Aujourd’hui, nous quittons un instant les hauteurs de la macroéconomie pour revenir à une question terre-à-terre : où placer son argent quand tout semble cher… et que presque rien ne le mérite vraiment ?
« Que feriez-vous à ma place ? »
La question nous a été posée par l’un de nos chers lecteurs. Et c’est votre rédacteur en chef lui-même qui s’est prêté au jeu pour y répondre.
Et pas seulement d’un point de vue théorique. Il se trouve que nous avons récemment gagné un peu d’argent et dû prendre de vraies décisions d’investissement.
Aujourd’hui, délaissant un instant nos habituelles réflexions macroéconomiques, nous abordons une question plus concrète : que faire de son argent actuellement ?
Notre préférence va toujours aux terrains ou aux entreprises privées. Mais on ne peut pas acheter l’un ou l’autre à la légère. Il faut une bonne raison, un plan, un objectif. Une stratégie claire pour gérer et faire fructifier son capital.
Or, comme le temps, l’énergie et l’attention sont des ressources limitées – et souvent mobilisées ailleurs –, ces opportunités d’investissement ne se présentent pas si souvent.
Les entreprises privées présentent les meilleures opportunités. Ce sont les entreprises, qu’elles soient privées ou cotées en Bourse, qui concentrent la véritable richesse.
Vous pouvez détenir une once d’or ou un bitcoin jusqu’à la fin des temps… vous n’aurez jamais plus qu’une once d’or ou un bitcoin. Une maison, c’est pire encore. Pour la conserver dans 20, 50 ou 100 ans, il faut l’entretenir : assurance, impôts, toiture, nouvelle moquette… Ce que vous obtenez est un lieu de vie – et non un investissement.
Les entreprises, elles, offrent quelque chose de plus. Elles combinent travail, compétences, ressources et une part de chance – tout cela ayant un coût – pour produire un bien ou un service dont la valeur dépasse celle des éléments qui le composent. Ce surplus, c’est le profit. Il est au cœur du capitalisme et du progrès matériel. Et c’est aussi grâce à lui que la plupart des gens s’enrichissent : en puisant dans ce flux de profits… pour remplir leur propre réservoir de richesse.
De ce point de vue, les entreprises privées – détenues et contrôlées de près – valent largement mieux que les entreprises cotées. Vous profitez alors directement des revenus, des avantages sociaux et des déductions fiscales.
A l’inverse, les entreprises cotées à Wall Street sont rarement rentables pour les investisseurs externes à l’entreprise. Au lieu d’obtenir 100 % des bénéfices d’une société privée, vous pouvez espérer, au mieux, un rendement de dividende de 3 %. Et peut-être que l’action montera. Ou peut-être pas.
Dans une grande entreprise, il est très difficile de réduire les coûts. Et tout en haut de la pyramide hiérarchique, la tentation de dépenser l’argent dans la construction d’un empire est grande : nouvelles technologies, employés superflus, bonus mirobolants, pensions généreuses, acquisitions douteuses, sièges sociaux luxueux, jets privés, etc. S’ajoutent à cela les coûts inévitables liés au statut d’entreprise cotée : frais juridiques, comptables, communication, relations publiques…
Si la direction ne fait pas preuve de rigueur et de détermination, les dépenses finiront par rattraper les revenus – voire les dépasser ! – et les employés finiront par disparaître un à un.
Archer Daniels Midland, cependant, a transformé un investissement d’un dollar en 1925 en plus de 50 000 dollars aujourd’hui. Et John Deere a gagné plus de 70 000 dollars en ayant investi un dollar. Mais un professeur de finance de l’Arizona a montré que plus de 50 % des actions ont affiché des rendements cumulés négatifs à long terme.
Autrement dit, très peu d’entreprises génèrent des gains suffisamment importants pour transformer la vie des investisseurs particuliers.
Il est presque miraculeux que certaines entreprises y parviennent. Le réservoir de capitaux privés, géré par des professionnels sérieux, est aussi vaste que l’Atlantique.
Et si les propriétaires décident d’introduire leur entreprise en Bourse, c’est souvent parce qu’ils estiment que les investisseurs particuliers paieront plus cher que les professionnels. Résultat : les actions sont fréquemment achetées à des prix supérieurs à leur valeur réelle.
A Wall Street, on dit que « c’est en achetant qu’on gagne de l’argent ». Mais c’est aussi en achetant qu’on en perd… surtout quand on paie trop cher.
Quoi qu’il en soit, les entreprises qui génèrent des bénéfices et créent de la richesse sont précisément celles que nous voulons posséder. Toute la difficulté consiste à les acquérir à un prix raisonnable.
Pour cela, nous cherchons des situations exceptionnelles : des secteurs délaissés, mal compris, dans lesquels une recherche plus approfondie peut révéler des opportunités rares. Plus largement, nous nous appuyons sur notre modèle Dow/Or, qui nous indique à quel moment le marché dans son ensemble devient suffisamment bon marché pour justifier le fait d’acheter.
En matière d’allocation, nous sommes restés en retrait pendant près de trente ans – observant le ratio Dow/Or passer de plus de 40 à 12,5.
Pendant ce temps, nous avons évité la fin de la bulle Internet, puis la bulle immobilière de 2007–2008, et enfin la dernière folie spéculative née de l’argent facile post-COVID.
Les actions ont grimpé, chuté, puis grimpé à nouveau. Les spéculateurs scandaient : « Achetez le fichu creux. » Et ceux qui sont restés investis contre vents et marées possèdent aujourd’hui des actifs qui valent environ quatre fois plus qu’au début des années 2000.
Ce qui s’est passé en réalité, c’est que le dollar a baissé. En termes de biens et de services qu’elles offrent, les entreprises cotées en Bourse ne valent pas beaucoup plus qu’en 2000. L’or est toujours le numéro 79 du tableau périodique ; il n’a pas progressé non plus.
Et nous attendons toujours que le ratio Dow/Or descende à cinq. Soit le prix de l’or va doubler, soit la valeur des actions sera divisée par deux, soit ils se retrouveront quelque part entre les deux.
Attendre n’est pas très stimulant. Après tout, nous aurions pu acheter des actions Nvidia ! Mais comme nous avons été bien rémunérés pour attendre, cela ne nous a pas dérangé. L’or a été multiplié par 13 (en dollars) depuis 2000, soit plus de trois fois plus que les actions.
En attendant, où investir l’argent frais ? Les actions sont si chères que les gains seront probablement faibles – voire négatifs – au cours des dix prochaines années. Quant à l’or, il est déjà passé d’environ 270 dollars à 3 382 dollars aujourd’hui. Serait-ce ingrat d’en attendre davantage ?
Nous verrons cela dans notre prochain article.