** "Un doute substantiel", disent les auditeurs de Deloitte & Touche. Ils ont étudié les chiffres de General Motors. Lesdits chiffres les poussent à se demander si le constructeur peut continuer comme "entreprise durable".
* A la Chronique Agora, nous avons des doutes substantiels sur un certain nombre de choses.
* En ce qui concerne GM, nous partageons l’inquiétude des auditeurs. Le monde est plein d’usines automobiles. La plupart d’entre elles peuvent construire des voitures mieux, plus vite et pour moins cher que GM. Parallèlement, la demande de voitures n’augmente pas aussi rapidement que la croissance mondiale de la capacité à en construire — en particulier aux Etats-Unis. Non que nous soyons là pour juger. Que M. le Marché s’en charge !
* Mais GM a des amis hauts placés… prêts à peser dans la balance de la justice de M. le Marché. Le constructeur a déjà emprunté 13,5 milliards de dollars. Il demande 30 milliards supplémentaires. Mais quel benêt irait prêter 30 milliards de dollars à une entreprise dont les auditeurs s’inquiètent de la voir faire faillite ?
* D’un autre côté, qui prêterait de l’argent à AIG à quatre reprises… après avoir découvert, à chaque fois, que l’entreprise était en pire état qu’auparavant ?
* Si vous pensez à autre chose qu’au gouvernement américain, vous n’écoutez pas attentivement.
* Les prêteurs du reste du monde sont des idiots aussi — mais d’une espèce différente. Permettez-nous de tracer un portrait simplifié des marchés du crédit mondiaux en l’an de grâce 2009 : les prêteurs de la planète accordent volontiers des prêts au plus grand débiteur de la planète ; ils ne font confiance à personne d’autre. Le plus grand débiteur de la planète, de son côté, prête aux gens à qui les prêteurs privés ne font plus confiance — les emprunteurs qui ne peuvent rembourser l’argent.
** Parallèlement, les ventes chutent ; les profits s’effondrent ; les dividendes disparaissent ; les prix des actions plongent.
* Aux Etats-Unis, une maison hypothéquée sur cinq est sous l’eau. Et le nombre record de 5,4 millions d’Américains sont soit en retard sur leurs paiements, soit sous le coup d’une saisie. Les prix des maisons continuent de chuter.
* Cette chute sans précédent des prix de l’immobilier a mis des millions de ménages en difficulté. Martin Feldstein estime que les ménages américains ont perdu 12 000 milliards de dollars. Il faudra une décennie de taux d’épargne élevés pour remplacer une telle somme, dit-il.
* Le taux d’épargne a grimpé en flèche… passant de sous le zéro en 2006 à 3% aujourd’hui. Cette hausse ponctionnera 500 milliards de dollars par an de l’économie de consommation, pense Feldstein.
* Pas étonnant que les détaillants annoncent des ventes de plus en plus faibles. En février, seul Wal-Mart a annoncé des ventes en hausse. Le distributeur profite de l’effet "à la baisse". Lorsque les gens dépensent, actuellement, ils veulent des alternatives moins chères…
** Pendant ce temps, le flic qui était chargé de surveiller Wall Street lorsque le plus grand cambriolage de l’histoire s’y produisait… et qui a organisé les prêts à AIG et GM… est désormais chef de la police. Tim Geithner a annoncé travailler nuit et jour au plan de relance d’Obama, "parce que nous savons à quel point l’avenir de notre économie en dépend directement".
* Mais comme le souligne notre vieil ami Marc Faber, ni M. Geithner, ni M. Bernanke ni aucun des gouvernants des Etats-Unis ne semblent avoir la moindre idée de ce dont ils parlent. En tant que président de la Fed de New York, écrit Faber, M. Geithner "ne semblait pas ‘savoir’, durant la période précédant la crise, combien l’avenir de l’économie dépend d’un système financier sain !"
* Faber continue en expliquant que non seulement les acteurs principaux n’ont pas compris ce qui se passait — alors que c’était évident à ses yeux, aux nôtres et à ceux de millions d’autres — mais ils ont ensuite fait un mauvais diagnostic du problème, et ont prescrit le mauvais traitement. Ils pensaient qu’il s’agissait d’une crise de liquidités — si bien qu’ils ont injecté des milliards de dollars à des institutions mourantes.
* A toutes les étapes, les autorités se sont montrées sans idées, sans espoir et sans défense. Ce sont les autorités qui ont prêté de l’argent à des taux d’intérêt réels négatifs durant plus de cinq ans. Ce sont les autorités qui ont fait semblant de "réguler" et "contrôler" les marchés… affirmant protéger les investisseurs de la fraude et de la malversation. Ce sont les autorités qui ont approuvé les banques… fixé les critères bancaires… béni les dérivés parce qu’ils "distribuent plus largement le risque" (Greenspan)… ont poussé les gens à acheter des prêts à taux variable (à nouveau Greenspan)… ont vanté les mérites des prêts subprime parce qu’ils encourageaient la propriété immobilière… et ont même dit aux consommateurs de "sortir acheter un 4×4" afin de stimuler l’économie (Robert Tier, gouverneur de la Fed).
* Les autorités ont empilé le petit bois… versé le carburant… et craqué l’allumette. Maintenant, imaginez un peu, ils ont tous rejoint le corps des pompiers !