La nature de la monnaie a changé ces dernières années – et avec elle, l’économie elle-même a subi de profondes mutations… qui ne vont pas dans le bon sens.
Emettre des milliers de milliards de dollars de nouvelle monnaie ne créera pas la main d’œuvre qualifiée et les autres facteurs de production nécessaires pour atteindre ces objectifs nécessaires à la mise en place de programmes politiques ambitieux, comme nous l’avons vu hier.
Cela d’autant plus que, de nos jours, l’essentiel de la nouvelle monnaie est créé par le biais des banques, lorsqu’elles distribuent des prêts pour financer l’acquisition de biens immobiliers et autres formes d’investissements spéculatifs.
Dans le meilleur des cas, cela ne fera que transférer des capitaux et des facteurs de production de ceux qui sont le plus en mesure de les utiliser à bon escient vers ceux qui sont le plus susceptibles de les utiliser inefficacement.
Dans le pire des cas, cela pourrait purement et simplement menacer la viabilité de l’ensemble des entreprises productives.
Illustrons cette idée avec un exemple concret…
Nouvelle monnaie et richesse réelle
Revenons au cas de la propriétaire d’une petite entreprise, abordé hier. Si une grande quantité de nouvelle monnaie était injectée dans l’économie au moment même où elle vendait son entreprise, les prix des formes alternatives de richesse augmenteraient certainement.
La hausse des cours sur les marchés boursiers, qui a eu lieu malgré le désastre économique que constitue la pandémie et les politiques de confinement, est une preuve de l’impact de la création monétaire sur les prix des actifs.
Malheureusement pour notre femme d’affaires retraitée, son argent, obtenu suite à la vente de son entreprise (qui représente une forme de richesse réelle), est à présent en concurrence avec la nouvelle monnaie créée (à partir de rien) pour acheter des actifs générateurs de rendement.
La richesse issue de la vente de son entreprise ne sera donc pas suffisante pour racheter autant de nouvelles richesses sous d’autres formes, comme cela aurait été le cas si la masse monétaire était restée stable.
Plus troublant encore, les richesses sont ainsi transférées des mains d’une personne qui a prouvé sa capacité à créer et préserver des richesses, vers des gens qui, en tant qu’initiés bénéficiant d’un accès privilégié à des sommes potentiellement illimitées de monnaie nouvellement créée, ont au contraire toutes les raisons d’être imprudents.
Passage à une économie de pillage
Nous avons ici la situation à laquelle sont maintenant confrontés la plupart des pays développés. Des économies autrefois industrialisées et productives ont vu, au cours des 40 dernières années, une grande partie de leurs richesses passer sous le contrôle de grandes entreprises, de fonds d’investissement et de fonds de capital-risque qui bénéficient d’un accès privilégié au financement monétaire.
Cependant, plutôt que d’utiliser cette nouvelle monnaie pour investir dans l’innovation et la croissance afin de créer davantage de richesses, ces nouveaux propriétaires ont décidé de piller les entreprises qu’ils contrôlent en les obligeant à s’endetter pour racheter leurs propres actions.
Si ce processus a permis de faire grimper en flèche les bénéfices par action et les bonus perçus par les dirigeants de ces entreprises, il a également eu pour conséquence d’endetter de façon excessive les entreprises – et donc de les rendre à la fois plus vulnérables en cas de crise économique, moins innovantes et moins productives.
La richesse qui avait été accumulée au fil des décennies a été dilapidée et les inégalités de revenus et de patrimoine se sont accrues au point de menacer la stabilité sociale.
L’argent de qui ?
Comme l’a déclaré Roy Adkin, spécialiste du problème des faillites, dans « The League of Gentlemen » (épisode 3 de la série documentaire Pandora’s Box, réalisée par Adam Curtis) :
« Les économistes semblent penser que tous les problèmes pourraient être résolus par la monnaie, par son utilisation, plutôt que par la création de richesse. Mais ils n’ont jamais vraiment réussi. Alors j’aimerais leur poser une simple question : l’argent de qui ? quel argent ? d’où provient-il ? »
La monnaie est un outil. Elle rend un service utile lorsqu’elle permet de faciliter les échanges de différentes formes de richesses… mais il ne faut pas la confondre avec la véritable richesse.
Pourtant, dans notre système monétaire actuel, l’influence de la monnaie a grandi au point qu’elle n’est plus au service de la richesse, elle en est au contraire devenue le maître et le destructeur.
Ainsi, l’accélération constante de la création monétaire, bien qu’elle soit présentée comme un moyen par lequel nous pourrions construire une société meilleure, a plus de chances de nous conduire précisément dans la direction opposée.
Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici
1 commentaire
J’apprécie vos chroniques, merci infiniment. L’abondance des monnaies fausses nous fait rêver au temps du règne de l’étalon or !
La compétition Chine USA pourrait devenir violente ? Si les chinois qui détiennent des quantités énormes de papiers monnaies occidentales exigeaient d’être payés en pièces d’or (l’étalon or abandonné par les américains n’est-il pas le début des dérives que nous connaissons aujourd’hui ?), ils pourraient rendre manifeste leur puissance ! Mais ne nous rendraient-ils pas service ? Ce qu’ils ne feront probablement pas, mais nos embarras financiers servirons de publicité pour l’excellence de leur « régime communiste » ? Bien à vous, Jean Roulin.