Les marchés obligataires à travers le monde sont devenus nerveux. Mi-juin, nous avons compris pourquoi.
Le rapport mensuel du Treasury International Capital a révélé que les principaux pays détenteurs de la dette américaine s’en sont débarrassés en avril. Et ce au deuxième rythme mensuel le plus rapide depuis plus de 10 ans.
La Russie a liquidé la moitié de ses obligations du Trésor américain. Les obligations américaines détenues par le Japon sont au plus bas depuis 2011. Des pays intermédiaires comme l’Irlande et le Luxembourg montrent des signes d’hésitation eux aussi. La Chine n’a cependant pas beaucoup modifié ses positions.
L’explication de ces ventes massives est que ces pays ont besoin de dollars américains pour mener les guerres commerciales. C’est pourquoi ils liquident leurs actifs en dollars. Ou peut-être est-ce de leur part une façon de se venger de Donald Trump, en le frappant là où ça fait mal.
Résultat de ces liquidations : une forte hausse des rendements des obligations du Trésor américain. Plus de 3% sur le bon du Trésor à 10 ans. Pour une longue liste d’experts, qui ont prédit que la hausse des taux longs poserait problème, ce chiffre était le seuil à ne pas dépasser.
Il n’y a pas que le marché obligataire américain qui vacille. Le chaos règne également sur le marché obligataire italien. Et que dire des crises en Turquie et en Argentine ?
Toutes ces hausses sont-elles liées ? Nous y reviendrons.
Aujourd’hui, nous étudierons un effet curieux des mouvements des taux d’intérêt.
La courbe mondiale des rendements obligataires s’est inversée
L’inversion de la courbe des rendements, voilà une phrase qui n’est pas claire, je sais. Pourtant c’est peut-être l’indicateur le plus manifeste qu’un ralentissement économique est proche.
La dernière fois que la courbe des rendements obligataires s’est inversée au niveau mondial, c’était fin 2007. Avant cela, c’était au cours des crises des marchés émergents de la fin des années 1990 et lors de la bulle internet en 2000.
Mais qu’est-ce que l’inversion de la courbe des rendements obligataires ?
La courbe des rendements indique le niveau des intérêts que l’Etat doit payer lorsqu’il emprunte sur différentes périodes de temps. Par exemple, cela coûte 3% pour emprunter sur un an, 4% sur cinq ans et 5% sur 10 ans. Reliez les points sur le graphique et vous obtenez la courbe des rendements.
Normalement, cette courbe est ascendante. Plus la période de temps d’emprunt est longue, plus le taux d’intérêt est élevé. La menace d’une hausse de l’inflation, la probabilité de défauts et d’autres facteurs augmentent à mesure que s’allonge la durée d’emprunt. C’est pourquoi les investisseurs exigent des rendements plus élevés pour prêter aux Etats sur la durée.
Lorsqu’une courbe des rendements s’inverse, elle devient descendante. C’est signe qu’il y a un sérieux problème sur le court terme.
En général, seule une petite partie de la courbe s’inverse. Ainsi, par exemple, si l’Etat doit payer plus pour emprunter sur trois ans que sur un an ou 30 ans, on peut s’attendre à une récession durant les deux ou trois prochaines années. Les investisseurs exigent un petit « plus » pour prêter sur deux-trois ans, du fait du risque d’une récession durant cette période.
Soit dit en passant, cela ne veut pas dire grand-chose selon moi. Durant une récession, les gens ont tendance à acheter des obligations, ce qui fait monter les prix du marché obligataire. Les obligations sont plus sûres que les actions, offrent des rendements fixes ; les baisses des taux d’intérêt au niveau de la banque centrale qui lutte contre la récession donne du prix aux vieilles obligations qui rapportent plus. Si la récession n’est que d’une courte durée, vous achèterez dans ce cas des obligations à court terme, tandis que les gens se précipiteront en masse sur la sécurité qu’elles offrent.
Il est indéniable que le bon sens commun a raison dans la pratique. La capacité des courbes de rendements inversées à prédire les récessions est excellente.
Pour la première fois depuis 2007, la courbe des rendements au niveau mondial s’est inversée. Selon JP Morgan, les Etats à travers la planète doivent payer plus pour emprunter sur un à trois ans que pour emprunter sur sept à 10 ans.
Cette tendance à la baisse est provoquée par une courbe qui se tasse.
La cause principale est la mainmise par le gouvernement américain sur la courbe à court terme. Or les taux d’intérêt américains sont plus élevés qu’au Japon et en Europe. Par conséquent, la courbe des rendements calculée par JP Morgan est un peu biaisée.
Il n’en reste pas moins qu’il existe un grave déséquilibre des taux d’intérêt à travers le monde, signe d’une récession potentielle.
Evitez la richesse théorique
Ne vous semble-t-il pas étrange qu’une si grande partie de notre épargne ne soit rien d’autre qu’une créance vis-à-vis de quelqu’un d’autre ?
Les actions ne sont qu’un droit sur les bénéfices d’une entreprise. Les obligations sont un droit sur les actifs de quelqu’un d’autre. Les comptes bancaires sont un droit sur la banque. Même nos retraites sont un droit sur une institution et un système public.
Rares sont les investissements qui ne sont pas un droit sur quelqu’un d’autre.
C’est pourquoi les analystes financiers parlent souvent de confiance. Durant les périodes où la confiance est élevée, le risque sur ce système de droits semble faible. L’idée qu’une personne ne paiera pas semble lointaine.
Lorsque la confiance disparaît, c’est comme si un tout nouveau genre de risque entrait en jeu. La valeur des investissements diminue – vous ne souhaitez pas acheter quelque chose dont vous ne savez pas si le droit sera honoré.
Dans ces périodes, quels investissements détenir ? Quels sont les actifs dont la valeur est moins dépendante de la confiance ?
La discussion ci-dessus à propos des marchés obligataires vacillants montre que c’est le moment de se poser ces questions.
Les obligations sont les actifs qui dépendent le plus de la confiance. Ce sont des investissements long terme qui assurent un rendement fixe. La question clé qui détermine leur valeur est le risque de défaut sous forme d’inflation ou un défaut réel. La détention d’obligations devient un pari sur le fait que la confiance continuera à régner sur le système financier mondial.
Si les marchés obligataires comme ceux de l’Italie ou des Etats-Unis vacillent, il est temps de réévaluer votre portefeuille. Etes-vous bien investi en richesse réelle, de celle qui ne repose pas sur la confiance ?
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Il ne s’agit pas obligatoirement de métaux précieux, soit dit en passant. D’autres matières premières ou l’énergie peuvent être d’excellents refuges contre une dégradation de la confiance. Ce sont des actifs réels, qui existent indépendamment de tout droit sur des contreparties. Il ne s’agit pas de richesse financière.
Investir dans ce domaine vous permettra de continuer à faire des profits.