Quand la clémence présidentielle devient un instrument de pouvoir, la frontière entre justice, influence et corruption s’efface.
Le Bureau ovale n’est pas un lieu pour un homme honnête. A l’inverse, « l’impitoyabilité » serait la véritable clé du succès en politique, selon les mots de l’ancien Premier ministre britannique Harold MacMillan.
C’est sans doute pour cette raison que tant d’observateurs considèrent Jimmy Carter comme un président « faible », et Donald Trump comme un président « fort ». Insulter les journalistes… ordonner des assassinats… menacer d’envahir des pays souverains… monnayer des grâces présidentielles… qualifier des groupes entiers de personnes de « déchets » : l’homme fort Trump se distingue avant tout par une indécence implacable.
Il est aussi parfaitement disposé à poignarder sa propre équipe dans le dos. On pourrait imaginer que, si vous êtes accusé par Pam Bondi et Kash Patel d’avoir truqué l’appel d’offres d’un stade à 375 millions de dollars, obtenir une grâce présidentielle serait hors de portée.
Mais il n’en est rien. Il suffit d’engager l’ancien membre du Congrès Trey Gowdy pour aller jouer au golf avec le président. Le New York Times comme le Wall Street Journal rapportent qu’à l’issue de la partie, Trump a demandé à Gowdy s’il pouvait faire quelque chose pour lui. Gowdy a alors évoqué son client. Quelques jours plus tard, la grâce était accordée.
C’est Alan Greenspan qui, le premier, a offert à Wall Street ce que l’on a appelé une « option de vente ». En cas de krach ou de vente massive, la Réserve fédérale interviendrait pour secourir les investisseurs en abaissant les taux d’intérêt.
Aujourd’hui, Donald Trump semble proposer un mécanisme analogue, mais appliqué aux malfaiteurs. Un filet de sécurité politique : en cas de problèmes judiciaires, le pardon présidentiel fait office d’assurance ultime.
Mais la corruption nourrit la corruption. Et Donald Trump n’est pas à l’origine de l’ensemble de la corruption rampante qui gangrène aujourd’hui le système. Le fils de Joe Biden, Hunter Biden, a ainsi perçu des sommes proprement extravagantes pour siéger au conseil d’administration d’une grande entreprise énergétique ukrainienne. Ce qu’il vendait réellement n’était probablement pas une expertise pointue du secteur pétrolier, mais bien son accès, son nom et son influence.
Donald Trump n’a fait que poursuivre la descente aux enfers d’un empire déjà en déclin… tout en en accélérant brutalement la trajectoire.
Le Washington Monthly dresse un constat glaçant :
« De février à la première semaine de décembre, Trump a accordé 61 grâces et commutations de peine. Près de la moitié – soit 27 – ont bénéficié à des criminels en col blanc condamnés pour fraudes boursières, fraudes électroniques, blanchiment d’argent, évasion fiscale et infractions connexes. Deux de ces grâces ont été accordées à des entreprises, et non à des individus, une première historique. Quatorze autres concernaient des affaires de corruption politique. (Neuf autres ont été accordées à des trafiquants de drogue, dont certains ont été mentionnés dans une chronique récente.) »
Viennent ensuite des cas emblématiques, comme celui de Justin Sun. Le milliardaire de la crypto-monnaie a été accusé par la SEC de multiples chefs d’inculpation pour fraude. Pourtant, après les élections de 2024, il a « investi massivement », selon le Washington Monthly, dans la société World Liberty Financial liée à Trump. Peu après, la SEC a subitement perdu tout intérêt pour son dossier. Une coïncidence, sans doute.
En voici une autre :
« Comme l’a rapporté le New York Times, en décembre, World Liberty Financial a acquis pour 5 millions de dollars de crypto-monnaies auprès d’Ethena Labs. Quelques mois plus tard, l’un des investisseurs d’Ethena, Arthur Hayes – cofondateur de la plateforme BitMEX – a été gracié par Donald Trump. »
Au-delà de ces figures largement perçues comme douteuses, il existe une autre catégorie d’acteurs : ceux sur lesquels le soleil ne semble jamais se coucher. Réussis, puissants, parfaitement connectés, ils n’ont nul besoin de grâce présidentielle. Ils n’ont rien fait d’illégal.
