La paralysie de l’économie française ces deux derniers mois a remis le PIB par habitant à ses niveaux de… 1995 ! Qu’en est-il alors pour votre épargne ?
Le déconfinement hexagonal, à peine entamé, suscite déjà son lot de polémiques.
Hâtif pour les uns, tardif pour les autres, trop large ou trop strict, nécessaire ou dangereux : le débat public est alimenté d’une infinité d’avis contradictoires.
Chacun fera son marché parmi les prédictions des 67 millions de boules de cristal qui parsèment notre pays. Reste que l’étape du 11 mai, même si elle ne signe pas loin s’en faut le retour à notre fonctionnement habituel, marque la fin de deux mois de confinement.
Sans présager de ce que les prochaines semaines nous réservent, nous avons déjà fort à faire pour tirer le bilan de cette parenthèse inouïe. Après avoir navigué dans des eaux inconnues depuis la mi-mars, nous commençons à pouvoir prendre le pouls de l’économie.
Tiraillée entre baisse de l’offre et baisse de la demande, pressions inflationnistes et déflationnistes, diminution des revenus comme des dépenses, il était impossible de prévoir, il y a deux mois, dans quel Etat financier seraient les ménages lors de la levée des restrictions.
Alors que nous disposons désormais de statistiques courant jusqu’à fin avril, l’heure de faire les comptes est venue. La conclusion est sans appel : le confinement nous aura coûté une véritable fortune.
Quand le vocabulaire économique atteint ses limites
Récession ? Dépression ? Les définitions habituelles des soubresauts économiques sont à la peine pour décrire l’ampleur de la baisse d’activité.
Les premières estimations de l’INSEE, qui prévoyaient une contraction de -35 % durant le confinement, étaient remarquablement justes. Lors de leur dernière révision fin avril, c’est finalement le chiffre de -33 % qui a été retenu.
En quelques jours, notre tissu économique est revenu au niveau de création de richesse qu’il avait en 2003. Pour compléter le tableau, il faut corriger ce chiffre de la variation de population : la France comptait moins de 62 millions d’habitant à cette époque. En considérant le PIB/habitant, le confinement nous fait quasiment revenir au niveau de 1995 !En ordonnant le confinement, les dirigeants européens ont fait le pari d’un gel de l’économie violent mais temporaire. Pour éviter faillites en cascade et favoriser une reprise rapide, ils se sont appuyés sur la création monétaire.
Cette diminution de la création de richesse accompagnée d’une si forte augmentation de la quantité de monnaie en circulation est du jamais-vu dans l’histoire de l’humanité. Aucune théorie ne pouvait prédire le comportement des acteurs durant un confinement inédit – et les économistes sont tout aussi démunis lorsqu’il s’agit d’anticiper la reprise.
Le combat monétaire ne fait que commencer
Nous savons désormais que le match entre baisse des revenus et baisse des dépenses a été emporté par le camp des épargnants. Les Français ont mis de côté, durant le premier mois de confinement, plus de 20 Mds€. Sur deux mois, la somme devrait atteindre les 50 Mds€ ; l’OFCE, qui anticipe une sur-épargne jusqu’à la fin de l’été, prévoit que la cagnotte totale pourrait dépasser les 115 Mds€.
Voir les Français privilégier la constitution d’une épargne de précaution plutôt que de faire confiance à la protection de l’Etat en période de crise est une excellente nouvelle. Nos dirigeants impécunieux n’ont pas encore tout à fait transformé leur population en cigales imprévoyantes.
Ces liquidités donneront aux citoyens du pouvoir d’achat supplémentaire et une capacité d’investissement d’autant plus utile que le prix de nombreux actifs est désormais au plancher. Acheter des actions, de l’or et de l’immobilier pourrait être une bonne idée cet été.
Il faudra cependant faire vite.
Un second match, moins médiatique, s’est déroulé en coulisse : celui entre la vraie et la fausse monnaie. Si vous nous lisez de longue date, vous avez déjà en tête les ordres de grandeur : +1 000 Mds€ en Europe, +3 000 Mds$ aux Etats-Unis…
La création monétaire bat son plein depuis le mois de mars et fait passer les QE et autres TARP de la crise des subprime pour de sympathiques expériences monétaires sans importance.
Les gouvernements ont distribué l’argent plus près que jamais des poches des consommateurs. En France, le chômage partiel payé par l’Etat revient à utiliser les fiches de paie comme justification à l’argent-hélicoptère pour les salariés. Les aides versées aux indépendants, elles, sont un passe-plat direct entre les emprunts d’Etat et les poches des consommateurs.
Ne parlons même pas des milliards de prêts garantis par l’Etat octroyés aux entreprises. Celles insolvables les dépenseront sans jamais les rembourser, et celles en bonne santé qui en ont profité par effet d’aubaine ont fait gonfler leur trésorerie sans contrepartie.
Lorsque cette masse monétaire viendra faire gonfler le prix des actifs, n’ayez aucune illusion : les 50 à 100 milliards mis de côté par les épargnants seront une goutte d’eau qui sera noyée dans le tsunami inflationniste.
Plus que jamais, ce sont les banques centrales qui « feront le marché » et non le jeu de l’offre et de la demande entre acheteurs et vendeurs.
S’il n’est pas trop tard pour en profiter, il faudra garder à l’esprit que cette inévitable dilution de la valeur de notre monnaie concernera tous les véhicules d’investissement libellés en euros. Pour sortir gagnant du Covid-19, il faudra non seulement être investi en actifs tangibles, mais aussi prendre soin de faire partie des emprunteurs profitant des largesses bancaires plutôt que des épargnants au pouvoir d’achat laminé par l’inflation.