Parier contre les actifs financiers des Etats qui ne peuvent imprimer leur propre monnaie pourrait s’avérer à terme une stratégie payante.
Il existe deux types d’Etats dans ce monde. Ceux qui peuvent imprimer de la monnaie et ceux qui ne le peuvent pas. Cette distinction importe pour déterminer la réussite de vos investissements.
Les marchés boursiers dans les pays possédant une planche à billets se portent bien. Les marchés boursiers des pays qui n’en ont pas ont des problèmes.
Les bourses espagnoles, grecques et italiennes sont à la traîne. Il a fallu fermer la bourse grecque en 2015. En revanche, celles de la Suisse, des Etats-Unis et du Japon tournent à plein régime.
La preuve par l’image
Les tracés qui représentent les indices boursiers des pays qui impriment de la monnaie sont en gras ; les tracés des indices des pays soumis à la politique de la Zone euro de la BCE sont les lignes fines. Les quatre pays les plus performants impriment tous de la monnaie.
Source: Yahoo Finance
Certes, certains pays de la Zone euro s’en sortent bien, en particulier l’Irlande. Mais ceci est dû au fait que la politique monétaire de la BCE lui est bénéfique. La Grèce, l’Espagne et l’Italie se rueraient sur les rotatives si elles le pouvaient.
Si, techniquement, aucun gouvernement n’a le contrôle de la politique de sa banque centrale, les banques centrales sont quasiment un ministère par nature. Ce sont elles qui fixent les prix, permettent les renflouements et elles sont des régulateurs soumis aux décrets gouvernementaux.
L’intérêt de certaines banques centrales est national – elles ne s’occupent que d’un seul pays. D’autres règnent sur plusieurs économies et sur leurs marchés boursiers. C’est là une différence essentielle.
Ce n’est pas que la Bourse mais également l’économie dans son ensemble qui est touchée.
L’Union européenne est une zone unique au monde avec une politique monétaire « à taille unique ».
L’Illinois ressemble de plus en plus à la Grèce. L’Etat vient de voter son premier budget en trois ans. Les tribunaux l’obligent à payer des factures mais il n’a pas l’argent pour le faire. Les engagements en matière de retraite atteignent des sommes astronomiques. Les agences de notation se préparent à classer les obligations de cet Etat en junk.
D’autres Etats américains sont sur la même pente que l’Illinois. Les services de base de certains Etats ont fermé.
Comment tirer profit de ces deux types d’Etats
Les marchés financiers du monde entier bougent au même rythme. Les banquiers centraux les contrôlent tous. Le meilleur moyen d’investir est donc peut-être le pair trading, stratégie qui consiste à se positionner à l’achat sur un actif et en même temps à la vente sur un autre actif connexe. Le but du pair trading est d’être « neutre au marché. »
Prenons un exemple : si vous misez contre les actions italiennes tout en investissant dans les actions suisses, vous êtes neutre au marché… dans un certain sens. Les actions européennes ont tendance à prendre la même direction. En réalité, vous pariez sur le fait que les actions suisses performeront mieux que les actions italiennes.
Peu importe que le marché soit haussier ou baissier pour les actions en Europe. Vos actions suisses pourraient augmenter plus ou baisser moins que les actions italiennes contre lesquelles vous pariez. Vous ferez un bénéfice dans un sens comme dans l’autre. Vous ne perdrez de l’argent que si les actions suisses performent moins bien que les actions italiennes.
L’objectif d’un tel trade est d’être à l’achat des interventions des banques centrales. Les Suisses peuvent imprimer de la monnaie et acheter des actions suisses, ce qu’ils font avec une ampleur exceptionnelle. Les Italiens, eux, sont soumis à la politique monétaire de l’ensemble de la Zone euro. Même s’ils ont récemment ignoré les nouvelles règles de sauvetage des banques de l’UE, mécontentant les dirigeants européens, ils ont une marge de manoeuvre limitée.
Les actions suisses obtenant un important soutien de la banque centrale et les actions italiennes beaucoup moins, ce pair trade devrait rapporter gros. C’est le cas jusqu’à présent.
Prenons un autre exemple.
Imaginez que vous soyez propriétaire de presses à imprimer… la monnaie. Imaginez que vous puissiez imprimer vos propres livres sterling.
En fait, en quelque sorte, vous pouvez investir dans ceux qui possèdent effectivement la planche à billet – le gouvernement.
Acheter des obligations d’Etat de pays qui peuvent imprimer leur monnaie semble être un investissement assez sûr. L’inflation est votre principal risque mais il lui faut du temps pour émerger, vous aurez donc beaucoup d’avertissements. Investir dans des obligations d’Etat à court terme de pays qui impriment n’est donc pas une mauvaise stratégie. Du moins jusqu’à présent.
Entre temps, les Etats qui ne peuvent pas imprimer de la monnaie pourraient devoir faire défaut. Certains Etats des Etats-Unis et de l’UE sont en haut de la liste. Leurs obligations vont régulièrement perdre de la valeur parce qu’ils n’ont pas de banquiers centraux qui s’occupent d’eux spécifiquement.