En voici une illustration frappante…
Certaines des plus grandes figures de la finance ont flairé une opportunité majeure lorsque les autorités fédérales ont renfloué Fannie Mae et Freddie Mac en 2008. John Paulson, Bill Ackman, Carl Icahn et Bruce Berkowitz ont alors acquis leurs actions à « quelques centimes par dollar ». Aujourd’hui, ils sont en passe d’empocher des milliards à mesure que les deux géants du crédit hypothécaire sont progressivement restitués au secteur privé. David Stockman résume la situation sans détour :
« Il s’agit d’un cadeau pur et simple fait à une poignée de spéculateurs milliardaires. Rien de plus. Une véritable bombe puante du capitalisme de connivence. »
Nous avons là une illustration parfaite d’une règle générale : plus le gouvernement fédéral manipule l’économie, plus celle-ci se dégrade… et plus elle devient un terrain fertile pour les abus et les arnaques.
Tout a été mis en place lors de l’effondrement du marché immobilier en 2008, conséquence directe de taux d’intérêt artificiellement maintenus à des niveaux anormalement bas par la Fed. En pleine crise, les prix de l’immobilier s’effondraient, tandis que Fannie et Freddie se retrouvaient à court de liquidités. L’Etat fédéral est alors intervenu, promettant d’injecter jusqu’à 200 milliards de dollars dans chacune des deux entités, en échange d’une prise de contrôle majoritaire.
Dès le départ, il s’agissait d’une opération taillée sur mesure pour des initiés. Les organismes de crédit hypothécaire avaient négocié des garanties fédérales solides, puis engrangé des profits colossaux grâce au faible différentiel entre leurs coûts de financement de gros – via les marchés obligataires – et leurs prêts de détail consentis aux ménages. Ces profits devraient, en toute logique, revenir à leur véritable origine : le gouvernement américain et les contribuables.
Or, dans la réalité, les gains sont privatisés, tandis que les pertes sont socialisées.
Les quatre milliardaires mentionnés – et quelques autres – ont parfaitement compris comment capter cette manne.
La voie était déjà dégagée lors du premier mandat de Trump. Mais la transaction – la revente de Fannie et Freddie sur les marchés publics – « ne s’est pas concrétisée en raison de sa complexité », selon CNBC.
Aujourd’hui, avec le retour de Trump au pouvoir, l’opportunité ressurgit. Les quatre méga-spéculateurs disposent non seulement de l’expertise nécessaire pour naviguer dans cette complexité juridique et financière… mais aussi des moyens colossaux pour en tirer un profit maximal.
Le cours des actions a déjà explosé dans l’anticipation d’une introduction en Bourse. David Stockman estime que chacun de ces milliardaires pourrait voir sa fortune augmenter d’environ 3 milliards de dollars une fois l’opération finalisée.
D’autres investisseurs auront alors l’occasion de gagner encore davantage grâce à Fannie et Freddie… jusqu’à ce qu’une nouvelle crise éclate…
Et que, une fois encore, la facture soit présentée aux contribuables.

1 commentaire
Bizarre… Comme presque tous les médias français vous dénoncez deux monstres : Trump et Poutine.
A la suite de l’effondrement économique du communisme, le capitalisme triomphe totalement, exagérément il est vrai.
Vous nous proposez quoi et QUI à la place ?
Macron et Von der Layen ? « N’est ce pas indécent ? »
Strange… Like almost all French media outlets, you denounce two monsters: Trump and Putin.
Following the economic collapse of communism, capitalism triumphed completely, admittedly excessively.
What and WHO do you propose instead?
Macron and Von der Leyen? « Isn’t that indecent? »