Et si la crise ne se produisait pas comme prévu ? Si, à la place, une reprise vigoureuse se produisait… poussant les autorités à prendre des mesures qui déplaisent aux marchés ? Quand tout est faussé, les bonnes nouvelles deviennent mauvaises…
Avec la fin des aides à l’emploi, les Etats-Unis pourraient enregistrer jusqu’à 300 000 créations de postes supplémentaires par mois au cours du reste de l’année, comme nous l’avons vu vendredi. Cela représenterait alors près d’un million de nouveaux emplois par mois d’ici la fin de l’année – avec un taux de chômage qui tomberait alors au-dessous des 5%.
Comment pensez-vous que les marchés d’actions et d’obligations réagiraient à cette nouvelle ? Comment pensez-vous que Powell et compagnie réagiraient ?
Bien entendu, il se pourrait aussi que les allocations de chômage étendues n’aient eu aucun impact comportemental sur ceux qui les ont reçues. Nous avons vu un certain nombre de notes de recherche qui prétendent que les Etats qui ont mis fin aux prestations plus tôt n’ont vu aucun changement dans leur taux d’emploi.
Qui a tort, qui a raison ? Quel est l’état réel du marché du travail, quelle est la « réserve » réelle ?
Personne ne le sait et personne ne peut le deviner car ceci reste à construire. Le marché du travail futur dépendra des conditions futures de l’économie ! Tout est en interaction, en boucle.
Pic d’exubérance
Indépendamment de ce qui va se passer dans l’économie au cours du reste de l’année, je pense que le marché financier peut avoir sa logique propre selon la croyance qui va s’installer.
Les événements chinois sont clairement déflationnistes au plan économique, mais on entend ici et là des voix pas trop stupides qui nous disent que cela fera comme en 2015 et 2016 : le monde sera obligé de refaire un round de reflation pour éviter la dislocation.
Nous approchons du pic d’exubérance financière. La rotation des liquidités vers les actions et les obligations est alarmante. Les entrées de fonds dans les actions mondiales cette année dépassent 1 000 Mds$ – c’est plus que toutes les 20 dernières années combinées.
Les afflux ont tendance, historiquement, à se produire après la hausse maximum des actions ; en revanche, les sorties s’accélèrent après les baisses. Le volume massif des entrées récentes de capitaux sur les marchés est une donnée importante mais il est difficile d’en deviner l’incidence future.
La plupart des gens craignent qu’un ralentissement de l’économie ne soit le déclencheur d’une liquidation boursière, mais je pense que ce n’est peut-être pas évident : tout dépendra de la croyance du moment.
Quelle correction attendre ?
Les liquidités peuvent être désirables ou non, selon l’humeur spéculative. Tout est réversible. En en particulier, les spéculateurs peuvent se dire qu’un ralentissement garantit le remplissage du légendaire bol de punch et la poursuite de la validité du scénario « Boucles d’or », Goldilocks.
Les corrections peuvent être déclenchées par à peu près n’importe quoi, sauf par les valorisations ; un marché ne corrige jamais parce qu’il est trop cher.
Une accélération de l’économie serait peut-être plus redoutable qu’un ralentissement. Qui sait ? Elle signifierait peut-être une accélération du calendrier de réduction des achats de la Fed ? Je ne pense pas que les actions aimeraient cela…
Ce serait une nouvelle occasion pour Powell de se tromper !
A force de tout détraquer, il n’y a plus d’indicateurs fiables, plus d’anticipations qui marchent ; il n’y a qu’une succession d’errements qui nous mènent… on ne sait plus où.
C’est l’aventure !
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]
1 commentaire
Bonjour Bruno,
Je lis vos articles et les trouve plutôt pertinents.
Je tique sur votre propos « un marché ne corrige jamais parce qu’il est trop cher. » Cela sous-entend-il que le marché du LUXE par exemple ne réévalue pas ses prix parce qu’il y a toujours autant de clients capables de consommer aux prix indécents, qui se disent que plus c’est cher… mieux c’est ?
Il me semble qu’au cours des années passées des discounters notamment dans les produits de luxe ont dû priver les tenants du secteur de chiffre d’affaires.