** "Ce qui me frappe vraiment", écrit James Grant, rédacteur du Grant’s Interest Rate Observer, "c’est que Graham insiste sur l’opportunisme plutôt que sur la prophétie ou les prévisions. Ce qui nous amène à réfléchir aux opportunités qui s’offrent à nous, et non pas à tenter de deviner l’issue d’évènements futurs, une issue qu’il nous est d’ailleurs impossible de connaître".
– Le Graham auquel il fait référence est bien évidemment Benjamin Graham, l’homme qui a établi les bons vieux principes de l’investissement intelligent. Il était le mentor de Warren Buffett et a aidé des centaines d’autres à faire fortune dans les marchés. Ses idées sont devenues une pierre de touche pour de nombreux investisseurs de la vieille école, y compris moi.
– La sagesse de Graham prend aujourd’hui tout son sens puisque les opportunités qui s’offrent à nous sont énormes, même si cela n’en a pas l’air étant donné la punition que le marché a infligée cette année aux investisseurs.
– Il n’est besoin d’aucune prophétie ou prévision pour voir la seconde Révolution industrielle qui se déploie à la vitesse de la lumière dans des pays comme la Chine ou l’Inde. Fareed Zakaria, chroniqueur de Newsweek, l’appelle "la montée du reste". Il remarque une extraordinaire succession de faits — certains ayant de l’importance, d’autres moins, mais qui démontrent tous que les Etats-Unis ne sont plus un poids lourd sans le moindre rival. En voici quelques-uns :
– Le plus grand gratte-ciel du monde est à Dubaï
– L’Inde construit actuellement la raffinerie la plus grande de la planète
– L’avion de tourisme le plus grand du monde est en Europe
– Les plus grands fonds d’investissement de la planète sont à Abu Dhabi
– L’industrie du cinéma la plus importante est à Bollywood, non à Hollywood
– La grande roue la plus imposante se trouve à Singapour, le plus grand casino à Macao — qui a dépassé Las Vegas en termes de bénéfices sur les jeux d’argent l’année dernière
– Le plus grand supermarché d’Amérique, autrefois le plus grand du monde, ne fait plus partie du top 10
– Dans le top 10 des personnes les plus riches du monde, seuls deux sont des Américains.
– "Ces faits reflètent le profond changement qui s’opère au niveau des pouvoirs et des attitudes", écrit Zakaria. Il n’y a pas si longtemps, les Etats-Unis tenaient le haut du pavé dans la plupart de ces catégories. Ce n’est pas une prophétie : c’est ce qui se passe en ce moment.
– Une récente étude de Merrill Lynch et Capgemini ajoute encore à toutes ces preuves qui démontrent que la création de grandes fortunes se passe désormais à l’étranger. L’Asie produit des millionnaires à un rythme effréné. L’année dernière, le nombre de millionnaires a augmenté de 22% en Inde et 20% en Chine. En terme de création de fortunes privées, l’Asie abrite cinq des dix marchés dont la croissance est la plus rapide.
– L’Asie compte désormais 2,8 millions de millionnaires ; elle se classe troisième après l’Amérique du Nord, qui en compte 3,3 millions, et l’Europe, avec 3,1 millions. Lorsqu’on calcul le total de ces fortunes, l’étude classe l’Asie troisième, avec 9,5 milliers de milliards de dollars, derrière l’Amérique du Nord et l’Europe, une fois encore, avec respectivement 11,7 milliers de milliards et 10,6 milliers de milliards. Mais la croissance de l’Asie est bien plus rapide et ce continent n’est plus très loin derrière les autres.
– Au-delà des millionnaires, le pouvoir d’achat augmente très rapidement en Asie. "L’augmentation de leurs richesses dépasse l’augmentation de leur population, et c’est une tendance qui va s’accentuer dans les années à venir", a déclaré Ileana van der Linde, de Capgemini.
– Cela ne diminue pas pour autant la richesse des Etats-Unis. Un millionnaire sur trois est américain, ce qui est toujours le chiffre le plus élevé parmi les pays qui comptent des millionnaires.
** En fait, il ne s’agit pas tant du déclin des Etats-Unis que d’une augmentation spectaculaire de la richesse dans d’autres parties du monde.
– Tout cet argent ne se traduit d’ailleurs pas forcément par des profits boursiers. Ces marchés vont traverser des déclins terribles sur la route vers les sommets. L’Inde et la Chine ont été les marchés les moins performants cette année parmi les grandes places boursières. Mais la croissance sous-jacente a encore du chemin à faire. L’Amérique, elle aussi, a subi beaucoup de hauts et de bas au cours du 20ème siècle, mais les investisseurs qui se sont positionnés pendant les baisses ont été amplement récompensés de leur patience.
– Voilà donc votre opportunité à l’étranger. Il n’y a pas besoin de grandes prédictions. Il vous suffit de regarder ce qui se passe dans le monde autour de vous.
– L’économie américaine va finir par s’en sortir. Même en ce moment, il y a des poches d’opportunités aux Etats-Unis. Il y a les villes-champignon qui grandissent autour des sites de forages comme le Marcellus et le Bakken. Il y a de l’argent à se faire dans la construction de pipelines pour l’eau, le pétrole et le gaz. Les ressources naturelles américaines ont l’air bon marché pour le reste du monde. Les régions boisées américaines sont encore des investissements reconnus.
– Mais il est certain que les marchés étrangers doivent occuper une bonne part de l’horizon des investisseurs à long terme. Ils font partie du mien depuis déjà plusieurs années.