs, dit qu’ils vont continuer à monter — sont ceux-là mêmes qui pourraient commencer à baisser… simplement parce que les réalités économiques sous-jacentes ne peuvent pas soutenir une hausse du prix des actions.
Il ne faut pas vendre toutes les actions, bien évidemment. Certains types d’actions valent même certainement le coup d’être achetées en ce moment… à condition de savoir lesquelles !