Le profit est le but ultime du capitalisme… mais il a bien changé, ces dernières années. Désormais, les autorités sont prêtes à tout pour garantir la hausse.
« Cent fois sur le métier remettez votre ouvrage. »
L’ouvrage en question consiste à dire que, dans le système capitaliste, le moteur de l’activité, c’est la production de profit et son accumulation sous forme de hausse de la contre-valeur papier du capital.
Il en découle que le paramètre central est non pas les marges bénéficiaires (le ratio du profit sur le chiffre d’affaires) mais la profitabilité – laquelle est le ratio du profit sur la masse (sans cesse croissante) de capital engagée.
Le critère de la gestion, de l’investissement, de l’embauche, de la distribution de revenus – ce critère, en dernière analyse, c’est ce qui reste : le résidu, le profit.
Le système du capital n’est pas le système de la production pour les besoins, de la production de biens et de services utiles. Non, c’est le système de la production du résidu final : le profit. Le bénéfice. Les capitaux vont là où se produit le bénéfice.
Finalement, c’est bien ainsi – à condition que le système ne devienne pas pervers comme il l’est maintenant…
C’est pour réaliser du profit – de préférence maximum – que le capital investit, embauche, distribue des revenus et ensuite… va se faire coter en Bourse.
Le nouveau capitalisme
Les capitalistes ne s’enrichissent plus en accumulant les profits, non : cela, c’était avant, dans les temps anciens. Désormais, les capitalistes font fortune en introduisant en Bourse, en vendant des espoirs de profits futurs aux gogos… et ils le font grâce aux politiques monétaires conçues pour cela, exactement pour cela.
Les politiques monétaires et financières visent à remplacer l’accumulation réelle du produit par la capitalisation des espoirs de profits.
Les autorités, aidées par les théoriciens qui sont à leur service, ont trouvé une martingale pour créer du capital fictif… pour gonfler le capital existant… pour, en pratique, suppléer au profit insuffisant produit par la vraie activité économique productive.
Les autorités ont branché, comme John Law, une loterie sur le profit réel. Et comme les joueurs exagèrent toujours leurs chances de gagner au jeu, eh bien, « on » réussit à vendre le profit réel, insuffisant, plus cher qu’il ne vaut.
La Bourse en tant que machine à surévaluer est devenue l’auxiliaire indispensable de la survie et de la reproduction du capitalisme.
Une machine à surévaluer
La Bourse a le pouvoir magique de compléter le profit réel par le profit Ponzi – c’est-à-dire de compléter le profit endogène à l’activité économique par un profit exogène, par une plus-value qui provient de la croissance continue des signes monétaires et du crédit.
Si la Bourse n’était pas une machine à surévaluer, on s’apercevrait que le profit est insuffisant et qu’il n’y en a pas assez pour maintenir en vie tout cette masse colossale de capital réel, productif, improductif ou fictif.
L’inflation des cours de Bourse est organiquement indispensable pour maintenir en vie le système.
La Bourse, par sa dynamique haussière, réalise l’équivalent de la bicyclette qui roule : elle maintient le système en équilibre.
Voilà pourquoi elle ne peut plus baisser.
La baisse est interdite, sachez-le.
Cela durera tant que ce ne sera pas su, pas connu, tant que cela restera caché, tant que les gens n’auront pas compris que la baisse est devenue impossible.
Les profits sont décevants
Un jour, je vous expliquerai la grande mutation de ce capitalisme. Je vous expliquerai en quoi il a franchi une étape lorsqu‘il ne s’est plus contenté de réaliser des profits, de les accumuler et de s’enrichir par ce biais.
Je vous expliquerai que l’on a franchi une étape en mettant en place ces Bourses modernes – lesquelles ont pour fonction objective de permettre, après l’accumulation, la mobilisation du capital et ensuite son inflation grâce au multiplicateur de profit.
Les vraies machines à accumuler, ce sont désormais les Bourses. Elles jouissent d’un pouvoir multiplicateur du profit et ainsi, elles gonflent le capital. Elles capitalisent non seulement des profits réalisés mais aussi des profits comptables, des profits virtuels, des espoirs de profits, des mirages de profit – et, en cette phase bullaire, surtout des pertes, comme les pertes des licornes à la Uber, par milliards.
La Bourse est le maillon essentiel de la production du capital ; elle a remplacé l’accumulation ancienne arithmétique par la capitalisation géométrique : le multiple cours-bénéfices.
Les profits réels aux Etats-Unis et en Chine représentent 60% des profits globaux. Les profits réels sont différents des profits aussi bien comptables que recalculés par les analystes, ou même des profits de la comptabilité nationale.
Nous avons publié en fin de semaine dernière un excellent travail sur ce point, vous devriez y aller voir. En réalité, les profits réels sont en recul depuis 2014 !
Même au niveau du marketing financier, on prend conscience du fait que les profits sont décevants.
La solution pour éviter l’effondrement de la pyramide, ce n’est pas le monétaire ; la seule solution, c’est le budgétaire.
Seul le budgétaire permet de regonfler les profits car il augmente les chiffres d’affaires sans augmenter les revenus que l’on doit distribuer : les revenus tombent du ciel des déficits.