Qu’ils montent ou qu’ils baissent, les marchés financiers semblent désormais complètement dépendre des annonces de politique monétaire et autres interventions étatiques. C’est le fameux « libéralisme » qui est à la manœuvre, assurément !
Si vous faisiez comme moi, si vous collectiez, analysiez les nouvelles chaque matin, vous seriez frappés par l’incohérence voire l’absurdité des marchés et de leurs mouvements.
Vous seriez étonnés des contorsions des commentateurs qui essaient – inlassables, car il faut bien gagner sa vie – de trouver des liens de cause à effet entre les événements et le comportement des Bourses.
Aucun pouvoir d’anticipation
Ils n’ont aucun pouvoir d’anticipation, d’interprétation et à la limite de compréhension de ce qui se passe. Et pour cause, ce sont des marchés dont l’intelligence ne dépasse pas celle des chiens de Pavlov, qui salivent quand ils entendent la clochette.
Nous sommes dans des univers simplistes et simplifiés d’arc-reflexes. L’entendement humain a abdiqué.
Ceci implique que l’intelligence des choses est un handicap au lieu d’être un avantage. Ceci implique que le lointain, le fondamental, le souhaitable, l’optimum, ne sont pris en charge par personne, même pas par la masse, même pas par la résultante des essais et erreurs ou la confrontation d’opinions contraires statistiquement réparties.
C’est l’auto-destruction de toutes les tentatives de validation d’un système qui a échoué à être libéral. Le système est rigoureusement non légitime et non légitimable. Il est inefficace non par construction, mais par son évolution perverse imbécile.
Les marchés, ce sont des bouchons qui flottent grâce à la politique monétaire ou aux interventions institutionnelles, comme ce fut le cas récemment pour les marchés de matières premières. Ils flottent à la surface de courants qui les dépassent. La seule chose qu’il importe de savoir, c’est le niveau de l’eau qui leur permet flotter, et les promesses des autorités quant à ce niveau futur de l’eau.
La notion même de marché se détruit de l’intérieur, et il n’en reste que des simulacres honteux, biaisés, qui permettent à des minorités bien placées de s’en mettre plein les poches et de tondre les moutons qui osent s’aventurer dans ces espaces de prédation.
La fin des marchés
Les marchés ont cessé d’être un lieu de découverte des prix, de confrontation de désirs libres contradictoires, d’informations et de recherche d’optimum.
Les marchés ne sont plus que courroies de transmissions au profit des puissants et espaces de prédation pour une clique.
Et dire que je me suis battu pour cela en son temps !
Je me souviens du temps ou Greenspan disait – avant la crise des dot-com en 2000 – que toute cette foule des analystes et des gestionnaires qui payaient des prix astronomiques pour la technologie ne pouvaient se tromper ! Ah, le ridicule : derrière, on a chuté de 83% !
Ce Greenspan n’avait pas compris ce que j’avais compris depuis deux décennies, à savoir que, lorsque la monnaie était désancrée et la banque centrale activiste, plus rien ne marchait normalement, tout dysfonctionnait, tout déconnait. Tout devenait fragile, caprice, frivole, soumis aux seuls esprits animaux.
Le désancrage des monnaies impliquait avec un temps de retard le désancrage de toutes les valeurs financières lesquelles n’étaient que des avatars de la monnaie et ensuite après le désancrage des valeurs financières, le désancrage en chaîne de toutes les valeurs réelles, puis finalement le désancrage des valeurs morales et des valeurs humaines.
Quand on a désancré les monnaies, on a largué les amarres de la raison, on s’est élancé sur l’océan de la folie.
Ceci a encore été démontré en milieu de semaine dernière, quand Jerome Powell – capitaine du Titanic qu’est la Fed, lui aussi colossal bouchon flottant et radeau de la Méduse sur des courants qui le dépassent – a prononcé le mot magique « agile » (en anglais dans le texte), c’est-à-dire le mot « souple », et qu’il a donc explicitement promis que, dès qu’il le faudra, il stoppera la tentative de resserrement monétaire.
En une semaine, Powell le magicien a créé « 45 000 Mds$ de valeur » sur les marchés globaux.
Tout le reste, toutes les études micro, macro, géo ou autres sont billevesées inutiles et gaspillages.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]
1 commentaire
Voici ce que disait Platon il y a fort longtemps et rejoint quelque part vos commentaires:
Lorsque les pères s’habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils ne tiennent plus compte de leur parole, lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne reconnaissent plus au-dessus d’eux l’autorité de rien ni de personne, alors c’est là en toute beauté et toute jeunesse le début de la tyrannie.