** Par où commencer, cher lecteur ? Lorsqu’on a quelque chose d’important à dire, tout comme quand on lance un missile nucléaire… mieux vaut faire attention vers où l’on pointe l’objet…
* Que se passe-t-il quand une bulle entre en collision avec une autre ? Laquelle survit… la bulle des matières premières ? Ou la bulle des gens qui les achètent ?
* C’est grâce aux graphiques qu’on les reconnaît — les bulles, bien entendu. Les courbes se déroulent harmonieusement, calmement, au bas de la page, et tout à coup, elles grimpent d’un coup. Lorsqu’on voit un tel graphique, qu’il s’agisse du prix des tulipes, des actions de la South Sea Company ou de la carrière d’Alan Greenspan, on sait ce qui va arriver ensuite. La ligne va baisser !
* Ce qui grimpe doit baisser. Une bulle est une chose extraordinaire — un phénomène rare, comme un candidat à la présidentielle ayant une opinion honnête. Et toutes les choses extraordinaires tendent à devenir moins extraordinaires au fil du temps. "Le retour à la moyenne", comme l’appellent les statisticiens. La "moyenne" marque le territoire normal. Chaque fois qu’une chose s’aventure dans le territoire anormal, il y a de fortes chances de la voir revenir bientôt sur des terres plus familières.
* Prenez une personne extraordinaire, par exemple. Ses enfants et petits-enfants ressembleront très probablement plus à d’autres gens qu’à cette personne. Ce doit être un terrible fardeau que d’être le fils d’un homme extraordinaire ; les gens vous regardent comme si vous étiez une action dot.com en 99 — ils attendent quelque chose d’exceptionnel. Quasi-inévitablement, ils sont déçus.
* Ou prenez un grand empire. Qu’est-ce qu’un empire sinon un état qui a extraordinairement bien réussi ? Il se démarque parce qu’il a réussi à imposer sa loi sur ses voisins. Pourtant, quel empire dure ? Aucun… tous régressent pour redevenir comme les autres… des lumpen-nations ordinaires.
* Ou prenez la météo. La saison des pluies peut durer longtemps. Mais plus elle dure, plus il faudra de jours secs pour ramener la pluviométrie à des niveaux "normaux".
** Le retour à la moyenne est l’un des paris les plus sûrs que peut faire un investisseur. Laissez les prix atteindre des niveaux extraordinaires, vous êtes quasiment assuré de les voir revenir à la normale. Sur les marchés, le retour à la moyenne est encore plus certain qu’il l’est dans la nature. Parce que les prix extraordinaires mettent en branle une série d’actions et de réactions qui les ramènent presque toujours à l’ordre. Les prix record du pétrole, par exemple, ont déjà enclenché une série de tendances et d’événements qui ne pourront que les faire baisser d’un cran.
* Du côté de l’offre, le secteur pétrolier dépense quatre fois plus pour l’exploration et le développement qu’il le faisait au début du siècle. Le prix des locations d’équipements de forage a plus que triplé. Et à présent, croyez-le ou non, un jeune homme diplômé d’une grande université en ingénierie pétrolière gagne plus d’argent que quelqu’un se lançant dans une carrière à Wall Street.
* Du côté de la demande aussi, des changements se produisent qui réduiront la quantité de pétrole utilisée. Le remède pour les prix élevés, ce sont des prix élevés. Les bulles se corrigent d’elles-mêmes. La hausse des prix pousse les gens à chercher des alternatives — ou simplement à consommer moins. Les importations américaines de pétrole ont chuté sur les 12 dernières années. Et pour la première fois, les Américains conduisent moins.
* Autre piste de recul : l’économie elle-même. La hausse du pétrole agit comme une hausse des taux d’intérêt ou des impôts — elle soustrait de l’argent au commerce intérieur. Cela a pour effet de "refroidir" l’économie… gelant la demande d’énergie.
* Ailleurs encore, on développe à vitesse grand V des substituts au pétrole — éolien, solaire et éco-carburants.
* Le retour à la moyenne fonctionne. Les marchés fonctionnent. La baisse des prix de l’énergie semble acquise.
** Mais à présent, nous introduisons une nuance ennuyeuse. Tandis que la bulle pétrolière gonflait… une autre bulle, bien plus grande, était en train de se développer — et c’est à peine si quelqu’un s’en est aperçu.
* Où ça ? Il suffit de regarder dans le miroir, notre propre espèce. Durant les milliers et les milliers d’années de notre préhistoire, c’est à peine si nous comptions. On trouvait des tribus partout sur la planète… mais elles étaient petites… et avaient du mal à lutter contre les autres espèces dans la course à la nourriture et aux ressources. Il a fallu jusqu’en 1800 pour que la population mondiale atteigne un milliard. Dans le monde entier. L’humanité était alors la grande gagnante. Numero Uno… le joyau de la création. En 1930, un autre milliard avait été ajouté. Un autre encore fut généré durant les 40 années qui suivirent. Ce qui nous mène en 1970 environ, année où la Terre accueillait environ trois milliards de bipèdes plus ou moins sains d’esprits. Depuis, la population humaine a plus que doublé. La ligne a grimpé d’un seul coup, en d’autres termes.
* Mais nous sommes une espère fière et égoïste. A mesure que notre nombre augmente, nous pensons que la route s’élargira pour nous accueillir. Quel choc ce serait de découvrir que toute l’espèce humaine revient à la moyenne, comme tout le reste ! Quelle surprise de ne pas trouver de route du tout — de s’apercevoir que nous courons tous vers le bord d’une falaise… comme des lemmings.
* A suivre…