▪ Lorsque j’étais enfant, certains affirmaient qu’Elvis ou Buddy Holly étaient les derniers des grands musiciens et que ces Anglais à cheveux longs, les Beatles, n’étaient que de la camelote. Puis, ceux qui ont adopté la musique de l’époque des Beatles dénigrèrent tout ce qui suivit. Et ceux qui étaient jeunes dans les années 1990 clament aujourd’hui qu’il n’y a pas de bonne musique au 21ème siècle.
Tous se trompent, naturellement. Chaque période connaît sa part de chef-d’oeuvres et de bides. Si j’avais le temps, je vous en aurais fourni la preuve.
Ce que je veux dire ici, c’est qu’une grande partie de la population voit l’histoire comme elle voit la musique, à travers son propre vécu. C’est pourquoi, à chaque période de l’histoire, des écrivains et des penseurs de renom ont toujours déclaré la fin des meilleurs jours d’une civilisation et l’inévitable descente dans la médiocrité — sinon le chaos. Toutefois, d’une manière ou d’une autre, la civilisation a toujours réussi à surmonter des attaques bien plus graves que celles que nous connaissons aujourd’hui pour atteindre de nouveaux sommets, encore et toujours.
Dernièrement, j’ai été particulièrement ennuyé par la déférence donnée aux pessimistes de notre époque. Ces derniers affirment, comme tant d’autres avant eux, que la civilisation a atteint son apogée. En fait, ils ressemblent beaucoup à ceux qui considèrent que la seule musique valable est celle qui était populaire jusqu’à ce que leur apparaisse une brioche, qu’ils commencent à perdre leurs cheveux ou à voir apparaître des rides dans leur miroir.
▪ L’exemple du pétrole
Naturellement, je peux me tromper. Je n’ai pas de boule de cristal ni de machine à voyager dans le temps. Toutefois, je ne me suis guère trompé jusqu’ici au sujet de toute une série de problèmes qui auraient dû discréditer les pessimistes. Nous savons tous aujourd’hui que ceux qui prédisaient de façon alarmiste le pic pétrolier se sont lourdement trompés. Je disais, lorsque ce buzz sur le pic pétrolier se propageait, que les mécanismes de fixation des prix du marché résoudraient nos problèmes d’approvisionnement en énergie. Il est arrivé exactement ce que j’avais prédit.
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Nous voyons l’Amérique du Nord émerger comme le plus grand producteur d’énergie fossile au monde, avec des centaines d’années de réserves. L’Amérique est la nouvelle Arabie Saoudite du monde de l’énergie. Il y a bien assez d’énergie fossile pour attendre sereinement le jour où la technologie ouvrira la voie pour une véritable énergie alternative — en particulier le thorium, qui fournira de l’énergie à l’humanité pour encore des dizaines de milliers d’années. Une innovation encore plus radicale n’est pas juste possible, elle est probable.
De nouvelles technologies d’extraction, comme par exemple le forage horizontal et la fracturation hydraulique, ont ouvert la possibilité pour exploiter de vastes réserves de pétrole et de gaz naturel profondément enfouies sous terre. Mais la technologie de la fracturation hydraulique n’a pas seulement ouvert d’énormes réserves d’énergie. Elle a fait de l’Amérique l’endroit le moins cher au monde pour produire des produits chimiques de base. En ce moment même, sept craqueurs d’éthylène sont en voie de construction. Tous les processus qui utilisent le gaz naturel, comme par exemple la production de phosphate, sont en plein boom.
Même si la révolution de la fracturation est déjà en marche, cette technologie est un véritable bouleversement qui va amener très rapidement la production d’hydrocarbures à des coûts marginaux très faibles. J’appelle cela la percée de la fracturation. Et, vue la totale stupidité de nos classes dirigeantes, Dieu sait que nous avions cruellement besoin de cette découverte capitale.
▪ Quelques réflexions
Selon moi, c’est sans doute la psychologie humaine qui nous fait sentir, lorsque notre époque se termine, que les meilleurs jours de la race humaine sont terminés — tout comme il est normal de penser que la musique de notre jeunesse était meilleure que les nouveaux sons que les jeunes — ces freluquets ! — écoutent aujourd’hui. Toutefois, l’histoire réfute l’idée qui voudrait que, malgré l’accélération incroyable des innovations scientifiques, le progrès aura une fin et que l’humanité reculera.
Un excellentissime auteur de science-fiction, William Gibson, a abordé ce pessimisme cyclique dans un livre intitulé Distrust That Particular Flavor ["Méfiez-vous de cette atmosphère particulière", NDLR). Ce livre est d’une grande utilité si vous êtes sensible aux opinions apocalyptiques liées à l’âge.
Outre la disparition du pic pétrolier et la percée de la fracturation, nous assistons également à une révolution biotechnologique tout à fait remarquable. En fait, je me demande si tous les pessimistes seraient autant déprimés s’ils savaient que la durée de vie en bonne santé a déjà commencé à augmenter de façon spectaculaire.
A bien y réfléchir, je soupçonne que rien n’ébranlera la confiance tenace de ceux qui refusent d’écouter autre chose que ce qu’ils écoutaient au lycée ou à l’université. Ils seront toujours convaincus que le meilleur est derrière nous, tout comme ils voient leur propre jeunesse se faner. Toutefois, ils se trompent et ceux qui investissent dans un avenir meilleur seront récompensés de la meilleure façon possible, avec des bénéfices et une nouvelle jeunesse via les biotechnologies révolutionnaires.