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Je viens de lire un article intéressant de Ugo Bardi sur le dilemme du campeur ou du jeu du prisonnier dans le contexte du changement climatique. Source ici: http://cassandralegacy.blogspot.ch/2017/06/facing-climate-bear-campers-dilemma.html
Je le résume ici:
Vous et un ami, vous campez dans une forêt que vous savez être habitée par des ours affamés. Imaginez que, pour une raison quelconque, vous ayez perdu contact avec le monde civilisé et que vous êtes seuls pour rentrer chez vous. Vous êtes tous deux non armés et les ours peuvent facilement vous rattraper et vous tuer. Quelle est la meilleure stratégie pour que vous puissiez survivre ? Voici quelques considérations sur le « dilemme du campeur » en fonction du niveau de danger.
1. Le danger est faible -> collaboration. Vous savez qu’il y a des ours dans la forêt, mais vous n’avez aucune preuve qu’il y en ait un proche de vous. Vous et votre ami convenez que vous devriez coopérer, faire le moins de bruit possible, ne laisser aucun résidu de nourriture et ne donner aucune preuve de votre présence.
2. Le danger est élevé -> tromperie. Vous avez vu l’ours et l’ours vous a vus, mais votre ami ne l’a pas vu. Vous ne lui dites pas que vous l’avez vu, au contraire, vous niez avoir vu un ours. À la première occasion, vous dites à votre ami que vous allez vous promener dans la forêt, à la recherche de baies, lui demandant de prendre soin du camp jusqu’à ce que vous reveniez. Dès que vous êtes hors de vue, vous commencez à courir aussi vite que possible, laissant votre ami seul face à l’ours.
3. Le danger est immédiat -> la concurrence. L’ours apparaît brusquement devant vous et charge. Vous et votre ami, vous tournez les talons et vous courez aussi vite que possible. Vous savez que, pour survivre, il suffit de larguer votre ami, pas l’ours.
Vous pouvez connaître l’histoire des deux campeurs et de l’ours qui a été une source d’inspiration pour l’idée du « dilemme du campeur ». Plus que cela, le dilemme du campeur est étroitement lié au modèle appelé « Dilemme du prisonnier ». C’est un jeu opérationnel dans lequel chacun des deux joueurs doit choisir de coopérer ou de trahir l’autre, sans savoir quelle stratégie l’autre choisira. La trahison n’offre un bénéfice à l’un des joueurs que si l’autre joueur coopère. Si les deux trahissent, ils souffrent tous deux de lourdes pénalités. Ci-dessous, vous pouvez voir un exemple de la matrice de coût pour ce jeu.
Le jeu de dilemme du prisonnier n’a pas de stratégie optimale. Des études empiriques ont montré que la stratégie simple appelée « CRP » est celle qui fonctionne le mieux à long terme, mais rien ne garantit qu’elle fonctionnera toujours. Ainsi, le jeu du prisonnier reflète bien la complexité et l’imprévisibilité du monde réel, bien que sous une forme simplifiée.
Le dilemme du campeur, comme décrit ici, est très semblable au dilemme du prisonnier avec la différence que le résultat n’est pas seulement une pénalité : si vous perdez le jeu, vous mourez. Le dilemme du campeur est également « gradué » dans le sens où la meilleure stratégie dépend du niveau de danger. Dans une situation de danger faible, les deux joueurs devraient facilement comprendre que la collaboration est la meilleure stratégie. Mais, comme le danger devient de plus en plus évident et immédiat, la trahison commence à ressembler à une meilleure stratégie.
Il ne me semble pas (mais je me trompe peut-être) que les théoriciens aient examiné ce genre de jeu, donc, pour le moment, ces considérations doivent rester qualitatives. Elles sont néanmoins éclairantes lorsqu’elles sont appliquées à la situation mondiale actuelle, en particulier si l’on considère l’ours comme le « changement climatique » alors que les campeurs sont des populations entières ou des couches sociales.
Par exemple, le traité sur le climat de Paris peut être considéré comme faisant partie d’une stratégie collaborative, mais étant donné qu’il a toujours été clair qu’il était insuffisant pour éviter les catastrophes climatiques, cela peut aussi être considéré comme faisant partie d’une tromperie. Dans le même temps, certains gouvernements ont adopté une position plus ou moins explicitement négative. Par exemple les États-Unis, le Canada et la Russie. Ces gouvernements peuvent croire que leur situation géographique peut leur permettre de laisser loin derrière l’ours du climat ou, de toute façon, qu’ils disposent de ressources suffisantes pour éviter le pire, au moins pour une fraction de leur population. Comme je l’ai mentionné dans un article précédent, certaines élites du monde sont peut-être déjà parvenues à la conclusion que l’ours du climat arrive rapidement et qu’ils peuvent se sauver en se déplaçant vers un terrain plus élevé, tout en laissant les pauvres se noyer ou être cuits vivant.
Bien sûr, cette interprétation ne peut pas être prouvée et il se peut même qu’elle soit fausse. Il est également vrai qu’il existe encore un espace pour une stratégie collaborative qui résoudrait le problème climatique au moyen d’une transition énergétique rapide. Néanmoins, le jeu du dilemme du campeur offre une perspective sur la situation actuelle que je ne voudrais pas rejeter comme impossible, et pas même comme improbable.
On peut aussi imaginer que l’ours, dans le jeu du campeur, puisse être le symbole de la dette, d’un emploi dans une multinationale, d’une guerre civile… Et dans ces temps de russophobie, vous pouvez aussi réécrire l’histoire sans les ours mais avec des Pygargues à tête blanche aux serres acérées par exemple.
Cette publication a été inspirée par une histoire racontée par Filippo Musumeci, publiée (en italien) sur le blog « Effetto Risorse ».