▪ Nous avons vu hier que l’approche purement mathématique de l’évaluation du risque, en matière d’investissement, avait des inconvénients majeurs.
▪ Le risque dans le temps
Pour tenter de pallier ces insuffisances, le concept de value at risk (VAR) a été créé. L’objectif de la VAR est de pouvoir résumer en un seul nombre l’ensemble des pertes que peut subir un portefeuille donné en agrégeant toutes ses positions. Cette mesure est une quantification, dans un intervalle de confiance donné (en pratique, 95% ou 99%), de la perte potentielle du portefeuille considéré au cours d’une période donnée (en pratique, un ou dix jours).
Hélas, la VAR est très imprécise sur un certain nombre d’opérations complexes dont la valeur de marché ne fait pas l’objet d’une actualisation régulière. Les calculs de VAR sont également difficiles à interpréter en cas de variation importante du portefeuille :
– les calculs de VAR sont inopérants en dehors de l’intervalle de confiance ;
– l’actualisation de données nécessaires sur les écarts-types mais, surtout, les corrélations entre actifs financiers sont extrêmement lourdes. En général, on limite la mise à jour de ces inputs, ce qui peut avoir pour effet de sous-estimer la mesure du risque.
▪ De la VAR au cygne noir
Les calculs de VAR ne permettent pas d’approximer les pertes du portefeuille dans les scénarios de crise que nous avons connus ces dernières années. Pour deux raisons essentielles :
– les instruments financiers sont considérés comme parfaitement liquides et parfaitement modélisés par les indicateurs de marché ;
– surtout, l’hypothèse statistique de normalité des distributions de prix et de rendements est trop forte. Les risques d’occurrence des événements en dehors de l’intervalle de confiance sont dramatiquement sous-évalués. C’est exactement ce que démontre Nassim Taleb dans son Cygne Noir.
La pensée unique qui sévit sur les marchés a fait triompher les modèles de value at risk assis sur la loi normale de distribution, dite Gauss-Laplace. Et ce, en dépit des avancées mathématiques de modélisation des risques.
▪ Que faire alors ?
Vous devez essayer de mieux comprendre les marchés et les raisons des ventes. Je lisais récemment dans une revue que, pour être un bon professionnel des marchés dans la recherche, le trading et la structuration, il fallait être tout à la fois un bon mathématicien, un bon physicien et un bon informaticien. Peut-être… mais ceci ne dispense pas d’approfondir ses connaissances dans le domaine de la finance comportementale.
Car une chose est sûre : il ne sera jamais possible de modéliser la peur, le mimétisme et encore moins l’effet des contraintes réglementaires, prudentielles et comptables sur les comportements des investisseurs.
Combien de fois m’a-t-on demandé pourquoi tel actif financier voyait son prix chuter violemment alors même que les fondamentaux de cet actif étaient parfaitement sains ? J’ai répondu que les crises et périodes de stress sur les marchés étaient souvent accompagnées de ventes forcées, indépendamment des fondamentaux des actifs.
En voici un exemple : j’ai en portefeuille un actif A devenu pourri et illiquide, or j’ai besoin de liquidités pour des raisons diverses et variées (respect de ratios réglementaires, anticipations de demandes de cash de la part de clients…) ; je vais donc être forcé de vendre mon actif B plutôt sain fondamentalement voire mon actif C encore plus sain.
Vous ne pouvez pas comprendre l’histoire récente des crises des marchés financiers (1998-2011) si vous n’intégrez pas cette dynamique de la contagion entre actifs financiers et de ventes forcées pour des raisons commerciales, prudentielles, réglementaires ou comptables. C’est malheureux, mais c’est ainsi ; au travail !
Première paurution dans La Quotidienne de MoneyWeek du 07/07/2011.
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[…] Nous verrons la suite dès demain. […]