Derrière chaque grosse perte en Bourse, il y a presque toujours une émotion mal maîtrisée.
Les pires transactions que j’ai effectuées avaient toutes un point commun : j’ai laissé mes émotions prendre le dessus.
Parfois, j’ai acheté des actions d’entreprises que je savais fondamentalement fragiles, simplement parce que je m’étais laissé emporter par l’euphorie collective. D’autres fois, j’ai conservé des titres que j’aurais dû vendre depuis longtemps, par excès d’avidité – ou parce que j’étais trop sûr de moi.
Mais je vais vous raconter ce qui reste, à ce jour, la pire opération de toute ma carrière.
Après des années à enchaîner les erreurs, j’avais fini par apprendre la discipline. J’utilisais des stops suiveurs. Je prenais des profits partiels sur des positions volatiles. Je savais être patient, et surtout, je respectais un ensemble de règles strictes.
Jusqu’à ce que je tombe sur Quokka.
C’était en pleine bulle Internet. J’ai acheté des actions de cette société qui diffusait du contenu vidéo sur les sports extrêmes. Je savais que presque personne ne regardait ces vidéos. Non pas parce que le contenu était mauvais, mais simplement parce que le haut débit n’existait pas encore. A l’époque, nous étions tous connectés via modem. Regarder une vidéo en ligne était un exercice de patience… et de frustration.
Mais Quokka venait de signer un contrat pour couvrir certains sports aux Jeux olympiques de Sydney, en 2000. L’entreprise ne gagnait pas un sou, mais je me suis dit que dès que les grands médias commenceraient à parler de cette nouvelle, l’action s’envolerait. Typique de la théorie du « plus grand imbécile » : je n’avais pas besoin que l’entreprise fonctionne, il me suffisait de trouver quelqu’un d’encore plus excité que moi pour racheter les actions plus cher.
J’ai investi une somme bien trop importante, par pur pari spéculatif.
Et devinez quoi ? L’action a effectivement grimpé. Elle est passée de 7 à 15 dollars. Fidèle à mes principes, j’ai dit à ma femme et à mes amis que j’allais vendre la moitié de ma position pour sécuriser notre capital initial. Nous utiliserions ensuite ces gains pour acheter d’autres actions.
Mais ils m’ont suggéré de rester entièrement investi. Eux aussi avaient été happés par la frénésie des dot.com. Comme des millions d’autres, ils pensaient que l’action allait grimper encore, sans limite.
J’ai tenté de leur expliquer que j’étais plus serein lorsqu’une trop grosse partie de notre argent n’était pas exposée, que sortir partiellement était logique, prudent et responsable.
Mais ils ont insisté. Plus fermement. « Et si ça monte à 40 dollars ?, ont-ils dit. Ce pourrait être un acompte pour une maison. »
J’ai réexposé mes arguments, tenté de rester rationnel… mais la discussion s’est éternisée, jusqu’au moment fatidique où ils ont fait appel à quelque chose de bien plus difficile à contrer que la logique : ma virilité.
Aujourd’hui, je suis suffisamment à l’aise avec moi-même pour ne plus céder à ce genre de pression. Je sais que rester fidèle à une discipline vaut mieux que céder à l’impulsion ou à l’orgueil. Mais à l’époque, j’ai flanché, et j’ai gardé mes actions Quokka.
Vous devinez la suite : l’action est retombée à 10 dollars. Je me suis dit : « Si elle remonte à 12, je vends. » Puis elle est revenue à mon prix d’achat, 7 dollars. « Si elle atteint de nouveau 10, je sortirai avec un petit gain. » Puis elle est tombée à 5. Là encore : « Si elle remonte à mon seuil de rentabilité, je vends. »
Et ainsi de suite. J’étais figé, prisonnier d’un espoir irréaliste. Je promettais intérieurement de vendre au prochain rebond… mais ce rebond n’est jamais venu.
L’action a plongé à zéro. Et quelque part, au fond d’un tiroir, je possède encore ce fichu certificat d’actions Quokka. Un trophée de mes erreurs de jeunesse.
J’ai commis plusieurs fautes, très classiques.
J’ai d’abord laissé les émotions de mes proches altérer mon jugement. Ensuite, j’ai violé mes propres règles de gestion. J’ai remplacé la discipline par l’espoir. Et j’ai payé cher cet apprentissage. Un simple stop suiveur m’aurait protégé de milliers de dollars de pertes.
Que vos stratégies reposent sur l’analyse fondamentale, la valeur ou des techniques graphiques, peu importe : vous devez avoir une bonne raison d’acheter, et un système précis pour sortir.
J’ai payé cette leçon au prix fort. Mais si elle peut vous éviter de commettre les mêmes erreurs, alors elle aura au moins servi à quelque chose.
Croyez-moi : si vous laissez vos émotions piloter vos décisions d’investissement, vous risquez, tôt ou tard, de vivre une histoire très proche de celle-ci.
Et vous ? Vos émotions vous ont-elles déjà coûté cher ? Partagez vos expériences en commentaires. (Ne vous inquiétez pas, nous sommes tous passés par là.)
3 commentaires
Ma plus jeune belle erreur 5050 BTC achetes a 20 €le tout en décembre 2009 revendus avec fort profit 1000€ le tout. Un vrai dieu du trading, j.en rigole encore aujourd’hui
Un échec reste toujours de votre faute. Cherchez bien, si vous la trouvez et vous gagnez plus que vous avez perdu….Dieu sait si parfois, c’est pas facile !!!
La moins pire erreur c’est de ne pas investir du tout.