Par Isabelle Mouilleseaux (*)
Le sucre nous fait voir la vie en rose…
Première chose à savoir, le sucre a été "relativement épargné" par la crise, comparé aux autres matières premières qui ont perdu entre 50 et 70% de leur valeur. Mais surtout, il nous gratifie d’une très belle remontée depuis le début de l’année, s’adjugeant quelque 45%.
Pourquoi ce retour en force du sucre sur le devant de la scène ? Epluchons les fondamentaux…
La demande croît plus que de raison
Et pour une fois, ce n’est pas du fait de la Chine ! Non. Les tensions viennent d’Inde. A force d’encourager ses producteurs à favoriser les céréales, voilà qu’ils ne produisent plus assez de sucre, réallocations des terres obligent…
L’Inde est le second plus gros producteur de sucre au monde derrière le Brésil. Habituellement, le pays est exportateur net de sucre. Mais cette année, sa production de sucre devrait être en chute de 44% par rapport à l’an dernier. Enorme… Déjà en 2008, la production avait chuté de 20% pour cause de sécheresse de mémoire. Le stock indien est donc plus qu’étroit.
En conséquence, l’Inde devrait devenir importatrice de quelque deux millions de tonnes. D’ailleurs, elle a levé ses droits de douane à l’import pour faciliter les entrées de sucre sur son territoire.
Pour une vision plus globale, la demande mondiale de sucre est encore et toujours en hausse. L’Organisation internationale du sucre (ISO) s’attend pour 2009 à une hausse de la demande de 2,4%.
L’offre est en repli
Ainsi, l’Europe "aggrave" la situation. En effet, depuis 2006, l’Union réduit volontairement sa production de sucre qui a déjà diminué de plus de 30%. Sa production n’est donc plus que de 12 millions de tonnes. Anciennement exportateur net, l’Union importe aujourd’hui 25% de ses besoins en sucre.
Au niveau global, l’ISO s’attend pour 2009 à une baisse de l’offre mondiale de 3,8%.
Le Brésil : rôle tampon
La bonne nouvelle vient du Brésil, plus gros producteur mondial, avec une légère hausse attendue de sa production cette année.
Actuellement, 45% de sa production est destinée à l’alimentation, 55% à l’éthanol. Je vous rappelle qu’au Brésil 90% des voitures roulent à l’éthanol. Toute la question est donc de savoir quelle va être cette année la répartition de sa production entre alimentaire et éthanol.
Le Brésil a une certaine "marge de manoeuvre" pour alimenter le marché international en sucre. Cette marge étant très corrélée au prix du brut — dont le prix de l’éthanol dépend.
Avec une chute de 60% du prix du brut d’un côté, et avec le rebond impressionnant du cours du sucre alimentaire de l’autre, les agriculteurs pourraient avoir moins intérêt à vendre leur production à l’industrie du biocarburant. Donc à alimenter le marché international du sucre. Affaire à suivre…
Retenez juste que le rôle du Brésil est essentiel.
Un marché cette année déficitaire
Conséquence de la baisse de l’offre et de la hausse de la demande : le marché jusqu’ici excédentaire deviendrait déficitaire. L’Organisation internationale du sucre chiffre le déficit potentiel à 4,9 millions de tonnes. Certains analystes le chiffre jusqu’à huit millions de tonnes. Alors forcément, les prix montent…
[NDLR : Et pour profiter de la hausse du sucre — et des matières premières les plus profitables –, il suffit de faire confiance à un expert : suivez le guide…]
Mais il y a d’autres facteurs de hausse :
Le brut tire le sucre
Vous savez à quel point les softs sont aujourd’hui corrélés au cours du pétrole. C’est le cas du soja, du maïs, ou encore du sucre, qui permettent de produire des biocarburants. Le rebond du cours du pétrole, qui est passé de 38 $ à 58 $ pour le WTI en deux mois, a certainement fortement influé le cours du sucre.
Voilà pour les fondamentaux, actuellement haussiers. Nous verrons demain l’analyse de marché…
Meilleures salutations,
Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora
(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières & Devises (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.
L’Edito Matières Premières & Devises est bien plus qu’une chronique quotidienne. C’est un pôle d’activités centré sur les matières premières qui vous donne les moyens de suivre et de maîtriser ces marchés ! Vous pouvez recevoir gratuitement l’Edito Matières Premières & Devises en cliquant ici.