▪ Ceci est la dernière partie de notre série sur la « théorie du gouvernement« . Nous avons commencé en nous demandant pourquoi certaines personnes pouvaient donner des ordres à d’autres…
Nous ne parlons pas des relations mari/femme, ni employé/employeur. Dans de tels cas, les ordres sont légitimes. Les maris l’ont bien cherché. Et les employés peuvent partir s’ils le souhaitent.
Non, nous parlons des gens qui ont le droit — au nom de la loi — de dire aux autres quoi faire. Les agents de sécurité dans les aéroports… les policiers… les inspecteurs des travaux… les douaniers… les employés du fisc…
C’est assez remarquable, ne trouvez-vous pas, cher lecteur ? Il est écrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit ». L’égalité aux yeux de la loi est censée régner. Pourtant, certaines personnes sont de toute évidence au-dessus des lois… d’autres donnent des ordres à de complets étrangers… et certaines affirment même avoir le droit de faire les lois à leur guise.
Il y a des lois qui vous disent de ne pas tuer… et de ne pas voler. Il y a eu les Dix Commandements, par exemple. Mais les gens qui travaillent dans toutes les administrations de la planète y ont ajouté 10 000 commandements supplémentaires. « Tu feras ceci » et « tu ne feras point cela ». C’est tout juste si on peut aller aux toilettes ou forer un puits de pétrole sans demander la permission d’une dizaine de bureaucraties différentes. « Nul n’est censé ignorer la loi », vous dira-t-on si vous plaidez l’ignorance. Sauf qu’il y a tant de lois, règles, réglementations, édits, commandements, interdictions, prohibitions, injonctions, exigences et obligations qu’on ne peut qu’en manquer un ou deux.
▪ La dernière loi en date dans le cadre de la Defense Authorization Bill, qui vient d’être approuvée par le Congrès US, montre jusqu’où les législateurs sont prêts à aller. La doctrine de l’habeas corpus précède la signature de la Magna Carta en 1215. Il s’agissait d’une antique loi anglo-saxonne limitant le pouvoir du gouvernement. Si les autorités détenaient un prisonnier, l’habeas corpus exigeait qu’elles « produisent le corps ». Le gouvernement devait soit relâcher la personne, soit l’accuser d’un crime. Pendant 800 ans, cela a fourni aux gens une forme de protection contre le gouvernement.
Aujourd’hui, en l’an de grâce 2011, le Congrès des Etats-Unis d’Amérique, avec la complicité du président lui-même, a décidé de refuser le droit d’habeas corpus aux Américains. Désormais, les autorités US peuvent s’emparer de leurs citoyens, les mettre en prison et leur faire subir le supplice de la baignoire pour le reste de leur vie. Inutile de les accuser de meurtre, d’avoir traversé au rouge ou tout autre crime. Pas la peine de les laisser parler à un avocat. Ou à leur conjoint. Ou à leur représentant du Congrès… Inutile de leur lire leurs droits ou de fournir des preuves contre eux. Comme les Argentins dans les années 80, les autorités américaines peuvent simplement faire « disparaître » leurs citoyens.
Notre question, c’est : « qu’est-ce qui leur en donne le droit ? » Quel pain mangent ces gens ? Quel air respirent-ils ?
Nous avons vu les théories. Nous avons également vu la pratique. Les rois de « droit divin ». Le « contrat social ». « Le plus grand bien pour le plus grand nombre ».
Leur point commun, à tous, c’est que ce ne sont pas des théories, mais des excuses. L’un prétend connaître les plans de Dieu lui-même. Un autre imagine que les masses impuissantes sont d’accord pour être dirigées. Un autre encore fait semblant que c’est pour leur bien.
Certaines des excuses sont peu plausibles, voire carrément incroyables. D’autres sont absurdes. Les « théories » n’ont aucun sens. Mais les faits sont indéniables. Et le fait est qu’il y a des toujours des gens prêts à diriger les autres, et capables de le faire. Certains dirigeants — les insiders — sont plus intelligents que d’autres. Certains sont plus agréables. Au cours du temps, on en voit de toutes sortes. Leur but est toujours le même — prendre le pouvoir et la richesse des outsiders. En quelle quantité ? Autant qu’ils le peuvent sans avoir de problèmes.
