▪ Ce week-end, c’était Halloween. Nous avons vu des gobelins et des épouvantails… des rongeurs d’1m80… et au moins un corbeau pesant 100 kg.
Nous avons également vu les marchés boursiers chuter et l’or perdre du terrain.
Il y a quelques jours, les investisseurs étaient certains qu’on aurait droit à l’assouplissement quantitatif éternel. Ils n’en sont plus aussi sûrs. La Fed a semblé laisser planer quelque incertitude sur la question lorsqu’elle a fait ses remarques mercredi.
Nous, en revanche, n’avons guère de doutes. La Fed ne se lancera pas dans un programme sérieux de tapering. Elle est décidée à augmenter la "demande". Or la seule sorte de demande qu’elle connaisse, c’est celle qu’on obtient par le cash et le crédit. Quant à la demande authentique — celle qu’on obtient grâce à de vraies augmentations de la richesse réelle et de la prospérité réelle — la Fed en ignore tout, à part qu’elle ne peut rien y faire.
La Fed ne stimule pas vraiment une reprise. Mais elle en simule une… avec une demande factice provenant de cours truqués basés sur des taux d’intérêt faussement bas. Et désormais, elle ne peut plus enlever le masque.
Parce que si elle le fait, tous les déguisements, fausses barbes et accoutrements frauduleux vont devoir disparaître — comme au lendemain d’Halloween, lorsque nous voyons les choses pour ce qu’elles sont vraiment.
Nous réalisons alors qu’une bonne partie de nos cours boursiers, de notre niveau de vie, de nos revenus, de nos bilans est basée sur un mensonge — le mensonge du crédit en expansion constante.
Le crédit augmente à peu près deux fois aussi rapidement que l’économie réelle se développe depuis le début des années 80. C’est à ce moment-là que tout le monde en est venu à croire que "les déficits ne comptent pas".
Sauf que ce n’est pas vrai. Lorsqu’on augmente sa dette plus rapidement que ses revenus pendant 30 ans, on finit par avoir beaucoup plus de dette que de revenus. On se retrouve également dans une impasse. Parce que toute votre économie dépend alors d’une chose qui ne peut pas continuer. On ne peut augmenter ses niveaux de dette éternellement. La fin arrive. Et les masques tombent… les barbes s’effacent… les costumes disparaissent.
Bref, notre économie vit sur de l’argent emprunté et du temps à crédit. Et lorsque la Fed cessera d’ajouter du nouveau crédit, ce sera terminé.
Alors intéressons-nous à un autre sujet…
▪ L’espionnage peut-il être civilisé ?
Sur la première page du Financial Times de vendredi se trouvait la photo d’une femme en route vers la prison. Cette pauvre Rebekah Brooks. Il est bien dommage de devoir la mettre derrière les barreaux. Elle a une si belle chevelure.
Envoyez plutôt le général américain Keith Alexander en prison. C’est à peine s’il a des cheveux.
Notre avis sur leur emprisonnement potentiel n’est pas basé uniquement sur leurs qualités capillaires mais aussi sur leurs crimes. Mme Brooks est accusée d’avoir utilisé des écoutes téléphoniques en Grande-Bretagne afin de pouvoir révéler des "scoops" dans les tabloids anglais. C’est-à-dire qu’elle a agi sur de nobles motifs : gagner de l’argent !
Le général Alexander, en revanche, semble avoir écouté la moitié des conversations téléphoniques de la planète — y compris celles de chefs d’Etat étrangers. Pour quelle raison ? Personne ne le sait vraiment. Il dit qu’il protégeait le monde du terrorisme. Mais Angela Merkel n’est certainement pas une terroriste !
Selon le dernier retournement dans l’affaire de la NSA, l’agence américaine a déclaré que les Européens ont eux-mêmes transmis leurs enregistrements téléphoniques de manière à ce que la NSA puisse espionner leurs conversations. Les Français ont refusé tout net l’explication du général, disant qu’elle n’était "pas plausible".
Les lecteurs doivent être aussi las que nous de toute cette histoire d’espionnage. Qu’y a-t-il de surprenant là-dedans ? Donnez aux espions des milliards de dollars, des technologies dernier cri et 20 000 employés — que pensez-vous qu’ils en feront ? Tout de même, nous mettons cette histoire sur le métier pour y introduire un thème plus large.
Le sujet est familier. Mais cette fois-ci, nous l’approchons depuis un nouvel angle.
Nous parlons de civilisation.
M. Obama et le général Alexander pensent qu’ils la protègent de… eh bien… des barbares. Ils ne sont pas les premiers à penser de la sorte.
"Trois fois les Italiens ont sauvé la civilisation des barbares", a déclaré Benito Mussolini. L’occurrence la plus récente était durant la Deuxième guerre mondiale, quand les bolcheviques menaçaient ce que nous avions de plus cher — c’est du moins ce que disait Benito. Et c’est ce qu’il a cru jusqu’au moment où il a cessé de croire à quoi que ce soit. C’est le moment en avril 1945 où ses partisans l’ont trouvé dans une voiture allemande blindée allant vers le nord, avec un déguisement de sa propre invention… et six mois de retard.
Mussolini — le défenseur de la civilisation occidentale — était habillé en soldat de la Wehrmacht. Malheureusement pour lui, un partisan l’a reconnu. Et malheureusement pour lui, ses gardiens allemands ne l’ont pas défendu.
Au lieu de ça, ils l’abandonnèrent. Et il ne tarda pas à pendre à un lampadaire, la tête en bas, en compagnie de sa maîtresse, Claretta Petacci. Typique à la fois des ennemis de la civilisation et de ses défenseurs, ils n’ont pas fait de distinction entre un véritable ennemi et sa maîtresse. Comme si la pauvre Claretta était coupable d’autre chose que d’être amoureuse du mauvais homme au mauvais moment. Les Navy Seals ont fait la même erreur durant l’assassinat d’Oussama ben Laden, apparemment. Ils ont tué une femme désarmée sur les lieux ; quel était son crime ? Les soldats du général Juan Manuel de Rosas, dans l’Argentine du 19ème siècle, ont décidé eux aussi de protéger la civilisation européenne. C’est ce qu’ils ont fait en vidant les pampas de leurs tribus d’origine. Une fois annihilés ou à peu près, les autochtones ne posaient plus aucune menace pour la civilisation.
Mais peut-on vraiment protéger la civilisation en espionnant… en installant des troupes partout dans le monde… en envoyant des drones… et en tuant les gens ?
A suivre…