Par Jean-Claude Périvier (*)
Et si la croissance mondiale calait ?
L’argument des tenants de cette hypothèse réside dans l’idée que la récession américaine pourrait bien mettre à mal la croissance du reste du monde. Je n’y crois pas. Et pour deux raisons.
Quels que soient leurs défauts, les Américains ont une capacité de résistance, d’innovation et de rebond jamais égalée dans le monde jusqu’à maintenant. Ils vont sans doute avoir une année avec un taux de croissance faible, quoique légèrement positif, mais je crois qu’ils seront les premiers à redémarrer, et de manière forte.
D’autre part, les pays émergents ne seront pas affectés par le ralentissement US comme ils avaient l’habitude de l’être. Ce sont maintenant d’immenses marchés intérieurs, leurs économies profitent de larges surplus (pas uniquement liés aux matières premières), disposent de réserves de change importantes et n’ont plus le même besoin qu’autrefois en capitaux américains. Au contraire, la faiblesse du dollar leur permettra d’obtenir ceux-ci à bon prix et d’importer des produits de la zone dollar moins chers qu’auparavant.
Une répartition mondiale
De plus en plus interdépendantes, les infrastructures constituent un moyen d’assurer la fourniture de biens et de services qui concourent à la croissance économique, à la prospérité — et donc à la qualité de vie. La demande d’infrastructures va donc augmenter considérablement dans les décennies à venir, poussée par des facteurs majeurs d’évolution comme la croissance économique mondiale, le progrès technologique, le changement climatique, et l’urbanisation.
L’OCDE le confirme : la plupart des investissements en infrastructures devraient être réalisés dans les pays en développement, en particulier dans de grandes économies telles que les BRIC (le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine). Mais les pays développés représenteront eux aussi une partie non négligeable : il s’agira pour une large part d’investissements dans des infrastructures telles que la distribution d’eau et le traitement des eaux usées, les ports, les centrales électriques (nucléaires ou non), les énergies renouvelables. Prenez les Etats-Unis, une fois encore. 11% des ponts métalliques comme celui de l’I-35W sont connus pour avoir des faiblesses graves pouvant aller jusqu’à l’effondrement. Et ce type de problèmes aux Etats-Unis concernent aussi les routes, les écoles, les barrages, les réseaux électriques, les conduites d’eau…
Vous avez là de grands défis aux visages multiples : de nombreux réseaux dans les pays riches connaissent un vieillissement rapide. Les finances publiques ont des contraintes de plus en plus fortes, ce qui rendra le financement des infrastructures de plus en plus délicat et complexe. Il existe donc un "déficit d’infrastructures", qui doit être comblé.
Un réel modèle économique d’investissement
Le point commun de toutes les infrastructures, c’est qu’elles sont censées offrir un service collectif et ininterrompu aux populations. Ce service peut vous sembler gratuit, mais il est d’une manière ou d’une autre financé via l’impôt ; ou bien il peut être proposé moyennant le paiement d’une redevance, ou une tarification. Dans tous les cas, c’est vous qui payez ! Pour certaines infrastructures, l’autorité d’un régulateur est indispensable.
Autre point commun aux infrastructures : elles ont une durée de vie longue, ce qui donne une excellente visibilité à ce secteur pour l’investisseur de moyen/long terme. Les contrats de gestion des infrastructures comme les concessions par exemple assurent une grande stabilité du chiffre d’affaires et des investissements. Le plus souvent, la rentabilité est connue d’avance. Une fois que l’investissement est réalisé, les dépenses courantes de maintenance sont relativement faibles et stables. En conséquence, les augmentations de chiffre d’affaires ne sont pas proportionnelles à des augmentations de coûts opérationnels auxquelles elles seraient liées, et le cash flow en bénéficie d’autant.
Beaucoup d’infrastructures présentent un caractère monopolistique ou quasi monopolistique, ce qui leur procure évidemment un avantage compétitif unique, et ce pour une longue période. Par ailleurs, étant liée à la croissance économique ou à la croissance de la population, la demande en infrastructure est assez étanche aux changements de prix.
Et puis, vous vous en êtes rendu compte, les revenus d’une infrastructure sont souvent liés à l’inflation. Lorsque cette dernière pointe le bout de son museau, comme c’est le cas en ce moment, les tarifs augmentent, et vous n’y pouvez rien ! Mais si vous êtes du côté de l’investisseur, vous avez là une remarquable protection contre cette "maudite inflation".
Lorsque vous pensez "besoins en infrastructures", des images stéréotypées vous viennent à l’esprit : des pistes en place de route en Inde ou au Vietnam, des hôpitaux surpeuplés en Afrique, de grands barrages en Amérique du Sud… Tout cela existe et fait partie des efforts que les différents pays mettent ou doivent mettre en oeuvre.
Alors oui, les infrastructures sont un problème universel — on pourrait dire un thème de la mondialisation –, et le potentiel est gigantesque pour qui saura en profiter.
Meilleures salutations,
Jean-Claude Périvier
Pour la Chronique Agora
(*) Parallèlement à sa carrière dans le conseil aux entreprises et l’intelligence économique, Jean-Claude Périvier s’intéresse à la Bourse et à l’investissement depuis 1986. Analyste de talent, il excelle à détecter et anticiper les tendances futures… pour en déduire les meilleures opportunités de gain dans sa toute nouvelle lettre d’information, Défis & Profits.