Vous pourriez par exemple vous demander comment il se fait que tous les gouvernements des pays développés se retrouvent ainsi submergés de dettes. Les impôts globaux, les dépenses et l’endettement sont à peu près similaires dans tous les pays de l’OCDE. Et les niveaux d’imposition de manière générale sont environ 10 fois supérieurs à ce qu’ils étaient au siècle dernier. Quant aux formes de gouvernements, elles sont à peu près identiques elles aussi — même si les insiders prétendent avoir des idées bien différentes sur la manière de gouverner.
Que s’est-il passé ?
Le génie de la démocratie moderne, c’est qu’il rend le citoyen partie prenante de sa propre servitude. Plutôt que de remettre 10% de sa production à son seigneur et maître féodal, il en abandonne entre 30% et 50% à ses patrons élus démocratiquement. Ils lui disent quoi faire… et il croit que c’est lui qui donne les ordres !
Il pense ensuite avoir trouvé la meilleure forme de gouvernement au monde. Elle est si excellente, d’après lui… qu’il se hâte de contraindre les autres à l’appliquer aussi.
4 commentaires
Merci pour cet excellent article qui me rappelle « la république » de Platon et notamment le chapitre dédié à la démocratie…
« . C’est tout juste si on peut aller aux toilettes ou forer un puits de pétrole sans demander la permission d’une dizaine de bureaucraties différentes. »
Si ces gouvernements que vous semblez haïr agissaient pour l’intérêt général, nous n’aurions pas les ennuis suivants, générés par la « libre entreprise », plus justement nommée « folle entreprise » :
– Réchauffement climatique.
– disparition de la biodiversité
– acidification des océans par le CO2
– empoisonnement des rivières et des nappes phréatiques
– amenuisement des surfaces cultivables
– Génèse d’une monstrueuse industrie de la dette, y aliénant efficacement Etats, entreprises, collectivités et particuliers
J’en oublie.
Nous ne sommes toujours pas sortis de la pulsion animale de dominance, laquelle s’adapte aux circonstances :
– Loi de la jungle « naturelle » en territoire de libre entreprise, où les gouvernements représentent en fait l’industrie du profit maximal
– Dominance par aliénation idéologique en territoire « idéologisé » (marxisme soviétique, par exemple).
Ce petit commentaire ne cherche pas à convaincre, il n’y parviendrait pas, mais à montrer que d’autres façons de voir existent.
Amicalement,
Delphin (lecteur occasionnel des opposés, maintenant décédés, Teddy et Jimmy Goldsmith, pas si opposés que ça finalement, la maladie ayant rendu le second moins absolu)
Un imbécile a dit : « Nul n’est censé ignorer la loi »
-Un intelligent et cultivé lui a répondu: » A l’impossible, nul n’est tenu ! «
Effectivement depuis Platon et même bien avant la notion de gouvernement et de bon gouvernement s’est posée. Platon attribuait comme rôle essentiel au gouvernement la fourniture de biens immatériels dont les deux essentiels étaient la justice et l’éducation.
On peut aussi parler de sécurité, stabilité, paix.
Les romains avaient pour clé de leur politique la « Pax Romana ». Ils savaient bien que c’était une condition essentielle à la prospérité de leur société et son développement.
Les entreprises se plaignent de l’instabilité des lois françaises et que cela nuit à leur développement.
L’économie est consommatrice de biens immatériels qui lui sont nécessaires et que seul un « bon » gouvernement ou un état, ou un pouvoir qui pourrait être de type monarchique par exemple peut fournir.
Quand on parle de pouvoir divin ou d’origine divine cela peut être évidemment une manipulation.
Mais on peut voir aussi que les fondements essentiels comme la justice correspondent à des valeurs atemporelles et supra humaines. La justice n’est pas un état naturel comme peut l’être le combat pour la survie et la loi du plus fort. Elle correspond à des principes et des valeurs idéales que l’homme se donne pour fonder une société meilleure et plus proche de ses aspirations supérieures.