La grève du capital et les politiques monétaires du crédit gratuit ont créé une situation où la destruction créatrice ne semble plus possible… Est-ce vraiment le cas ?
Comme nous l’avons vu hier, le capital fait la grève. C’est-à-dire qu’il ne sert plus à investir dans les équipements productifs, mais sert à spéculer. Ce qui cause un problème majeur pour la croissance séculaire, dont les autorités anticipent déjà qu’elle va continuer à ralentir, malgré les politiques monétaires et autres aides de l’Etat.
Certains optimistes dominants ont pourtant émis dès 2020 l’idée selon laquelle le monde capitaliste avancé était sur le point de connaître une vague de prospérité comme dans les années 20, comme après l’épidémie de grippe espagnole.
La grande différence entre les années 1920 et les années 2020 est que la crise de 1920-21 aux Etats-Unis et en Europe a éliminé le « bois mort » des entreprises inefficaces et non rentables par les faillites. Elle a fait remonter la profitabilité afin que les survivants puissent bénéficier de plus de parts de marché.
Ainsi, après 1921, les Etats-Unis ont non seulement récupéré, mais sont entrés dans une (brève) décennie de croissance et de prospérité. Pendant les années folles, le PIB réel des Etats-Unis a augmenté de 42%, avec un taux moyen de 2,7% par an et par habitant.
Rien de tel n’est prévu maintenant, parce que la politique des banques centrales et des gouvernements vise à maintenir le bois mort et la pourriture. Ce qui produit une économie de plus en plus zombie.
Pour avoir un boom économique…
En économie comme en social, le fait de refuser la loi de la jungle entretient la faiblesse, la pourriture, la perversion et ceci se traduit par une perte de dynamisme et de force de vie.
Un long boom, une avancée sociale significative ne sont possibles que si et seulement si, au départ, il n’y a pas beaucoup de bois mort et de poids morts.
Une période de prospérité comme celle qui a suivi la guerre en 1945 n’est possible que s’il y a eu une destruction significative du stock de capital, soit physiquement, soit par dévaluation, ou les deux.
Joseph Schumpeter, économiste autrichien des années 1920, s’inspirant de Marx, a appelé cette destruction la « destruction créatrice ». Il a rappelé cette vérité incontournable : « Le serpent ne survit que de sa mue. »
L’innovation fait prospérer, mais il faut en même temps nettoyer les processus d’accumulation, les technologies obsolètes et détruire les capitaux défaillants et non rentables. Les banquiers centraux qui font monter les cours de Bourse empêchent le nettoyage, ils empêchent les économies productives de repartir sainement. Ils protègent ainsi les détenteurs du capital ancien !
La destruction créatrice crée les conditions d’un taux de rentabilité plus élevé, après que les branches pourries – les capitaux inefficaces – aient été dévorés par les grands et les forts. C’est la loi de la jungle : le groupe ne survit que de sa cruauté, de sa capacité à savoir se couper un bras quand il le faut. L’homme est un loup pour l’homme.
L’argent gratuit empêche la sélection
Nos sociétés vont continuer de végéter, de patauger, de s’enfoncer dans la paupérisation des classes moyennes et l’enrichissement scandaleux et indu des riches, pour deux raisons principales :
- premièrement, parce que la rentabilité du vrai capital, le capital productif, est toujours faible (on entend par là les bénéfices par rapport à l’investissement total dans les moyens de production et la main-d’œuvre) ;
- et deuxièmement, parce que la dette a continué de galoper, de s’entasser aussi bien au niveau des entreprises qu’au niveau des gouvernements. Le capital fictif, financier, a encore alourdit son emprise.
La politique d’argent gratuit et facile a été contreproductive. Elle joue contre la sélection et donc contre l’adaptation. Elle est, sous couvert mensonger de progressisme, profondément conservatrice et malthusienne. Elle ne vise qu’à protéger un ordre social qui aurait dû, pour le bien commun à long terme, être pulvérisé.
Notre époque se caractérise par l’irrésistible ascension des zombies, et c’est un phénomène général même si on n’en parle qu’au niveau économique. Pas étonnant que l’on élise des Biden ou des Macron, qui sont, chacun à leur façon, les mandataires des zombies.
Ci-dessous, l’irrésistible ascension des zombies, courbe rouge !
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]