Le système avance à l’aveuglette, en s’adaptant aux exigences de la finance… sans le moindre recul ni la moindre compréhension des enjeux. Les premières à en souffrir sont nos sociétés actuelles.
Le système n’est plus celui de 2008, il mute à grands pas, dans l’ignorance et l’imprévision.
Qui sait où on va ? Personne : c’est la grande aventure, l’exploration de territoires inconnus –sans carte et sans boussole. Le meilleur isomorphisme actuellement est sanitaire : on vaccine en urgence, sans expérience – cette expérience va s’acquérir en marchant.
C’est une course de vitesse pour éviter l’effondrement économique et surtout celui des promesses que l’on ne peut tenir : les promesses financières. On ne s’adapte pas au monde, on s’adapte à l’ogre de la domination financière.
Le système tient et s’adapte parce que, un à un, il fait sauter ses points fixes, ses ancrages, ses points de références du passé. Le système ne fait plus que s’auto-référer, il se sert d’auto-ancrage.
Un coût terrible
Le système est devenu pur système d’opinions suspendues dans les airs : c’est le système du sondage… et les opinions, cela se fabrique, cela se manipule. Les sujets du système sont en train, tous, de devenir objets.
Dans le relativisme qu’il faut sans cesse élargir, tout doit être relativisé pour tenir, tenir encore un peu. Il faut, pour durer, détruire les certitudes, les comparaisons avec le passé, les objectivités et imposer le règne des subjectivités. Il faut évacuer la raison et stimuler les perceptions et les affects.
Le relativisme permet de durer car tout glisse, mais le coût est – et sera – terrible.
On le voit dans la vie quotidienne, dans la dislocation de nos sociétés : il n’y a plus de communauté, plus d’identité, plus de référence objective au vrai, au juste, à l’éthique. Nos sociétés disloquées s’abandonnent à l’utilitarisme, au pragmatisme, à l’absurde et sont obligées de plus en plus de recourir à la violence pour remplacer les consensus.
La violence et le terrorisme sont les résultats de la disparition de la catégorie de la vérité comme impératif universel.
Le monde entier a accepté les dérives c’est-à-dire que le monde entier s’est rallié à la politique de la banque centrale américaine. Il n’y a pas eu de voyou, pas d’acteur renégat –public ou privé – ayant les reins assez solides pour attaquer les monnaies, les marchés et renverser la pyramide.
Aucune opposition
C’est le point important, il est souvent négligé : s’il n’y a pas d’acteur assez puissant pour empêcher les dérives, s’il n’y a pas d’opposant volontaire, conscient, alors les sanctions ne pourront être qu’endogènes. Endogènes, cela signifie que le système ainsi désancré pourra dériver jusqu’à ce qu’il soit victime de ses antagonismes objectifs internes, ou de son antagonisme majeur avec le monde extérieur.
Comme le disait le chirurgien au patient qui lui demandait s’il fallait l’amputer de son bras gangrené : non, il tombera tout seul.
L’avenir du système ce n’est pas la révolte, la révolution ou quoi que ce soit qui y ressemble, par la volonté ou la conscience ; ce sera l’auto-destruction. Le système se désadapte au monde. Il s’enfonce dans sa névrose.
Malgré leur rivalité, les deux blocs, le Chinois et l’Américain, ont la même pratique. Ils sont parties d’une même pièce, d’une même médaille : c’est le système Chinamérique, celui de l’inflationnisme monétaire et du crédit. Ils sont donc systémiquement solidaires, leur intérêt est commun à ce que cela dure.
Leurs destins sont liés. Leurs fins aussi.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]