▪ Le Brésil a mené tambour battant une "révolution verte" qui a remodelé de fond en comble son tissu agricole en l’espace de quelques décennies : désacidification des plaines ; acclimatation de graminées fourragères africaines pour l’élevage ; tropicalisation du soja ; concentration des exploitations. Ce modèle productiviste, patiemment ajusté aux spécificités de la plaine brésilienne (le cerrado), connaît aujourd’hui des résultats spectaculaires.
▪ En 10 ans, rappelle le journal The Economist, les récoltes brésiliennes ont progressé en valeur de +365% et les exportations de boeuf ont décuplé, hissant le pays au premier rang mondial.
▪ La rentabilité des cultures de soja a progressé de 75% en 20 ans : aujourd’hui le Brésil fournit un quart du soja de la planète — et ce sur 6% seulement de ses terres arables.
▪ D’ailleurs, on estime que ce boom agricole est dû pour 90% à des gains en productivité, et pour 10% seulement, à une utilisation accrue de terres, de main-d’oeuvre ou de capital. Ce qui signifie que le Brésil, fort des plus grandes réserves d’eau et de terres de la planète, a conservé largement intact son capital de croissance agricole…
▪ L’irrésistible ascension du soja
Le cas du soja est emblématique de cette transformation accélérée. En 1960, le Brésil n’en cultivait quasiment pas : un demi-siècle plus tard, il en est devenu le deuxième producteur au monde, et fait quasiment jeu égal avec les Etats-Unis en volumes d’exportation. La production de soja au Brésil a plus que triplé depuis 20 ans, passant de 15,7 à 57 millions de tonnes (chiffres Soystats). Brésil et Etats-Unis cumulent 85% des exportations mondiales de soja — la Chine étant le premier acheteur du globe.
▪ Low-cost : l’atout maître du soja
Voilà pourquoi il s’est invité au menu de presque chaque veau, porc ou poulet de la planète. Voilà pourquoi sa lécithine figure dans tant de barres chocolatées. Tout simplement parce qu’il s’agit de l’un des aliments naturels les plus riches au monde, sinon le plus riche.
Gorgée de fibres et d’acides aminés, chaque fève contient 36% de protéines brutes et dans le tourteau de soja, résidu du broyage, cette proportion peut monter jusqu’à 45%. On peut difficilement faire plus concentré, et plus économique. Le soja est non seulement l’un des aliments d’élevage les plus performants connus, mais aussi une solution possible aux questions de sécurité alimentaire.
▪ Le tableau des applications possibles donne le tournis…
Aujourd’hui, 65% de la production mondiale est utilisée par l’alimentation animale ; le reste se partage entre l’alimentation humaine et diverses applications industrielles. L’huile de soja se retrouve dans la margarine, la vinaigrette, les plats industriels… Elle sert aussi de biocarburant,ou dans la fabrication de polymères. La farine, aliment pour le bétail, peut aussi servir à renforcer des plastiques, de même que l’huile, comme émulsifiant pour peintures. La lécithine sert en confiserie et dans l’industrie pharmaceutique.
Ce que je veux souligner, c’est que l’industrie a une longue familiarité avec cette matière première. Si bien que dans une période où il s’agit de sécuriser les apports nutritionnels de la planète, ou encore de développer les industries vertes, le soja s’impose comme une voie royale de l’agri-tech.
Nous verrons la suite dès demain…