▪ Qu’est-ce qui nourrit les marchés actuels ? Une vraie reprise ? Ou l’argent facile et rapide des banques centrales ?
Nous allons faire une supposition échevelée.
Il y a quelques jours, les Japonais ont promis d’imprimer de la monnaie pour acheter leurs propres obligations, rejoignant la clique des Anglais, des Américains et des Européens. Ils continueront jusqu’à ce que les prix grimpent. Ils visent une inflation de 2%. Atteindront-ils leur cible ?
Partout dans le monde, les banquiers centraux sont aux commandes. Ils font bouger les marchés… ils changent des économies… ils maintiennent en vie des entreprises qui auraient fait faillite… et renflouent des secteurs entiers avec des prêts quasiment gratuits.
On félicite les banquiers centraux pour avoir sauvé la civilisation… et maintenant, ils ont l’intention de la rendre encore meilleure.
Mais qui sont-ils ? Avec le destin de l’économie mondiale entre les mains… savent-ils ce qu’ils font ?
De l’agence Reuters :
« Alors que les Etats-Unis vacillaient au bord de la crise financière en 2007, on avait quasiment ignoré les avertissements d’un visionnaire de la Réserve fédérale, selon qui les problèmes de la banque d’affaires Bear Stearns n’étaient pas résolus et posaient ‘un risque énorme’. »
« C’était durant une réunion de la banque centrale américaine en 2007, lorsque les décideurs abordèrent le récent renflouage par Bear Stearns de deux de ses hedge funds ayant subi des pertes sur les prêts subprime. La banque d’affaires se révéla ensuite être l’un des premiers dominos à chuter durant une crise brutale et une récession mondiale — et pourtant, le président de la Fed de New York de l’époque, Timothy Geithner, et d’autres étaient tous d’accord pour dire que la situation était circonscrite. C’était bien différent, dirent-ils, du problème Long-Term Capital Management, le fonds de couverture qui s’était effondré en 1998 et avait failli causer une crise mondiale ».
« Mais Richard Fisher, ancien gestionnaire de hedge fund et alors président de la Réserve fédérale de Dallas, n’était pas de l’avis de ses collègues autour de la table. Il avança qu’il y avait en effet des similitudes inquiétantes entre Bear Stearns et LTCM, y compris une trop grande dépendance aux stress tests purement informatiques et une incertitude concernant la véritable valeur des titres sous-jacents. ‘Je dirais — ayant travaillé dans le secteur, bien qu’il n’ait pas été aussi sophistiqué quand j’y étais — que cela a une ampleur plus large que celle que nous avons connue précédemment’, a déclaré Fisher, selon une transcription de la réunion publiée vendredi ».
« […] ‘Les chiffres sont assez gigantesque’, a ajouté Fisher. ‘Je ne pense pas que le problème soit circonscrit. Je pense qu’il y a un risque énorme’. »
▪ Quand les banques centrales ne comprennent rien…
Bien sûr, il s’avéra que Fisher avait raison. Aujourd’hui, après un embargo de cinq ans, nous avons accès aux notes de la Fed de l’époque. Ce que nous voyons n’est guère surprenant : les grandes huiles n’avaient pas la moindre idée de ce qui se passait.
Aucun d’entre eux ne comprenait la situation. Aucun ne réalisait que l’économie mondiale tout entière était sur le point de prendre une volée de bois vert.
« Je serai la première à dire qu’il est toujours difficile d’avoir exactement la bonne politique monétaire », a déclaré une autre autorité, Janet Yellen, potentiellement prochaine présidente de la Fed si Ben Bernanke attrape un rhume ou une idée.
« Mais les prouesses analytiques de la Fed sont excellentes et notre historique de prévisions est hors pair ».
Nous espérons qu’elle n’était pas sous serment, sans quoi elle risque la prison. Les prouesses de la Fed sont loin d’en être. De nombreux hedge funds, instituts de recherches, banques et économistes indépendants — dont votre serviteur — avaient une idée bien plus claire de la manière dont les choses pouvaient tourner.
Non que quiconque l’ait su avec exactitude. Bear Stearns ? N’importe quel autre grand acteur de la finance aurait pu y passer. On ne connaît jamais les détails et le timing. Tout ce qu’on peut savoir, c’est que les erreurs seront corrigées. Plus on leur permet de durer… plus la correction est grande.
Quelle est l’erreur commise actuellement ? Où est la bulle qui va éclater ? Qu’est-ce que Bernanke, Yellen Shirakawa, King, Draghi et al. n’ont pas vu cette fois-ci ?
Nous sommes d’avis qu’ils ne voient pas la plus grande bulle de tous les temps ; la bulle qu’ils ont eux-mêmes causée. Une bulle de la dette gouvernementale.
3 commentaires
Monsieur Bonner,
Cette bulle de dettes gouvernementales n’a-t-elle pas des similitudes avec le poid énorme de la dette de l’Allemagne envers les vaincqueurs après la 1ère guerre mondiale? L’hyper-inflation en Allemagne alors n’a-t-elle pas été causée par une impossibilité de faire face aux échéances des remboursements des dégâts de guerre et poussa l’Allemagne à imprimer des marks ?
ne pensez vous pas que la bulle boursière (toute cette économie virtuelle)sera compensée à plus ou moins brève échéance par l’impression massive de dollars et ainsi revêtir une légitimité qui mettrait
les banques à l’abri du non remboursement de la dette américaine … et par là même retrouver la souveraineté du dollar ?
Bonjour Monsieur BONNER,
Journaliste économique de télévision,je lis toujours et aussi souvent que possible vos publications et points de vue dont j’apprécie beaucoup le réalisme , le bon sens marqué ,mais aussi l’humour un brin décalé ainsi que le le ton fait de douce ironie ….aux dépens des banquiers centraux .
Je devine à chaque lecture sous votre plume à quel point, en dépit des apparences ,nos économies et donc nos vies sont chaque jour d’avantage en péril.
Ce cancer de la dette très mal soigné par les « Dr Knock » du système financier mondial se répand en effet à un train d’enfer..
Mais , pensez-vous que l’or au premier rang des autres matières premières soit vraiment le meilleur rempart face à un système aussi profondément erratique et déréglé et dont les tares augmentent encore à chaque clôture boursière?
Comme cette approche est très prégnante chez agora, je vous aurais été fort reconnaissant d’avoir l’obligeance de me livrer sans détours et en toute sincérité votre philosophie à cet égard.
Bien cordialement et respectueusement
Marc Brucker